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par Faustin Turco Conforti aux novices 1920-1921 19 conférences de St Guido Maria Conforti aux novices xavériens

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par Faustin Turco

Conforti aux novices 1920-1921

19 conférences de St Guido Maria Conforti aux novices xavériens

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Éditions Conforti Kinshasa 2020

Conforti aux novices

1920 - 1921

par Faustin Turco

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par Fernando García Rodríguez, sx

C’est avec une grande joie que j’ai reçu et lu le livre « Conforti aux novices 1920-1921 ». Il s’agit justement de dix-neuf conférences données par notre père Fondateur aux novices de la première année du noviciat régulier en 1920-1921.

Cent ans plus tard, dans le cadre de l’année jubilaire de l’approbation des premières Constitutions et de la rédaction de la Cinquième Lettre Circulaire, appelée Lettre Testament (1921-2021), nous trouvons dans ces conférences « l’âme » de St Conforti. Semaine après semaine, Mgr Conforti se rendait régulièrement à la maison Mère pour rencontrer les novices et partager, sous forme d’enseignement, ce qu’il y avait au fond du cœur et donc ce qu’il voulait transmettre à ses fils spirituels. Il leur parlait comme un père qui veut former ses enfants à la vie missionnaire, et celle-ci enracinée dans la vie religieuse. Car c’est en cela que consiste le charisme « xavérien » reconnu et approuvé par l’Église.

En lisant ces Conférences, je ne le cache pas, j’ai été ému. J’ai pensé à Mgr Conforti, pasteur de l’Église de Parme, avec beaucoup de difficultés sur tous les fronts, après la première guerre mondiale. Il prend du temps, il se prépare soigneusement, il va rencontrer ses novices qui représentent la concrétisation de « l’audacieux projet qu’il portait depuis longtemps au fond de son cœur ». Le Saint-Siège, en approuvant les premières Constitutions présentées par Mgr Conforti, reconnaissait en cet audacieux projet un don de l’Esprit à son Église. Il est conscient de la responsabilité que cela comporte. « J’attire votre attention sur l’engagement grave et solennel que nous venons, par-là, de prendre devant Dieu et son Église. Nous devons en souligner toute l’importance et nous efforcer, par conséquent, de réaliser les finalités sublimes que notre Institut se propose d’atteindre » (LT 1). Il s’y donne corps et âme pour que cela se réalise.

PRÉSENTATION

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Je pense que, pour beaucoup d’entre nous, ces Conférences ne sont pas connues. Cette année jubilaire peut être justement un moment privilégié pour connaître mieux « l’âme » de notre père Fondateur. J’invite donc chaque confrère Xavérien de les considérer dans le programme personnel de formation permanente de cette année. Lisons-les et méditons-les comme si c’était Mgr Conforti qui s’adressait personnellement à chacun de nous, comme s’il nous parlait « face à face », comme un père, qui porte le souci de ses enfants et leur parle de « cœur à cœur ». Ne gaspillons pas ce trésor ! Il peut nous offrir toute la richesse qui se trouve dans l’enseignement de notre père !

Je remercie vivement le p. Faustin Turco et la communauté du Postulat-Noviciat de Kinshasa pour ce beau cadeau qu’ils nous offrent en cette année de grâce pour notre Famille Xavérienne. Que l’Esprit de Dieu, Celui qui nous dit continuellement ce que nous devons dire et faire, continue à vous accompagner et enrichir de sa présence.

Pour terminer cette brève présentation, permettez-moi de m’approprier d’un grand désir qui se trouve dans l’introduction : « que la lecture et l’étude des conférences de Conforti aux novices puissent susciter en chaque Xavérien, présent et futur, un vrai esprit de ferveur religieuse et missionnaire, si bien que … Conforti continue à se réjouir de nous tous pour le bien de l’Église et son ‘humble Congrégation’ !» (p. 26).

Comme dit le proverbe : « Tel père, tel fils ». Mgr Conforti avait formulé un vœu (LT 10). Nous le reprenons en forme de désir. La fécondité spirituelle et missionnaire de notre Famille Xavérienne dépend beaucoup de l’écoute et de la mise en pratique des enseignements de notre père Fondateur.

Bonne lecture et méditation de ces 19 conférences ! Fraternellement,

Fernando García Rodríguez, sx Supérieur Général

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par Faustin Turco, sx

1. Contexte socio-politique des années 1920

Les années 1919 et 1920 sont connues, en Italie, comme le « Biennio Rosso » (les deux années rouges) : une période de conflit social intense et de désordres politiques en Italie, après la première guerre mondiale (1914-1918). L’agitation nationaliste revendiquait la récupération des territoires de la Dalmatie, région de l’actuelle Croatie, comme promis suite à la victoire de la guerre. En effet, les Alliés (la France, l’Angleterre et les États Unis) avaient promis à l’Italie la région de la Dalmatie si l’Italie acceptait d’entrer en guerre contre les Empires Centraux (dont l’Allemagne), aux côtés des Alliés.

En 1919, un prêtre, don Luigi Sturzo, fonde, avec le soutien de l’église catholique, le « Parti Populaire Italien », pour s’opposer contre le Parti Socialiste Italien et pour promouvoir les réformes sociales et la dignité de la femme. En même temps, Benito Mussolini lance le Manifeste Fasciste, un premier noyau du futur Parti national fasciste, créé en 1921, et qui vise l’implication du peuple pour la promotion d’une élite révolutionnaire et combattante, destinée à permettre la prise du pouvoir par la révolution.

En 1920, les ouvriers des industries organisent un grand mouvement de grève : Mussolini en profite pour s’allier aux revendications des travailleurs et promettre la conservation de l’ordre et de la paix interne dans le Pays.

L’abbé Angelo Manfredi, dans sa biographie sur St Guido Maria Conforti, présente ainsi le contexte dans lequel notre évêque exerce son ministère épiscopal à Parme qui comptait, à l’époque, 306 paroisses.

« Dans la décennie 1915-1924, Mgr Conforti est dans la période de maturité : il est évêque de Parme depuis plusieurs années (depuis le 12.12.1907) et Fondateur de l’Institut pour les Missions Étrangères depuis 1895. Il a entre 50 et 60 ans. La guerre et l’après-guerre pèsent fortement sur les rythmes pastoraux du diocèse de Parme. Les initiatives programmées par Conforti après la première visite pastorale subissent un ralentissement

INTRODUCTION

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remarquable, même si l’évêque fait tout le possible pour garder en vie l’élan catéchétique. Ces années sont marquées par la pire situation vocationnelle, aussi bien pour le clergé diocésain que pour l’Institut missionnaire. Les paroisses vacantes sont nombreuses, tandis que les séminaires, vidés d’abord par la propagande anticléricale et puis par le recrutement belligérant, n’offrent plus des prêtres, ni pour les montagnes de Parme ni pour les plaines du Henan, la mission chinoise confiée à l’Institut Xavérien. Dans l’après-guerre, malgré les rêves utopiques du monde catholique européen, le climat de violence empêche la reprise sereine de l’activité pastorale sur l’étendue du territoire. Celle de Conforti est donc une maturité insérée dans une époque stressante et complexe. L’évêque ne manquera pas d’en ressentir les conséquences au niveau physique, mais on ne voit pas de découragement ni de recul de ses activités. Il continue à poursuivre sa visite pastorale, à prêcher et à écrire des lettres, à chercher des solutions pour le maintien du minimum de gestion pastorale dans les paroisses. Non seulement : il se préoccupe de lancer et de répandre l’Union Missionnaire du Clergé, en montrant, dans cette initiative, une énergie remarquable »1.

Les visites pastorales, l’animation missionnaire du clergé, le suivi des missionnaires de son Institut, ainsi que, plus tard, la visite en Chine, donneront à Conforti un grand élan dans sa personnalité missionnaire.

Dans les pages qui suivent, nous cherchons à approfondir un autre aspect de Conforti et qui lui est très caractéristique. La période du début des années 1920 est aussi le temps où Conforti développe sa vocation de formateur de missionnaires : il tient des conférences aux novices et des récollections à la Maison-mère, il rédige, entre 1918 et 1921, les Cenni storici, des aperçus historiques sur les commencements de l’Institut, il publie, entre 1918 et 1929, sur le bulletin interne xavérien, Vita Nostra, un éditorial de formation spirituelle (appelé, La Parole du Père) adressé même aux Xavériens présents en Chine ; il imprime, le 02.07.1921, les Constitutions avec la 5ème lettre circulaire, considérée comme la Lettre Testament. Ces initiatives révèlent une grande conviction : donner un nouvel élan à la famille missionnaire qu’il avait fondée 25 ans auparavant.

1 Angelo MANFREDI, Guido Maria Conforti (1865-1931), éd. EMI, Bologna 2010, pp.

440-441.

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2. Un nouvel essor pour l’Institut

Le premier Jubilé de l’Institut 1895-1920 : 25 ans de vie de l’Institut Xavérien pour les Missions Étrangères.

C’est aussi le 25ème anniversaire de la Profession religieuse de Mgr Conforti, faite sous forme privée, le 15 novembre 1895, le matin du jour où les premiers élèves missionnaires entraient dans le « Séminaire Emilien pour les Missions Étrangères » situé en Borgo Léon d’Oro, à Parme.

La décision de commencer l’année canonique de noviciat a constitué un tournant dans l’histoire du jeune Institut Xavérien qui est à sa 25ème année. De 1895 à 1920 il y a eu 27 professions religieuses. Toutefois les premiers confrères n’avait fait qu’une période de préparation à la profession mais qui ne correspondait pas à un « noviciat régulier » selon les normes canoniques actuelles. Conforti lui-même, dans ses aperçus historiques, explique la pratique en vigueur dans cette première période dans la seule Maison de formation existante, à Parme :

« La direction de l’Institut était confiée au Père Recteur, assisté par plusieurs conseillers. Les élèves étaient regroupés en deux sections. La première, appelée École Apostolique, était composée des élèves de l’école secondaire. La deuxième, le Théologat, était appelé la section des Aspirants Missionnaires.

Si un jeune achevait les études secondaires et qu’il se sentait appelé à la vie missionnaire, il devait commencer une espèce de noviciat, de la durée d’une année, au terme de laquelle, sauf empêchement de ses supérieurs, il prononçait une promesse formelle, devant le Saint Sacrement et à la présence de ses condisciples, de vouloir se consacrer aux Missions auprès des non-chrétiens. Au terme des études de théologie, les Aspirants Missionnaires, devenus Prêtres, et à la veille de leur départ en Mission, devaient faire la première profession des vœux religieux pour une durée de deux ans, renouvelable tous les deux ans pour une dizaine d’années. Ce n’est qu’au terme de cette période de 10 ans, qu’ils pouvaient faire la profession perpétuelle, avec le consentement de leurs supérieurs »1.

1 Guido Maria CONFORTI, « Cenni storici », Ermanno FERRO (sous la dir.), Pagine

confortiane, n. 1547-1548, Pro manuscripto, Parme 1999, p. 387.

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C’est ainsi que, entre 1895 et 1921, huit confrères arrivent aux vœux perpétuels après l’itinéraire tracé par Conforti et, dont la durée des vœux temporaires a normalement dépassé les dix ans1.

En cette première période, l’Institut Xavérien se développait lentement et difficilement. Les phases les plus critiques étaient entre 1908 et 1913 où il n’y eut que trois professions religieuses tandis qu’il y eut six pertes (deux décès et cinq abandons2) et, entre 1916 et 1920, on maintint difficilement les positions. Le père Ballarin constate donc ceci :

« Il est remarquable qu’après 25 ans de vie, en 1920, l’Institut ne comptait encore que 17 profès vivants. Ceci explique la réticence de quelques collaborateurs de Conforti, contrariée par la grande confiance du Fondateur qui, justement en 1921, reprenait la construction de la deuxième partie de la Maison-mère. Ce fut alors la renaissance »3.

Les stratégies du nouvel essor Les deux premières décennies du 20ème siècle étaient caractérisées en Italie

et en Chine, par des graves difficultés d’instabilité sociale et économique. Au terme de la Première Guerre Mondiale, Conforti organise à plusieurs niveaux une stratégie pour donner un grand essor à son projet missionnaire. Le premier recours, sans doute, a été celui de la confiance en la Divine Providence pour faire face au manque de formateurs et aux maigres ressources économiques. Ensuite, il réfléchit sur le personnel, les structures, le renouveau pastoral, l’animation missionnaire et les aspects juridiques.

a) Le personnelSi Conforti fait appel à deux de ses fils spirituels, missionnaires en Chine, de

rentrer en Italie pour être formateurs (le père Bonardi rentre en Italie en 1911 et le père Uccelli en 1919), il s’engage à envoyer en Chine, dès que possible, des

1 Les huit confrères qui, en 1921, étaient déjà profès perpétuels sont : Conforti Guido

Maria (1865-1931, Pp. 11.06.02) ; Sartori Antonio Carlo (1878-1924, Pp. 01.04.18) ;

Calza Luigi (1879-1944, Pp. 22.10.21) ; Bonardi Giovanni (1881-1974, Pp. 25.03.16) ;

Dagnino Amatore (1888-1967, Pp. 22.10.21) ; Uccelli Pietro (1874-1954, Pp. 17.09.21) ;

Popoli Alfredo (1889-1936, Pp. 22.10.21) ; Gazza Giovanni (1893-1977, Pp. 04.04.19). 2 Deux décès : Dagnino Vincenzo Luigi (1884-1908) et Dinatale Corrado (1888-1909).

Cinq abandons : Mazzetti Carlo (sorti le 01.08.1907), Pintaldi Vincenzo (sorti le

05.07.1907), Pucci Francesco Saverio (sorti le 29.12.1912), Stornello Antonino (sorti le

03.12.1911), Trascinelli Ciro (sorti le 15.06.1910). 3 Lino BALLARIN, L’anima missionaria di Guido Maria Conforti, éd. ISME Parme

1962, pp. 83-84.

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nouveaux confrères. Il maintiendra sa promesse car, de 1921 à 1924, il enverra en Chine 8 jeunes confrères1. Ces envois sont organisés et vécus comme une grande animation vocationnelle, conscients de bâtir l’avenir de la Congrégation.

b) Les structuresMalgré le manque d’argent et le petit nombre de ceux qui entraient dans

l’Institut, Conforti décide d’élargir la Maison de l’Institut (actuelle Maison-mère) de Parme. À la fin de l’année 1921, il en donne rapport à Mgr Calza, évêque en Chine : « Les nouvelles pièces et étages ajoutés à la Maison-mère sont bientôt terminées. Peut-être en Chine l’on a dit qu’on a gaspillé beaucoup d’argent et on a fait quelque chose d’inutile et inopportun. Pas du tout. Le besoin s’imposait. Nous nous sommes trouvés devant une dure bifurcation : soit il fallait renvoyer les jeunes qui demandaient d’entrer dans l’Institut, soit il fallait élargir nos tentes. Entre les deux options, nous avons préféré la deuxième et nous en sommes contents. Reste encore un grand trou de dettes à recouvrer, mais la divine Providence ne nous manquera jamais, même dans l’avenir, en s’agissant de quelque chose qui était indispensable pour le bien de notre pauvre Institut »2.

Dans la même période, Conforti prend l’initiative d’ouvrir deux nouvelles communautés en Italie : à Vicenza (1919) et à Poggio San Marcello (1925). L’ouverture de ces deux premières « Maisons Apostoliques » en dehors de la Région de Parme, marque un dépassement du recrutement au-delà des limites régionales. Très vite, dans les années qui suivront, les candidats non originaires de l’Émilie Romagne étaient la majorité.

c) Le renouveau pastoral et l’animation missionnaireEn ces années de graves difficultés, Conforti continuait à favoriser les

vocations missionnaires, même parmi les prêtres séculiers. En tant que Président de l’Union Missionnaire du Clergé, Conforti écrit le 20 avril 1921, une lettre circulaire, adressée aux évêques italiens, en les exhortant à soutenir et à encourager les séminaristes diocésains qui se sentaient appelés à la mission3.

1 Entre 1921 et 1924, huit Xavériens partiront en Chine : G. Gazza (1921), L. Rotteglia,

L. Magnani et E. Morazzoni (1922), P. De Martino, V. C. Vanzin, A. Lampis et L.

Fontana (1924).2 Guido Maria CONFORTI, « Lettre au Mgr Luigi Calza (Parme 12.12.1921) », FCT n.

1, p. 133.3 cf. FCT n. 4, pp. 323-325. Conforti a participé à toutes les étapes de fondation, en 1916,

avec le Bienheureux Paolo Manna (1872-1952), de l’Union Missionnaire du Clergé

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Depuis sa prise de possession canonique dans le diocèse de Parme, Conforti choisit la méthode des visites pastorales pour atteindre ses fidèles dans les différentes paroisses de son territoire1. Après le premier conflit mondial, il effectue la 3ème visite pastorale qui durera 4 ans (du 04.12.1918 au 03.03.1923). L’abbé Angelo Manfredi, dans sa biographie de Conforti, décrit la manière dont Conforti organise sa journée habituelle lors de la visite pastorale dans une paroisse : « Conforti arrive dans l’après-midi ou dans la soirée. Le curé et la population l’attendent, après quelques actions liturgiques indiquées dans le rituel tridentin, il s’adresse au peuple par une exhortation. Par la suite, il se met à la disposition pour es confessions, souvent ensemble aux prêcheurs qui ont préparé la visite ou aux prêtres des paroisses voisines. Le lendemain matin, très tôt, il entre encore au confessionnal, il célèbre la Messe solennelle avec une homélie catéchétique, il célèbre la confirmation pour les enfants de la paroisse en leur adressant une allocution de circonstance, il continue la visite des choses de la paroisse. Dans l’après-midi, il rencontre les enfants de la catéchèse et, plus tard, la jeunesse catholique et les éventuelles associations. Ensuite, il poursuit son programme pour atteindre la paroisse suivante »2.

d) La question juridiqueSur la table du bureau du Fondateur, surtout dans la période 1918-1920, se

trouve le dossier du « Règlement » de l’Institut. Il y travaille depuis sa fondation, mais c’est surtout après le décret du Saint Siège de 1918 demandant l’application des normes du Code de Droit Canonique de 1917, que Conforti revoit son texte.

Très respectueux des indications du Saint Siège et des règles ecclésiastiques, le 15 juillet 1920, il demande à Propaganda Fide la sanatio canonique du noviciat, c’est-à-dire la reconnaissance de la validité juridique du noviciat pour les confrères qui avaient fait la profession religieuse avant la promulgation du

(UMC). Le pape Benoît XV le nomme, le 31.08.1918, premier directeur de l’UMC et il

terminera son mandat en 1927. 1 Au cours de son ministère épiscopal à Parme, Conforti fera cinq visites pastorales : la

1ère du 08.12.1908 au 08.12.1912, la 2ème du 14.10.1914 à octobre 1917, la 3ème du

04.12.1918 au 03.03.1923, le 4ème de novembre 1924 à novembre 1927 et la 5ème de mai

1929 au 08.12.1929. 2 Angelo MANFREDI, Guido Maria Conforti (1865-1931), éd. EMI, Bologna 2010, p.

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Code de Droit Canonique de 19171. Voici un extrait de cette lettre de Conforti au cardinal Van Rossum (1854-1932).

« Son Éminence, pour ma paix et celle des autres, je sens le devoir de vous exposer ce qui suit. Dans les premières années de vie de l’Institut de Parme pour les Missions Étrangères, à cause de manque suffisant de personnel dirigeant, ou à cause du manque de structures adaptées, les premiers missionnaires ont suivi entièrement, avant leur profession religieuse, le Noviciat, mais ils n’ont pas pu respecter rigoureusement toutes les dispositions prévues par le Droit Canonique. Maintenant, en doutant de la validité de telles professions, je demande à Son Éminence, une « sanatio », étant donné que nous en avons besoin. Les Missionnaires qui ont fait une telle profession religieuse sont au nombre de 16, et, presque tous sont actuellement en Chine. Je profite, entretemps, de cette occasion pour vous assurer que, dans l’avenir, nous appliqueront le Noviciat avec toute la rigueur demandée par les dispositions canoniques actuelles »2.

Il amène son Règlement même dans le lieu du congé, à La Verne. Après avoir passé quinze jours de « repos », il écrit dans son diaire le 24.07.1918 : « Je viens de terminer aujourd’hui la correction du Règlement, en le rédigeant diligemment selon les canons du nouveau Code de Droit Canonique concernant les Congrégations Religieuses »3.

Malgré les amendements à pourvoir, le Saint Siège, à travers Propaganda Fide, approuve les Constitutions. Le cardinal Van Rossum, Préfet de Propaganda, donne ainsi la bonne nouvelle à l’évêque de Parme : « J’ai le plaisir de vous communiquer que dans l’audience plénière du 22 novembre dernier, les Éminences Pères de cette Sacré Congrégations de Propaganda Fide ont définitivement approuvé, avec des légères modifications, les Constitutions de

1 Voici la liste chronologique des seize confrères pour qui Conforti demande une sanatio

à Propaganda Fide. Nous observons que Conforti n’est pas inclus dans la liste (il serait

le premier chronologiquement) : 1. Sartori Antonio Carlo (1878-1924), 2. Calza Luigi

(1879-1944), 3. Bonardi Giovanni (1881-1974), 4. Brambilla Giuseppe (1878-1949), 5.

Armelloni Leonardo Carlo (1878-1962), 6. Pellerzi Primo Geniale (1881-1942), 7.

Dagnino Amatore (1888-1967), 8. Uccelli Pietro (1874-1954), 9. Guareschi Disma (1881

sorti le 04.05.1821), 10. Bassi Assuero (1887-1970), 11. Chieli Stefano (1880-1961), 12.

Prina Elio (1885-1947), 13. Binaschi Angelo (1885-1947), 14. Popoli Alfredo (1889-

1936), 15. Bertogalli Ermenegildo (1879 sorti le 02.07.1925), 16. Gazza Giovanni (1893-

1977). 2 Guido Maria CONFORTI, « Lettre au cardinal Willem Van Rossum, Préfet de

Propaganda Fide (Parme, le 15.07.1920) », FCT n. 14, p. 732. 3 Guido Maria CONFORTI, “Diario (24.07.1918)”, dans FCT 26, p. 56.

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votre Institut. Le Saint Père, dans l’audience suivante, a bien voulu ratifier une telle résolution »1.

L’approbation définitive des Constitutions sera annoncée par Conforti le 03.12.1920, solennité de St François Xavier, en suscitant une grande émotion auprès des confrères et des jeunes en formation à la Maison-mère. Conforti commente ainsi cet événement, aboutissement d’un long parcours d’élaboration des Règlements de l’Institut :

« En 1920 nous avons eu la joie de voir approuvées définitivement les Constitutions de notre Institut qui, même s’il est le dernier, peut être proche de tous les autres Instituts approuvés par le Saint Siège. Ce moment fut le plus beau que nous puissions souhaiter parce que cette un des signes les plus beaux de l’opportunité et de la sainteté de notre Institut »2.

Le Fondateur eut l’intuition de diffuser le texte définitif des Constitutions le 02.07.1921, lors de la Fête de la Visitation de la Vierge Marie, en l’accompagnant d’une lettre circulaire aux confrères, la 5ème, qui sera considérée par lui-même et par les Xavériens, comme la « Lettre Testament », une vraie synthèse de la spiritualité de la vie religieuse et missionnaire du Fondateur pour ses fils spirituels.

3. Le premier noviciat régulier : ses visages et ses curiosités

La chronologie Parme, le 4 septembre 1920 : Conforti prêche une récollection aux futurs

novices. Le même jour, dans son carnet, il écrit une bonne résolution, faisant écho à ses deux dernières retraites spirituelles qu’il a effectuées en 1917 (à la Maison-mère, Parme) et en 1920 (à Berceto, Parme). « Je vais synthétiser en une phrase les bonnes résolutions prises pendant la Sainte Retraite, à l’ombre du Sanctuaire de la Sainte Vierge des Grâces, ainsi que pendant la retraite de décembre 1917 : vouloir désormais voir Dieu, aimer Dieu, chercher Dieu en tous et en tout et me souvenir en toutes les circonstances de ma vie de la personne adorable de Jésus Christ, en réfléchissant à ce qu’il aurait pensé, dit et fait dans

1 Willem Marinus van Rossum, « Lettre à Mgr Conforti (25.11.1920) », dans

MISSIONARI SAVERIANI, Dati anagrafici del Servo di Dio Guido Maria Conforti,

Texte consulté aux Archives Xavériennes de la Direction Générale de Rome le

19.01.2019. 2 Guido Maria CONFORTI, « Cenni storici », Ermanno FERRO (sous la dir.), Pagine

confortiane, n. 1612, Pro manuscripto, Parme 1999, p. 411.

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cela. Pour rester fidèle à cet engagement, je serai aidé par deux moyens : le souvenir de ma vie passée, tellement dépouillée de mérites et chargée de fautes, et la pensée de la brièveté du temps qui me reste à vivre. Que le Seigneur bénisse mon propos et, par l’intercession de Marie, ma très douce mère, qu’il m’accorde de le mettre en pratique avec fidélité et constance. Accueille, Seigneur, le reste de mes jours ! »1 Par cette bonne résolution, on dirait que Conforti lui-même se prépare à vivre le noviciat de ses fils, comme père et accompagnateur, dans la charité et la discrétion.

Le 08.09.1920 : début de la Retraite des pré-novices, en vue du commencement du Noviciat. Conforti en parle dans une lettre au père Gazza : « Le 8 ou le 9 septembre, nos novices entreront dans la Sainte Retraite avant de commencer, par la suite et de manière digne, le temps de leur épreuve. Je vous les recommande à vos prières »2.

Le 16.09.1920 : début officiel de l’année de noviciat. Dix-neuf candidats y sont admis. Deux autres jeunes le commenceront plus tard (Emaldi, le 31.10.1920 et Tonetto, le 22.11.1920). Pratiquement, le noviciat est constitué de tous les jeunes étudiants de Théologie et de Philosophie qui se trouvaient, en ce moment-là, à la Maison-mère.

Le 03.12.1920 : solennité de St François Xavier. Conforti trace un aperçu historique des 25 ans de vie de l’Institut et lit la lettre du cardinal Préfet de Propaganda où le Saint Siège approuve les Constitutions Xavériennes.

Le 02.07.1921 : fête de la Visitation de la Vierge Marie. Conforti publie les Constitutions en les accompagnant de la 5ème lettre circulaire, dite Lettre Testament.

Le 08.09.1921 : retraite des novices en préparation à la première profession. Le 16.09.1921 : première profession de 14 novices (deux autres la feront

plus tard : Emaldi le 01.11.1921 et Tonetto le 23.11.1921)3. Dans la même célébration, le père Uccelli Pietro fait ses vœux perpétuels.

1 Guido Maria CONFORTI, “Proponimenti, propositi (Parme, 04.09.1920)”, FCT n. 20,

pp. 176-177. 2 Guido Maria CONFORTI, “Lettre au père Giovanni Gazza (Parme, 06.09.1920), FCT

n. 3, pp. 237-238.3 Voici la liste des 16 Premières Professions Xavériennes de l’année 1921, avec le

numéro de profession respectif et l’année de naissance et de mort : 28 Magnani P. Luigi

(1894-1934), 29 Rotteglia P. Luigi (1895, sorti en 1932), 30 Morazzoni P. Eugenio

(1895-1982), 31 Vanzin P. Callisto Giuseppe (1900-1976), 32 Fontana P. Lorenzo

(1901-1990), 33 Lampis P. Angelo Raimondo (1901-1973), 34 De Martino P. Pasquale

(1900-1968), 35 Botta Antonio (1902, sorti en 1922), 36 Battagliarin Mgr Dante (1904-

1978), 37 Chiarel P. Alessandro (1901-1950), 38 Ghezzi P. Mario (1902-1967), 39

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Vanzin : le coordonnateur des novices Cette première édition française des conférences de Conforti aux novices

rend un grand hommage au père Vittorio Callisto Vanzin, le seul novice du groupe 1920-1921 qui eut la grâce de travailler en Afrique (à Uvira, Congo, entre 1969 et 1974), après avoir été missionnaire en Chine.

Dans l’aperçu biographique du père Vanzin (1900-1976), nous trouvons plusieurs éléments historiques du premier noviciat régulier des Xavériens. Ce sont les annotations historiques écrites par le père Vanzin lui-même. Nous y découvrons la nomination de Bonardi comme maître des novices, économe et recteur de la Maison-mère de Parme, et que le novice Vanzin était le préfet, c’est-à-dire, coordonnateur des activités des novices. En effet, certains biographes le définissent comme le alter ego du père Bonardi1 car il l’aidera et le remplacera dans différentes tâches puisque, pour plusieurs raisons, le Fondateur avait dû concentrer dans une seule personne, très compétente et apte, le service de recteur, maître des novices, économe, directeur des publications (revues et livres), propagandiste, sans compter les conférences, le ministère et les journées missionnaires dans plusieurs paroisses. Bonardi se servait donc de Vanzin comme une aide précieuse pour la réalisation fidèle des dispositions formatives. Cette collaboration précieuse, commencée dans la formation initiale de Vanzin, continuera dans l’avenir, surtout quand le père Vanzin rentrera de la Chine, à partir de 1930.

Voici, ci-dessous, la chronique du père Vanzin au sujet de son noviciat. « Ainsi le Fondateur décida de commencer le premier noviciat régulier voulu

par le nouveau Code de Droit Canonique. Il nomma en août le maître des novices, en la personne du père Bonardi, il fit commencer, le 7 septembre, à tous les étudiants un cours d’Exercices Spirituels de huit jours, puis, le soir du 16 septembre, il admit officiellement au Noviciat le groupe des théologiens et des lycéens présents à la Maison-mère (21 élèves qui devinrent 23, en novembre suivant). Vanzin était le coordonnateur du groupe (prefetto des novices).

Le 3 décembre 1920, fête de St François Xavier et commémoration du 25ème anniversaire de la Fondation de l’Institut, le Fondateur, pendant la Ste Messe solennelle, adressa à tous les membres de l’Institut présents un discours très

Ambrico P. Innocenzo (1902-1999), 40 Garbero P. Pietro Lorenzo (1902-1977), 41 Turci

P. Romeo Romano (1902-1972), 42 Emaldi P. Alfeo (1902-1976), 43 Tonetto P.

Giovanni (1901-1973).1 cf. MISSIONARI SAVERIANI, “In memoria del p. Vittorio C. Vanzin”, Notiziario

Saveriano n. 168 (13.06.1977), p. 101.

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émouvant. Il évoqua les débuts de l’histoire de l’œuvre qu’il a fondée, en rappelant les points les plus importants et, dans l’émotion générale, il lit une lettre où le cardinal Préfet de Propaganda, Van Rossum, lui annonçait l’approbation définitive du Règlement de notre Congrégation. Il continua en disant comment ces heureux souvenirs servent non pas à rappeler la vaine gloire, mais à bénir le Seigneur et à augmenter le zèle pour pouvoir répondre aux vœux si ardents de l’Église vis-à-vis de notre Institut. (…) Instruits, assistés avec beaucoup de soin par le Fondateur lui-même, les novices du premier Noviciat xavérien régulier parvinrent au terme de leur année canonique bien préparés. Ils entrèrent en retraite spirituelle le 8 septembre 1921 et, le 17 septembre, avec un premier groupe de 14 novices, il y eut la première profession religieuse « ad triennium » dans les mains du Fondateur qui leur adressa un émouvant discours dans lequel, après avoir relevé l’importance de l’acte posé, aussi bien pour les profès que pour la Congrégation, il résuma à grandes lignes, les devoirs qu’ils avaient contractés et il rappela les instructions et enseignements contenus dans la lettre accompagnatrice des Constitutions qu’il venait de leur donner. Il termina en répétant avec des accents inspirés, ce qu’il appelait le Testament du Père, dans la lettre susmentionnée »1.

Quant à la durée de la profession, Vanzin nous apprend que les novices ont fait les vœux ad triennium, pour une durée de trois ans, différemment des dispositions du Règlement de 1905 qui prévoyait une durée de deux ans2.

Bonardi : le maître des novices Bonardi, missionnaire en Chine depuis 1904, fut rappelé en Italie par

Conforti en 1911 pour prendre la direction de la Maison-mère à Parme. Il commença ainsi une longue période de collaboration avec le Fondateur qui termina, en 1931, avec le décès de ce dernier. Les problèmes de recrutement vocationnel et de formation, de discipline et des finances, les directives, les propositions, les craintes et les joies… tout cela traversait dans l’âme de ces

1 MISSIONARI SAVERIANI, “In memoria del p. Vittorio C. Vanzin”, Notiziario

Saveriano n. 168 (13.06.1977), pp. 99-100. 2 “Les vœux que ceux qui sont jugés dignes professent après le Noviciat, ont une durée

de deux ans : tous les deux ans ils seront renouvelés pour que, au terme d’une décennie,

ceux qui, par la grâce, voudront persévérer dans notre Congrégation et qu’ils seront jugés

idoines, fassent les Vœux perpétuels » (Guido Maria CONFORTI, « Regolamento del

1905 », dans Silvestro VOLTA, La vita di Guido Maria Conforti, éd. CSAM, Brescia

2015, p. 140).

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deux hommes de Dieu dans des entretiens quotidiens à l’Institut ou à l’évêché de Parme.

Le jour de la Pentecôte, le 19.05.1918, entrèrent en vigueur les nouvelles dispositions du Code de Droit Canonique. Les religieux devaient se conformer avec les temps et les modalités concernant le noviciat. Avant tout, pour enlever toute préoccupation et contestation éventuelle sur le passé, le Fondateur, avec une lettre du 17.07.1920, demanda et obtint de Propaganda la « sanatoria » pour la validité de la profession des 16 missionnaires profès vivants (du père Sartori, en 1901 au père Gazza, en 1915).

Ensuite, le Fondateur se préoccupa d’instituer le premier Noviciat régulier, en nommant le père Bonardi maître des novices.

Voilà un beau témoignage écrit par le père Bonardi lui-même. « Le Serviteur de Dieu, Guido Maria Conforti, depuis la première inspiration

de fonder un Séminaire pour les Missions Étrangères, pensa que les missionnaires devaient être liés par les vœux religieux. Un tel lien devait constituer un engagement personnel d’incorporation à une Congrégation missionnaire qui ne devait avoir d’autre but que celui de la prédication de l’Évangile parmi les non-chrétiens et, de laquelle le missionnaire devait recevoir la formation et l’obédience du travail missionnaire dans les territoires assignés par le Saint Siège.

Mais Mgr Conforti ne venait pas d’une formation à la vie religieuse et donc, il en ignorait l’itinéraire formatif. Il devait donc l’apprendre des Instituts approuvés par l’Église. C’est pour cela qu’en 1920, le Fondateur m’a confié la mission de récolter des informations précises et détaillées pour commencer, avec une méthode consolidée, la formation des Aspirants missionnaires dans le premier Noviciat xavérien, selon les dispositions du Code de Droit Canonique qui venait d’être promulgué. Je me suis rendu donc chez différents ordres religieux et Congrégations modernes. À Parme, j’ai interrogé les Franciscains, les Dominicains, les Carmes, les Capucins, les Salésiens, les Stigmatins et les Frères des Écoles Chrétiennes. Pour avoir des informations plus précises, je suis allé même à Turin pour écouter encore les Salésiens et à Piacenza pour consulter les Jésuites. Celui qui fut plus précis et large d’informations fut le père Giovanni Battista Marinig, sj. Il m’a exposé minutieusement la méthode des Jésuites qui, dans des siècles d’expérience, n’ont pas senti le besoin d’apporter des changements substantiels. Le père Marinig, m’expliqua même ce qui concernait la discipline quotidienne et la disposition matérielle des salles du noviciat de la Compagnie. Tout ce que j’ai pu récolter, j’en ai fait compte rendu au Fondateur, en donnant les explications nécessaires. Il les observa, il y

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réfléchit et il donna la priorité à la méthode des Jésuites. Sur celle-là nous avons élaboré l’itinéraire formatif de notre noviciat. La première année devait être une année d’expérience. Par la suite, nous aurions fait des observations et des corrections pour parvenir à consolider le parcours formatif du noviciat xavérien.

Je suis resté maître des novices pendant dix ans pour proposer cette tradition. Le Fondateur suivait le déroulement du noviciat et, plusieurs fois, il recevait les novices en privé pour les écouter et leur prodiguer des conseils »1.

En 1920-1921, Bonardi était, à la fois, recteur de la Maison-mère et maître des novices. Plus tard, en 1924, il se consacrera uniquement à la formation des novices car Mgr Conforti fit revenir de la Chine le père Alfredo Popoli, en le nommant recteur de la Maison-mère 2.

Uccelli P. Pietro : le directeur spirituel de la Maison-mère Pietro Uccelli (1874-1954) fut rappelé de la Chine en 1919 et nommé par

Mgr Conforti comme « directeur spirituel » de la Maison-mère où il y avait les jeunes en formation, des différentes classes de l’école secondaire jusqu’au Théologat.

Quand le premier noviciat fut érigé, Uccelli collabore avec le p. Bonardi tout en laissant le maître le premier responsable des novices.

En même temps, Bonardi était le recteur de la Maison-mère et l’économe… donc la collaboration avec Uccelli était nécessaire. Il aimait dire, surtout par son exemple de vie, à ses jeunes en formation : « faites bien le bien ! ». Aucun problème ni tourment ne semblait troubler sa constance attentive dans les sentiments et dans les actions. Poussé toujours par un sens sublime de l’ordre intérieur, il savait situer chaque chose à sa place, dans sa juste perspective.

Un détail très édifiant : le jour de la première profession des novices, le 17.09.1921, le p. Uccelli fit sa profession perpétuelle. Le directeur spirituel a dit son « oui » définitif au Seigneur, le même jour où ses jeunes dirigés le prononçaient pour la première fois en entrant dans la famille xavérienne. Au lendemain de sa profession perpétuelle, en 1921, il fut envoyé à Vicenza comme recteur de la Maison de formation. Il y restera jusqu’au terme de sa vie, en 1954. Il savait répandre l’ardeur missionnaire dans sa tâche délicate d’éducateur et d’animateur missionnaire.

1 MISSIONARI SAVERIANI, “In morte del padre Giovanni Bonardi”, Notiziario

Saveriano n. 137 (01.09.1974), p. 283. 2 cf. Guido Maria CONFORTI, « Lettera a Mgr Calza (Parme, le 24.07.1924) », FCT 1,

pp. 167-168.

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Conforti : a-t-il fait les vœux religieux ? La chronologie xavérienne considère officiellement les deux dates suivantes :

Conforti fait, en forme privée, les premiers vœux le 15 novembre 1895 (le jour de l’entrée des premiers élèves missionnaires, dans la communauté de Borgo Léon d’Oro, Parme) et les vœux perpétuels le 11 juin 1902 (le jour de son Ordination Épiscopale, dans la Basilique de St Paul de Rome). Comment a-t-on fixé ces deux dates ? Nous choisissons le témoignage de deux confrères qui, en 1962 et en 1970 ont réfléchi sur la question des vœux de Mgr Conforti.

a) Témoignage du père Ballarin« La fondation de Mgr Conforti porte, depuis sa naissance, la physionomie

de Congrégation religieuse. Cette caractéristique lui est congénitale. Conforti ne l’a pas puisée de l’extérieur, d’expériences ou d’indications surgies en un second moment, mais il l’eut de la profondeur de son âme, depuis qu’il pensa créer un Institut missionnaire. (…) Quand il se sentit poussé à former des missionnaires, il les vit aussitôt et toujours tels qu’il aurait voulu être lui-même : jetées corps et âme dans l’apostolat, sans liens ni réserves, c’est-à-dire, il les vit religieux-missionnaires. Pour cela, lui-même, il fit les vœux religieux sous forme privée le 15 novembre 1895, quand naissait son Institut, dont il voulait être à la fois le père et le modèle. Par la suite, le 11 juin 1902, quelques moments avant son ordination épiscopale, il fit les vœux perpétuels »1.

b) Témoignage du père BarsottiLe père Giulio Barsotti, quand il fut Postulateur Général de la cause de

canonisation de Mgr Conforti, se demanda si le Fondateur des Missionnaires Xavériens avait fait la profession des vœux religieux. Sa réponse a été publiée en 1970 quand il disposait de plusieurs témoins oculaires qui avaient bien connu le Fondateur.

« Est-ce que le Serviteur de Dieu Conforti fit sa profession religieuse ? Quand, où, comment, entre les mains de qui fit-il ses vœux ? Plus qu’une simple curiosité filiale, ces questions trouvent leur raison d’être dans le fait qu’il n’y a pas de document, ni d’annotation, ni de texte écrit sur la formule de profession, et on ne connaît même ni le nom de celui qui l’a reçue ni le fait qu’elle ait été précédée par un noviciat canonique : tous ces éléments sont nécessaires pour la validité de la profession religieuse qui est surtout un acte public.

Pour toutes ces questions, nous n’avons qu’une seule réponse, nette et péremptoire : le serviteur de Dieu fit régulièrement sa profession des vœux

1 Lino BALLARIN, L’anima missionaria di Guido Maria Conforti, éd. ISME, Parma

1962, p. 78.

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religieux. La première, celle des vœux temporaires, il la fit dans la communauté de Borgo Leon d’Oro, à l’époque de la fondation de l’Institut (en 1895) ; la deuxième, celle des vœux perpétuels, il la fit dans la Basilique de St Paul à Rome (le 11 juin 1902), juste avant la célébration de son ordination épiscopale. C’est une donnée historiquement confirmée. Le manque des conditions de droit et de la forme du rite n’infirment pas la validité de l’acte accompli, car c’était une pratique universellement connue que les professions au début de toutes les familles religieuses étaient caractérisées par l’absence des conditions et des formalités qui ont été, par la suite, approuvées par le Saint Siège qui, normalement, valide et régularise les premiers vœux faits sous forme privée, comme ce fut le cas aussi de Conforti et de ses premiers fils (cf. lettre à Propaganda du 15 juillet 1920).

Il est utile de lire quelques témoignages. (…) Quand le Serviteur de Dieu ait fait ses premiers vœux religieux – déclare le père Bonardi, témoin qualifié, en se référant à la date car l’événement n’est pas mis en discussion – il ne me l’a pas dit explicitement. Je retiens toutefois qu’il les a faits sous forme privée, le 15 novembre 1895, du fait que j’avais dressé une liste de nos profès, en mettant en premier lieu le Serviteur de Dieu, auquel j’attribuais la première profession à cette date-là. Lui, en corrigeant la liste, avant de la publier, ne fit aucune remarque, ni en cette circonstance-là, ni dans d’autres qui ont suivi. En considérant sa précision et exactitude en toute chose, il aurait certainement fait une remarque en me demandant d’y apporter un amendement, si celle-là n’était pas la date exacte. Par contre, il est certain, même pas son affirmation explicite, - conclut le témoin -, qu’il fit la profession des vœux perpétuels à l’occasion de son ordination épiscopale, dans la Basilique de St Paul à Rome, le 11 juin 1902.

C’est ainsi, et non seulement en vertu de la paternité, mais aussi pour des raisons chronologiques de consécration au Seigneur, que Conforti est et demeure le numéro un de la liste des profès de la Congrégation Xavérienne »1.

c) Recherches actuellesAu niveau des recherches actuelles, nous partageons l’avis des pères Ballarin

et Barsotti. Toutefois, en réalité, il y a un document où Conforti affirme clairement qu’il a fait les vœux religieux. C’est dans une lettre adressée au Secrétaire adjoint de Propaganda Fide qui venait d’écrire à Conforti à l’occasion de son 25ème anniversaire d’épiscopat.

1 Giulio BARSOTTI, Più vivo dei vivi, éd. Pro Sanctitate, Rome 1970, pp. 77-78.

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« (…) Concernant les questions que vous me posez, voilà ce que je peux vous dire en toute vérité. J’ai fait ma profession des vœux religieux le 11 juin 1902, quand la Pieuse Société de St François Xavier était encore une Congrégation Diocésaine et n’avait que l’approbation de l’Évêque de Parme, Mgr Magani d’heureuse mémoire, qui, par Décret Canonique de création de la Congrégation, me nommait Supérieur de celle-ci »1.

Avant la célébration de l’Ordination Épiscopale, Conforti décide donc de faire la profession perpétuelle sur la tombe de l’apôtre Paul. Il fait vœu à Dieu de se consacrer et de se donner totalement pour la conversion des non-chrétiens, en enracinant un tel don dans le vœu de pauvreté, de chasteté et d’obéissance. Le jour de son ordination épiscopale, tandis que tout le monde est pris par un climat de fête, de souhaits et de discours (deux autres évêques ont été ordonnés ce même jour)2, dans le silence et agenouillé sur la tombe de Paul, apôtre des gentils, Conforti nous enseigne que, tout compte fait, ce qui compte est la vie vécue comme un don, comme celle de Jésus qui nous a tant aimés jusqu’à donner soi-même pour nous et pour tous.

Le maître de Conforti : le cardinal Andrea Carlo Ferrari (1850-1921) Il est intéressant de remarquer qu’en 1921, Mgr Conforti tient à adresser

aux jeunes du premier Noviciat régulier un éloge pour le cardinal Andrea Ferrari, né à Palanzano-Parme le 13.08.1850 et mort à Milan le 02.02.1921. Le père Barsotti cite les paroles dont Conforti s’est servi pour tracer le portrait du cardinal Ferrari :

« En parlant à propos des hommes illustres, on a l’habitude de répéter praesentia minuit famam, ce qui veut dire la présence (ou la proximité) diminue leur renommée, parce qu’eux aussi ont leurs défauts, qu’on ne voit pas de loin mais qui sont évidents de plus près. Par contre, pour le cardinal Ferrari, le proverbe latin est faux et il faudrait le corriger ainsi : praesentia auget famam, la proximité augmente la renommée de quelqu’un. Celui qui a pu l’aborder, a pu découvrir de vertus et des talents. Cela est un signe évident de sa sainteté »3.

1 Guido Maria CONFORTI, « Lettre à Mgr Cesare Pecorari, Sous-Secrétaire de

Propaganda Fide (Parme, le 02.07.1927) », FCT n. 14, pp. 1002-1004. 2 Conforti fut ordonné évêque par le cardinal Lucido Maria Parocchi (1833-1903),

Chamberlain et Secrétaire de la Congrégation pour l’Inquisition Universelle. Avec

Conforti, deux autres prêtres furent ordonnés évêques : Benedetto Bonazzi (1840-1915),

archevêque de Benevento et Pietro Maffi (1858-1931) archevêque de Pise. 3 Giulio BARSOTTI, Più vivo dei vivi, éd. Pro Sanctitate, Roma 1970, pp. 329-330.

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Conforti parle ainsi de celui qui fut son formateur et recteur au Grand-Séminaire de Parme et son collaborateur et conseiller pendant toute l’existence. Il fut son véritable maître : « J’ai toujours considéré Ferrari comme mon vénérable maître et mon père affectueux, dont l’image douce sera pour moi toujours plus grande et chère, comme la mémoire des saints qui sont passés ici-bas en offrant une vision céleste »1.

Compte tenu de cette haute considération, il n’est pas exagéré de dire, paradoxalement, que le Bienheureux Andrea Ferrari a été le « maître des novices » de St Guido Maria Conforti !

L’entourage du noviciat Le noviciat prépare le jeune à instaurer des relations nouvelles avec sa

famille d’origine. Les archives xavériennes nous mettent à la disposition un précieux document qui nous permet de penser à la manière dont les parents pouvaient entourer de leur affection leurs enfants dans leur choix missionnaire. La lettre qui suit peut susciter encore de l’émotion et elle concerne Raggi Assunta, la mère de Romano Turci qui fit son noviciat en 1920-1921. À la veille du départ de son fils en Chine, Assunta exprime toute son affection et son offrande pour accueillir la vocation de son fils. Elle ne le verra plus ici sur terre, puisqu’elle mourut quelques mois plus tard.

« Très cher Romano, encore un jour et tu quitteras l’Italie pour partir vers les régions lointaines : je ne te verrai plus, mon cher fils ! Tu pars avec la bénédiction de Dieu et avec la mienne aussi. Tu pars accompagné par Jésus, par la Vierge et par ton Bon Ange Gardien. Tu pars, mais à ton côté, je serai toujours avec toi ! Je te suis partout et je te porte toujours dans mon cœur, de même que je t’ai porté pendant neuf mois dans mon sein.

Je suis vieille, mais le peu de jours qui me restent ici-bas, je les vivrai en m’engageant à prier pour mon bon fils qui est loin, pour qu’il se sanctifie et qu’il puisse faire un grand bien au milieu de ceux qui ne connaissent pas Jésus ! J’offre au Seigneur mon immense sacrifice. J’offre à Notre Dame des Douleurs ma grande souffrance. Tu sais, Romano ? Chaque matin je dédierai la Ste Messe et la Ste Communion pour toi. Et à l’offertoire, je te mets juste à côté de la Sainte Ostie. Avant ton départ, tu as voulu prendre une photo. Mais, je pense que toute notre vie sera une photo. Chaque jour s’ouvre sur nous un objectif qui, dans ses poses, prend même les pensées plus intimes et les sentiments les plus profonds ! L’œil de Dieu pose sur nous, le jour et la nuit : il voit tout, il se

1 Guido Maria CONFORTI, « Éloge funèbre sur le card. Andrea Ferrari, Parme le

08.03.1921, FCT 27, p. 22

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souviens de tout, il marque tout. Voilà, Romano, la vraie photographie ! Le développement sera le dernier jour. La photo sera-t-elle belle ? Sera-t-elle heureuse ? Est-ce qu’on l’aimera ? Le sacrifice présent dans nos cœurs fera émerger certainement de très beaux détails. Mais je craignais que ton départ puisse marquer le terme de ma vie et de celle de ton papa. Quand tu seras loin, au milieu de tes solitudes immenses, souviens-toi de ta pauvre maman, qui te suit de près par la pensée et la prière. Reçois mon accolade la plus affectueuse ! Mon fils, mon fils, mon cher fils : je ne te reverrai plus ! Ta maman »1.

Une formation solide En parcourant la biographie des néo-profès de 1921, nous pouvons affirmer

clairement qu’ils ont bénéficié d’une formation solide, qui les a soutenus dans les difficultés les plus atroces. À part les deux qui abandonnèrent l’Institut, tous les 14 autres néo-profès de 1921 partirent en mission en Chine. Et dix d’entre eux ont vécu les souffrances des cachots et du camp de concentration2. L’un deux, le père Garbero, prit la peine d’écrire un volume très bien fait et qui parle sur les Missionnaires Xavériens en Chine. En présentant l’histoire des origines de la présence xavérienne jusqu’à l’expulsion du dernier confrère, nous admirons, entre-autre, la valeur des confrères qui supportaient l’emprisonnement, le camp de concentration et les souffrances physiques et spirituelles pour accomplir leur mission en Chine. Le p. Garbero s’exprime en ces termes : « Les obstacles qui mirent en crise la réalisation de la mission étaient très diversifiés et de grave nature : la grande pauvreté de la population, souvent privée du nécessaire, le brigandage et la guerre civile (…) et, enfin, le terrible danger du camp de concentration qui obligea une cinquantaine de missionnaires à vivre dans la plus dure et épuisante inactivité pour plus de quinze mille journées qu’ils auraient pu employer en mille autres façons. Plus tard, une trentaine d’entre eux, furent rendus dignes de souffrir pour le nom du Christ, dans les sombres cachots de Mao Zedong, où ils passèrent non moins de 3500 jours » 3.

1 Assunta RAGGI, “Lettre à son fils Romano Turci (août 1932)”, dans MISSIONARI

SAVERIANI, “In morte del confratello P. Romano Turci”, Notiziario Saveriano n. 109

(08.09.1972), pp. 134-135. 2 Sur 14 néo-profès, 4 n’ont pas vécu directement les événements des tortures maoïstes :

le père Magnani (il était mort avant), le père Vanzin et Battagliarin (ils étaient déjà

rentrés en Italie) et le père Garbero (qui, tout en étant en chine, prit la peine d’écrire dans

les détails l’histoire de ces années-là). 3Pietro GARBERO, I Missionari Saveriani in Cina, éd. ISME, Parme 1965, p. 355.

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Par exemple, en 1942, le père Tonetto, l’un des novices 1920-1921, venait d’être interné dans un camp de concentration, où il resta jusqu’en 1945. Pendant cette période de grande tension physique et morale, il put écrire à ses amis : « S’il devait nous arriver le malheur d’être décapités, et cela est bien possible, je vous prie, vous tous, d’avoir beaucoup de charité et de compassion »1.

Ces événements constituèrent un authentique « deuxième noviciat » pour le groupe du « premier noviciat régulier xavérien » : ils ont grandi dans la foi, dans la vocation missionnaire, dans les vertus humaines et chrétiennes. Face à la guerre, à la destruction et à l’expulsion, ils ont fait face au sentiment humain d’inutilité des énormes sacrifices qu’ils ont endurés. C’est justement dans cette situation, que l’espérance renaît car « le grain tombé en terre et qui meurt, produira beaucoup de fruit » (cf. Jn 12,24). Le père Garbero conclut son livre ainsi : « Que les Xavériens ne soient pas pressés de voir les fruits de leur apostolat. Qu’ils bénissent le Seigneur car il les a appelés à jeter la semence de l’Évangile en Chine et à la féconder par leurs sacrifices, par leur sueur et leur sang. Quand Dieu le voudra, il fera germer la semence et, alors, ils seront prêts à courir en Chine pour récolter les fruits ! » 2.

4. Les conférences aux novices

Le recueil des conférences de Conforti aux novices C’est au sein du 6ème Chapitre Général de 1956 qu’on demanda au nouveau

Supérieur Général, le père Giovanni Castelli (1911-1975) de publier, entre-autres, « toutes les conférences de Conforti aux novices du premier Noviciat 1920-1921 »3. Le volume a été réalisé grâce à l’apport du père Giovanni Gazza (1893-1977), alors maître des novices, entre 1956 et 1966 (et ancien Supérieur Général)4. C’est le père Franco Teodori qui introduit la publication : ce sera son premier volume5 de celle qui constituera la « Source Confortienne Teodorienne » (FCT, en sigle) qui compte aujourd’hui 28 volumes.

1 MISSIONARI SAVERIANI, “In memoria del padre Giovanni Tonetto”, Notiziario

Saveriano n. 119 (09.04.1973), p. 103. 2Pietro GARBERO, I Missionari Saveriani in Cina, éd. ISME, Parme 1965, p. 355. 3 MISSIONARI SAVERIANI, “In morte del P. Giovanni Castelli”, Notiziario Saveriano

n. 159 (07.10.1976), p. 109.4 cf. MISSIONARI SAVERIANI, “In memoria del confratello P. Giovanni Gazza”,

Notiziario Saveriano n. 184 (21.02.1978), p. 85.5 TEODORI Franco (sous la dir.), La Parola del Fondatore, éd. ISME, Parme 1966, 236

p. Ce volume rassemble plusieurs écrits de Conforti : Lettres au cardinal Ledochowski

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Cette première publication des conférences aux novices présente chaque conférence en deux parties : d’abord le texte du Fondateur, dont il se servait pour tenir son allocution et, ensuite, les notes prises par le novice Alessandro Chiarel en écoutant la conférence. Le premier texte est très essentiel, parfois sans enchaînement logique des idées. Les notes de Chiarel ont l’avantage de montrer la beauté de l’enseignement, par un clair argumentaire, des exemples et même des digressions adaptées à son auditoire. Dans cette publication française, au lieu de suivre le texte de Conforti avec les notes de Chiarel, nous avons préféré mettre en synopse les deux, en les distinguant graphiquement, de sorte que les phrases de l’un et de l’autre se complètent pour constituer une seule allocution : cette méthode voudrait privilégier la compréhension du contenu que le Fondateur a donné à ses jeunes et éviter les répétitions.

Les Archives ont offert donc 17 conférences que Conforti à prononcées aux novices de 1920-1921 : toutefois le recueil en présente 19, car une a été donnée avant le commencement du noviciat (elle est considérée comme la conférence n. 0, car elle n’a pas été publiée dans le livre de Teodori de 1966) et l’autreremonte au noviciat 1926-1927 (elle porte le n. 18). Le père Teodori offre mêmed’autres précisions géographiques : « Les conférences se tenaient dans la sallede conférences du noviciat à la Maison-mère, salle qui occupait la dernièrepièce à Est du deuxième étage, au centre, jusqu’à quand, terminée laconstruction du nouveau pavillon Ouest, en 1922, le noviciat fut transféré dansle nouveau bâtiment séparé, et la salle de conférences devint infirmerie et puisune partie du dortoir des profès »1.

Nous avons donc le recueil des conférences de Conforti aux candidats du 1er noviciat régulier (1920-1921), mais les Archives xavériennes ne disposent pas d’autres conférences du Fondateur aux novices des années qui ont suivi. Serait-ce parce que Conforti n’y était plus présent ? Pas du tout. La chronologie de Conforti nous montre combien de fois l’évêque de Parme s’est rendu à « l’Institut des Missions » pour rencontrer les jeunes. Par exemple, dans l’aperçu biographique du père Pietro Valenti (1906-1977), qui faisait partie du 3ème Noviciat régulier (1922-1923), nous lisons : « Valenti fut admis au noviciat à Parme le 16.08.1922, en se réjouissant de la proximité du Fondateur qui venait souvent pour les Récollections et qui fit même le don à tout l’Institut

(1894-1902), Lettres à Rastelli, Manini, Grassi et Fogolla (1899-1902), Discours d’envoi

en Chine (1899-1931) et, enfin, dans les pages 127-231, les Conférences aux novices. 1 TEODORI Franco (sous la dir.), La Parola del Fondatore, éd. ISME, Parme 1966, p. 128.

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d’amener à la Maison-mère, pour une veillée de prière entre le 28 et le 29 janvier 1923, la relique du Bras de St François Xavier »1.

Sources En parcourant le texte des conférences, le lecteur d’aujourd’hui se pose la

question : quelle pouvait être la bibliographie de Conforti ? Quels étaient ses ouvrages de référence ?

En plus d’une abondante référence biblique, directe et indirecte, parfois, il cite lui-même des auteurs : la Somme Théologique de Saint Thomas d’Aquin, la Divine Comédie de Dante Alighieri, les Exercices spirituels de Saint Ignace, l’Histoire du Christ de Giovanni Papini, l’Imitation du Christ, des aphorismes classiques et locution latines très connues dans le milieu éducatif de l’époque et difficilement attribuables à des auteurs.

Le père Amato Dagnino (1918-2013), illustre enseignant de théologie spirituelle, affirme que Conforti se sert de deux manuels de spiritualité pour ses allocutions aux novices : celui d’Alphonse Rodriguez, que Conforti cite directement le 21.04.1921, et celui de Jean-Baptiste Chautard. Quant au premier, Dagnino déclare : « Le traité plus classique et complet de l’ascèse chrétienne est le célèbre chef d’œuvre de Rodriguez, L’exercice de la perfection et des vertus chrétiennes (1609). (…) Dans mon noviciat, 1934-1935 ce livre était encore lu quotidiennement et cette lecture était si importante que chacun devait en faire un résumé »2. Quant au deuxième, il n’est pas cité directement par Conforti mais il était considéré comme le best-seller de l’époque. « L’âme de tout apostolat » publié en 1907, par Jean-Baptiste Chautard (1858-1935), connaîtra plusieurs éditions et deviendra si célèbre que même le pape Pie X le considère comme son livre de chevet. Le père Dagnino dit, à propos : « Si Mgr Conforti n’a pas été un écrivain ou un auteur sur la vie spirituelle, ce n’est à cause des différentes nécessités pastorales qui l’absorbaient et qui l’empêchaient de s’y appliquer. Mais les Règlements et les allocutions aux novices nous disent clairement qu’il en avait toutes les prédispositions tempéramentales et les capacités intellectuelles. Aux novices, il était capable de citer par cœur L’âme de l’apostolat de Chautard et de faire des références théologiques » 3.

1 MISSIONARI SAVERIANI, “In memoria del confratello P. Pietro Valenti”, Notiziario

Saveriano n. 175 (15.09.1977), p. 283. 2 Amato DAGNINO, Il cantico dell’amore, éd. Paoline, Torino 1990, p. 9. 3 cf. Amato DAGNINO, « Tentativo di individuare la spiritualità saveriana secondo il

pensiero di Mons. Conforti », Commix n. 23 (1991), pp. 6-7.

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5. Pour terminer

Conforti fut très enthousiaste des jeunes de ce premier noviciat régulier. E 1921, il en parle au Mgr Calza, évêque en Chine : « On a presque du mal à reconnaître ceux qui viennent de faire leur première profession cette année, tellement ils ont amélioré leur tempérament. Même les nouveaux novices qui viennent de commencer leur année, se sont vite mis à l’œuvre d’une vraie ferveur et ils promettent bien pour leur avenir »1.

Nous avons au cœur un grand désir : que la lecture et l’étude des conférences de Conforti aux novices puissent susciter en chaque Xavérien, présent et futur, un vrai esprit de ferveur religieuse et missionnaire, si bien que … Conforti continue à se réjouir de nous tous pour le bien de l’Église et de son « humble Congrégation » !

Bibliographie essentielle BALLARIN Lino, L’anima missionaria di G. M. Conforti, éd. ISME Parme 1962, 149 p. BARSOTTI Giulio, Più vivo dei vivi, éd. Pro Sanctitate, Rome 1970, 355 p. COLETTO Armando (sous la dir.), Mgr Guido Maria Conforti, Fondateur des

Missionnaires Xavériens. Paroles d’envoi en mission, éd. EMI, Yaoundé-Cameroun 2011, 223 p.

DAGNINO Amato, « Tentativo di individuare la spiritualità saveriana secondo il pensiero di Mons. Conforti », Commix n. 23 (1991), pp. 6-21.

----------, Il cantico dell’amore, éd. Paoline, Torino 1990, 141 p. FERRO Ermanno (sous la dir.), Pagine confortiane. Scritti e discorsi di G. M. Conforti per

i Missionari Saveriani, éd. Centro Studi Confortiani Saveriani, Parma 1999, 600 p. GARBERO Pietro, I Missionari Saveriani in Cina, éd. ISME, Parme 1965, 373 p. MANFREDI Angelo, Guido Maria Conforti (1865-1931), éd. EMI, Bologna 2010, 734 p. MISSIONARI SAVERIANI, “In memoria del confratello P. Giovanni Gazza”,

Notiziario Saveriano n. 184 (21.02.1978), p. 45-88. ----------, “In memoria del confratello P. Pietro Valenti”, Notiziario Saveriano n.

175 (15.09.1977), pp. 281-288. ----------, “In memoria del p. Vittorio C. Vanzin”, Notiziario Saveriano n. 168

(13.06.1977), pp. 93-127. ----------, “In memoria del padre Giovanni Tonetto”, Notiziario Saveriano n. 119

(09.04.1973), pp. 97-108.

1 Guido Maria CONFORTI, « Lettre au Mgr Luigi Calza (Parme 12.12.1921) », FCT n.

1, p. 134.

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----------, “In morte del confratello P. Romano Turci”, Notiziario Saveriano n. 109 (08.09.1972), pp. 133-143.

----------, “In morte del P. Giovanni Castelli”, Notiziario Saveriano n. 159 (07.10.1976), pp. 89-115.

----------, Anagrafe (1 aprile 2008), éd. ISME, Rome 2008, 375 p. TEODORI Franco, “In morte del padre Giovanni Bonardi”, Notiziario Saveriano

n. 137 (01.09.1974), pp. 137-192.VOLTA Silvestro, La vita di Guido Maria Conforti, éd. CSAM, Brescia 2015, 263 p.

Source confortienne du père Teodori FCT 0 : TEODORI Franco (sous la dir.), La Parola del Fondatore, éd. ISME, Parme

1966, 236 p. FCT 1 : ----------, Guido Maria Conforti. Lettere a Monsignor Luigi Calza s.x, ai

Padri Caio Rastelli e Odoardo Manini e Lettere Circolari ai Saveriani, éd. Tipografica S. Paolo, Rome 1977, 316 p.

FCT 2 : ----------, L’anima Guido Maria Conforti. Lettere ai Saveriani 2: Pellegri, Sartori, Bonardi, Armelloni, Pelerzi, Dagnino Amatore e Vincenzo, éd. Procura Generale Saveriana, Roma 1977, 288 p.

FCT 3 : ----------, Guido Maria Conforti. Lettere ai Saveriani n. 3: Uccelli e Casa Apostolica di Vicenza, Popoli e Casa Apostolica di Poggio, Gazza, Magnani, Morazzoni, Vanzin, Bassi e Missionari in Cina, éd. Tipografica S. Paolo, Rome 1977, 464 p.

FCT 4 : ----------, Guido Maria Conforti. Unione Missionaria del Clero. Lettere e Discorsi dalla Fondazione (1916) al termine del suo mandato di Presidente (1927), éd. Tipografica S. Paolo, Rome 1978, 704 p.

FCT 14 : ----------, Beato Guido Maria Conforti. Missioni in Cina e Legislazione Saveriana, éd. Libreria Editrice Vaticana, Rome 1995, 1152 p.

FCT 20 : ----------, L’anima del Beato Guido Maria Conforti nei suoi Giubilei Saerdotale ed Episcopale con Esercizi Spirituali, Lumi e Propositi. Ritiri in Italia e Cina, éd. Libreria Editrice Vaticana, Roma 1997, 360 p.

FCT 26 : ----------, Diario, Atti, Discorsi del Beato Guido Maria Conforti, Arcivescovo-Vescovo di Parma. Pastorali di Quaresima. III° Visita Pastorale. 1918-1920, éd. Libreria Editrice Vaticana, Rome 1999, 896 p.

FCT 27 : ----------, Beato Guido Maria Conforti, Arcivescovo-Vescovo di Parma. Omelie in Duomo. Panegirici dei Santi. Discorsi vari. Giubileo Anno Santo. Lettere a Clero e Popolo. IV Visita Pastorale. Pastorali di Quaresima 1921-1925, éd. Libreria Editrice Vaticana, Rome 1995, 688 p.

Faustin Turco sx Kinshasa (RDC), le 02.02.2020

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Parme, Institut Missions Étrangères, octobre 1921 : novices du premier noviciat régulier.

Au centre le p. Uccelli Pietro et à sa gauche, lui aussi avec le tricorne, le p. Giovanni

Bonardi. Source : Parma negli anni, n. 11/2006, p. 138.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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0. La voie de la perfection

Conférence de Mgr Conforti aux futurs novices (cf. FCT 20, pp. 231-232)1 Parme, ISME, 04 septembre 1920

La voie des conseils évangéliques Considérons le jeune qui se présente devant le Christ. Deux sont les voies

pour atteindre le Ciel : la première celle des préceptes, la deuxième celle des conseils évangéliques. Des deux, laquelle est la meilleure ? Du point de vue subjectif, la meilleure est celle à laquelle Dieu nous appelle. Du point de vue objectif, la meilleure est celle des conseils évangéliques. Voilà les raisons : elle nous rend plus conformes au Christ ; elle nous détache des créatures ; elle nous offre des plus grands moyens de sanctification.

Nous connaissons ce que St Bernard dit à ce propos : l’essence de la vie religieuse consiste dans la profession des trois vœux, de pauvreté, de chasteté et d’obéissance2. Heureux donc ceux qui sont appelés à la vie religieuse. Et l’Église, tandis qu’elle fait concevoir à ses enfants un concept très élevé de cet état de vie, elle demande que soient soigneusement éprouvés ceux qui aspirent à cet état de vie. Et voilà le noviciat qui dure au moins une année, mais pour quelques Instituts plus austères même deux ans.

Noviciat : un temps d’épreuve Qu’est-ce qu’est le noviciat ? C’est un temps d’épreuve dans laquelle

l’Institut fait l’expérience du sérieux des intentions de ceux qui aspirent à la vie religieuse. C’est également une épreuve du novice qui fait l’expérience concrète « du poids qu’il peut porter et de ce que ses épaules peuvent

1 Conforti reprendra ce texte et il le reformulera dans PdP 30 pour tous les Xavériens,

avec le titre « Le fondement de l’humilité ». Dans la tradition xavérienne, le sigle « PdP »

(Parole du Père), renvoie au recueil des éditoriaux écrits par Mgr Conforti dans la revue

interne xavérienne Vita Nostra. Ces éditoriaux portaient le titre de « La Parole du Père »

et ils ont été écrits entre 1918 et 1929, pour un total de 67 écrits. La traduction française

de PdP est disponible dans le texte suivant : Armando COLETTO (sous la dir.), Mgr

Guido Maria Conforti, Fondateur des Missionnaires Xavériens. Paroles d’envoi en

mission, éd. EMI, Yaoundé-Cameroun 2011, pp. 131-212. 2 Conforti a une grande estime pour Saint Bernard (1090-1153), le « Docteur de

Clairvaux » (PdP 26), « l’un des plus grands maîtres de vie spirituelle » (PdP 32) et il s’y

réfère surtout pour montrer l’excellence de l’état de la vie consacrée.

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supporter »1. Étudiez les prescriptions principales du Droit Canonique sur le noviciat.

Noviciat : un temps d’observation de la règle Le noviciat est un temps de culture intensive de l’esprit et le novice doit se

tenir rigoureusement à ce que prescrit la Règle. Jadis, tous devaient se soumettre au noviciat. On a donc vu de Évêques et des Cardinaux, des princes et des rois se soumettre aux minutieuses prescriptions du noviciat. Vous devez donc observer minutieusement les règles autour du silence, des pratiques de piété, aux services même les plus humbles à rendre en communauté et aux confrères.

L’entraînement à l’humilité Au noviciat, l’on vise à entraîner chez les candidats l’humilité chrétienne,

qualité aussi nécessaire que difficile. Tous les maîtres d’esprit concordent à souligner cette nécessité, par exemple St Augustin, pour ne citer que lui. Les novices doivent bien garder à l’esprit le Christ dans sa vie cachée. Et cela est un des plus grands mystères. Pourquoi a-t-il voulu rester pour 30 ans caché ? Pour poser les fondations de son Règne qui doit être dans nos cœurs. Et cette fondation est l’humilité. Le Fils de Dieu, que fait-il dans la maisonnette de Nazareth ? Il scie, rabote, balaye, amène du matériel, va chercher des commissions. Il nous fallait justement cet exemple pour que Dieu initie l’homme, orgueilleux par nature, à la vertu de l’humilité.

Le fondement : l’humilité Vous aussi, vous devez poser ce fondement. Vous devez vous persuader

de votre néant. Vous devez vous convaincre de la vérité de la maxime : « Aimez à vivre inconnu et à n’être compté pour rien »2. Quand vous avez posé ce fondement, vous pourrez bien avancer.

Le noviciat est précédé par la Retraite. Mettez-y tout votre cœur.

1 Conforti cite ici la phrase attribuée au poète latin Horace (65-8 av. JC) : « quid valeant

humeri et quid ferre recusent ». C’est une image qui renvoie la personne à la prise de

conscience de ses capacités et de ses limites. 2 Conforti cite ici la phrase en latin : ama nesciri et pro nihilo reputari (cf. Imitation du

Christ, livre 1, chap. 2, point 4).

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1. Conseils évangéliquesParme, ISME, 19 février 19211

Les préceptes et les conseils 16162 Jésus Christ avait été annoncé par les prophètes comme l’Ange du Conseil3. En effet, non seulement il a donné des préceptes, mais aussi des conseils. Comme Suprême Seigneur, il a dit : renie-toi, toi-même (cf. Mt 16,24). Comme ami incomparable, il a dit « Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes » (Mt 19,21). Il a appelé heureux « ceux à qui cela est donné » (Mt 19,11). Le précepte convient au serviteur, au subalterne. Le conseil revient à l’ami, au confident. Les Saints comprirent la portée de l’invitation du Christ et ils abandonnèrent toute chose. Pauvreté, chasteté, obéissance.

Trois conseils 1617 Rien de plus conforme aux desseins du Créateur. Par la pauvreté, le religieux se limite au strict nécessaire. Dieu, en effet, nous a donné ces choses uniquement pour que nous nous en servions en fonction de la finalité ultime. Par la chasteté, l’homme s’oblige à vivre comme un Ange ; rien de plus conforme à la pureté de Dieu qui est la sainteté par antonomase. Par le vœu d’obéissance, l’âme renonce à suivre sa volonté, pour faire uniquement celle de Dieu. Quoi de plus conforme aux desseins de Dieu ?

Nature du vœu Et en quoi consiste ce vœu ? C’est une promesse faite à Dieu d’un bien meilleur. C’est une promesse à ne pas confondre avec une simple bonne résolution. C’est une promesse délibérée, faite avec pleine liberté et connaissance de cause. Et elle doit être d’un bien meilleur, c’est-à-dire d’une chose qui soit plus parfaite que celle que nous sommes déjà obligés de faire pour être sauvés. Celui qui

1 De cette conférence, nous ne disposons pas du texte rédigé par le novice Chiarel.

Suivent seulement les notes manuscrites de Conforti. Cette conférence a été reprise et

complétée par Conforti dans un éditorial de Vita Nostra en 1921 (cf. PdP 32). 2 La numérotation se réfère à la manière « d’enchiridion » par laquelle le père Ferro a

rassemblé et ordonné les textes de Conforti dans Pagine confortiane. Notre traduction est

donc la version française de l’ouvrage suivant : Ermanno FERRO, Pagine confortiane, éd.

Centro Studi Confortiani Saveriani, Parma 1999, nn. 1616-1820, pp. 426-476. 3 cf. Is 9,5 : « Oui, un enfant nous est né, un fils nous a été donné ! Sur son épaule est le

signe du pouvoir ; son nom est proclamé : Conseiller-merveilleux, Dieu-Fort, Père-à-

jamais, Prince-de-la-Paix ».

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ferait vœu de se marier, il ferait un vœu nul parce qu’il n’est pas de bono meliori1. Les vœux sont simples ou solennels. Les vœux simples sont faits en privé et les solennels sont faits dans une Congrégation approuvée par l’Église et selon les solennités prescrites par les canons. Les vœux religieux annulent tous les vœux faits en précédence et incompatibles avec les vœux de religion. Celui qui aurait fait vœu de donner ceci ou cela en aumône… Celui qui aurait fait vœu de se rendre à tel ou tel autre sanctuaire, d’accomplir telle ou telle œuvre… Les Saintes Écritures montrent combien Dieu accueille de bon cœur les vœux. « Je ne vous appelle plus serviteurs (…) mais je vous ai appelés mes chers amis » (cf. Jn 15,15).

Le bienfondé des vœux L’Église a toujours recommandé les conseils évangéliques, de même qu’elle a toujours recommandé l’état de vie religieuse. Les vœux sont une excellente manière de se préserver contre l’inconstance et la fragilité de l’homme. En effet, rien n’est plus inconstant que la volonté humaine.

1 St Thomas d’Aquin, Somme Théologique, Partie II de la 2ème Partie, Question 88, sur

les vœux, Art. 2. Nous pouvons traduire l’expression « de bono meliori » en « ce qui est

le plus profitable ».

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2. PauvretéParme, ISME, 24 février 1921

INTRODUCTION 1618 La pauvreté est le premier pas dans la vie religieuse. Jésus Christ l’a dit : « Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres » (Mt 19,21). Il veut régner tout seul dans nos cœurs.

Le Seigneur exige un détachement de toute chose puisqu’il est le seul

Roi de notre cœur1.

L’histoire nous enseigne que Tibère voulait placer le Christ parmi les différents dieux. Même les païens le savaient, en effet, on dit que Tibère avait proposé

au Sénat de mettre le Dieu des Nazaréens parmi les autres dieux ; mais

il en eut le verdict négatif, en disant à l’Assemblée : « C’est un Dieu

superbe qui veut pour lui seul toute adoration et en le mettant parmi les

autres dieux cela deviendrait un affront pour eux ».

À vrai dire, la pauvreté n’est pas, en elle-même, une vertu ; mais elle s’appelle ainsi, car elle est une des meilleures dispositions pour acquérir la vertu.

1. LE VŒU SOLENNEL OU SIMPLE1619 En quoi consiste-t-elle ? Au sens strict, la pauvreté consiste en unrenoncement total à tout ce qu’on possède ou à ce qu’on peut posséder par lasuite. Ainsi l’ont entendue les fondateurs du monachisme, les fondateurs desgrands Ordres Religieux du Moyen-âge.

1620 Le vœu de pauvreté peut être solennel ou simple. Le vœu solennel est propre aux Ordres Religieux cités ci-haut et il permet de renoncer non seulement à l’administration des biens, mais aussi à la propriété des biens qu’on possède et à tout droit éventuel sur les biens qu’on peut posséder par la suite.

1621 Le vœu simple de pauvreté, par contre, est un acte par lequel on renonce à la faculté d’utiliser et d’administrer ses biens sans la permission des Supérieurs, en se réservant, à la racine, la faculté et la décision de s’en acquérir des nouveaux. C’est bien ce vœu-ci que vous allez faire.

1 Dans les paragraphes rentrants, nous indiquons ainsi le texte sténographié du novice

Alessandro Chiarel.

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2. LA TRANSGRESSION DU VŒU1622 Celui qui manque contre le vœu solennel de pauvreté, il pèche contre laReligion et contre la justice. En ayant renoncé à tout, il est dans la logique del’ordre et, donc, quand il dispose des biens, tout en étant à lui, il dispose de cequi ne lui appartient plus.

La transgression du vœu solennel entraîne des fautes contre la justice

ayant renoncé au droit de posséder et, alors, quand on abuse des biens

qu’on ne possède pas, on commet des fautes contre la religion ayant fait

une promesse solennelle à Dieu de ne pas manquer de fidélité.

1623 Celui qui n’a pas fait le vœu solennel, il pêche simplement contre la religion. En conséquence, toutefois, même du vœu simple de pauvreté, tout acte de propriété est nul, ayant renoncé à l’utilisation et à usufruit des biens. Il ne peut plus disposer des objets qui sont assignés en utilisation et il ne peut même pas les échanger avec ses confrères. Il ne peut pas détruire les objets qui ont été donnés pour l’utilisation ou confiés pour un but quelconque. Il ne peut ni accepter ni refuser des biens qui lui sont confiés par héritage, car cela équivaut à exercer le droit de propriété qu’il possède seulement en racine et il ne peut pas exercer sans la permission du Supérieur. De même il ne peut pas indiquer au Supérieur l’utilisation des biens auxquels il a renoncé. Lui seul peut disposer au bien de l’Institut.

La transgression du vœu simple peut entraîner le péché contre la

justice ou contre la religion. Contre la justice quand on abuse des biens

de l’Institut.

Même par des vœux simples, on ne peut pas mener une action sans la

permission des Supérieurs, et même pas disposer, à son gré, des choses

dont nous avons l’utilisation, comment les échanger, les donner en

location.

En vertu du vœu simple, on ne peut pas accepter des biens

patrimoniaux ou des donations ni prétendre qu’on utilise des fruits des

biens ou du profit des œuvres à son propre compte. Les religieux ne

peuvent rien dire ; le Supérieur peut librement en disposer.

1624 Comment se jugera la gravité majeure ou mineure du vœu de pauvreté ? En ce qui concerne les fautes contre la justice, on se réfère aux règles.

Il faut que vous soyez persuadés de la grandeur du vœu de pauvreté,

même simple ; au contraire, par-là, il y a un mérite majeur que dans le

vœu solennel parce que, tout en possédant, il fait un parfait sacrifice en

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ce qui concerne l’administration : tamquam non habentes (comme si on

ne possédait pas).

Cela comporte donc un détachement de tout, un abandon total entre

les mains des Supérieurs sans aucune préoccupation. Les théologiens

disent que pour considérer la gravité du péché contre le vœu de pauvreté,

il faut employer le même critère que lorsqu’on juge un péché contre la

justice, parce qu’on prétend utiliser des biens qui, selon justice, ont déjà

été laissés par vœu et, donc, en manquant à ce vœu, on commet un péché

grave.

3. DIFFÉRENTES MANIÈRES DE VIVRE LA PAUVRETÉ1625 Le vœu de pauvreté peut être vécu de manière plus ou moins parfaite.

a) Quelqu’un peut renoncer matériellement aux biens qu’il possède tout enrestant attaché affectivement dans le cœur et dans l’esprit.

Il y a ceux qui ont bien accepté de se détacher des biens de ce monde,

mais, avec le cœur, ils pensent au bien laissé et les regrettent. Ils n’ont

pas ainsi effectué le vœu qu’extérieurement ils ont prononcé : cela révèle

une vertu plus matérielle que formelle. Notre Seigneur a appelé heureux

les pauvres d’esprit ; la pauvreté effective ne suffit pas, il faut qu’elle

soit affective.

b) Quelqu’un peut renoncer au superflu et se contenter du nécessaire engardant toutefois l’attachement aux biens nécessaires.

Il ne faut pas non plus s’attacher aux biens qui sont nécessaires aux

contingences de la vie, tels que la chambre, l’habit, les meubles, les livres :

cet attachement serait une manière imparfaite de vivre la pauvreté.

c) Ceux qui se sont détachés non seulement du superflu, mais aussi dunécessaire, indifférents à cette tenue ou à cette autre, à cette chambre ouà cette autre, à cette nourriture ou à une autre. « Je considère tout commedes ordures, afin de gagner un seul avantage, le Christ » (Ph 3,8). Ceux-ciimitent vraiment Jésus Christ qui pouvait dire : « Les renards ont desterriers, les oiseaux du ciel ont des nids » (Mt 8,20).

Il faut se détacher à la fois de ce qui est superflue et de ce qui est

nécessaire, en devenant indifférents devant la nourriture ou à toute autre

chose qui ne nuise pas à la santé car, en ce moment-là. Il ne serait plus

nécessaire. Et c’est justement le degré parfait quand on se détache de

tout indifféremment. Voilà l’essence de l’esprit de la pauvreté

évangélique. Ainsi les Saints l’ont entendue.

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1626 Même Salomon perçoit la beauté de cet état quand il écrit : « Ne me donne ni pauvreté ni richesse, accorde-moi seulement ma part de pain » (Pr 30,8). Et l’Apôtre : « Si nous avons de quoi manger et nous habiller, sachons nous en contenter » (1Tim 6,8).

L’esprit de pauvreté consiste en cela : quand nous avons le nécessaire

pour nous habiller ou nous nourrir, nous nous en réjouissons.

4. RENONCEMENT DE DIFFÉRENTES SORTES DE BIENS1627 N’oubliez pas que le Christ a appelé heureux les pauvres en esprit. La pauvretédonc est quelque chose d’intime qui implique le renoncement de toute sorte debiens qui nous appartiennent. Il y a les biens du corps : la jeunesse, l’énergie, lasociété, les événements et ainsi de suite. Il y a les biens du cœur, tels que l’affection,les douceurs, les consolations. Il y a des biens moraux, tels que l’honneur, l’estime,la réputation. Nous devons apprécier ce que le Christ a apprécié. Il est le pauvre parexcellence. Les païens appelaient la pauvreté turpis egestas (honteuse indigence).

Le vœu de pauvreté n’est pas quelque chose d’externe, mais il

demande un parfait détachement de tous les biens : les biens corporels,

affectifs et moraux. Nous sommes donc indifférents face aux biens

corporels (la jeunesse et la force physique), aux biens affectifs (les désirs

du cœur, les plaisirs) et aux biens moraux (l’estime et l’honneur).

Nous sommes indifférents par rapport à une vie longue ou courte, ou

à tel ou tel sacrifice ; en ce qui concerne les biens affectifs, nous sommes

libres même vis-à-vis des affections les plus saintes, parce qu’à celles-

ci, pour être telles, nous sommes plus attachés. En ce qui concerne les

biens moraux, nous écartons toute aversion ou honneur, de telle sorte

que la pauvreté puisse être vraiment spirituelle. Nous aurons tout gagné

en paix et sérénité intérieure.

Vous pouvez faire le diagnostic de l’esprit humain et vous

découvrirez que tous les conflits et les tensions dépendent d’une

quelconque attaque. Il faut se soulever des exigences de cette nature

corrompue et vous expérimenterez la vérité de la phrase des Livres

Saints : « Grande est la paix de qui aime ta loi » (Ps 118,165).

Ayez une grande estime de la pauvreté volontaire.

Si vous la regardez avec les yeux de la chair, c’est une folie de fantaisies

inventées. Mais Notre Seigneur nous l’a présentée comme le vrai idéal

de la perfection chrétienne. Lui, en effet, avec l’exemple de toute sa vie,

l’a entourée d’une auréole et l’a faite devenir une source de mérites.

Il aurait pu venir au monde entouré des splendeurs d’une cour royale

somptueuse. Il a, par contre, voulu naître privé même de ce qui ne

manque pas aux enfants les plus pauvres. Pauvre à Nazareth, il vit de la

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charité des pauvres dans la vie publique, il meurt nu sur la croix, détaché

même physiquement de la terre. Pensez : sur la croix, détaché même du sol.

L’exemple du Christ 1628 Le Christ naît pauvre et vit pauvre dans l’atelier de Nazareth. Au temps de son apostolat, il vit de la charité de quelques fidèles. Il trouve ses délices en restant au milieu des pauvres. Le Prophète l’avait prédit : « Il m’a envoyé annoncer la bonne nouvelle aux pauvres » (Is 61,1).

5. LE DANGER DES RICHESSES1629 Nous aimons nous aussi la pauvreté évangélique. Le Christ a dit qu’« il estplus facile qu’un chameau passe par le trou d’une aiguille, qu’un riche de sesauver » (Mt 19,24). Et pourquoi ? Parce que les richesses constituent undanger continuel. Elles nous poussent continuellement à contenter toutes lespassions déréglées. L’exercice de la pauvreté évangélique est, au contraire, unencouragement à pratiquer sans cesse les vertus.

La richesse est un moyen pour faire le bien, mais par elle passent

beaucoup de tentations au péché. Pour contraposition, nous pouvons dire

que tandis que la richesse est une incitation au mal, la pauvreté est un

encouragement à la pratique de la vertu.

6. AVANTAGES DE LA PRATIQUE DES VŒUXa) Le vœu aide à avancer dans la vertu1630 Quand nous aurons délié notre cœur de tout amour envers les choses dela terre, Dieu en prendra possession, l’élargira par sa grâce et nous, d’un pasenthousiaste, nous avancerons résolument vers la voie de la vertu. Vous serezdes apôtres généreux si vous libérerez de tout fardeau : « ni bourse, ni sac, nisandales » (Lc 10,4), vous irez de l’avant sur le chemin des conquêtes pacifiquesde l’Évangile. Très souvent, l’homme prend des bonnes résolutions, il s’appliqueà la pratique de la vertu, mais, par la suite, n’étant obligé par aucun lien,facilement il néglige de faire ce qu’il s’était proposé. Le Religieux, par contre,étant retenu par ses liens, les vœux, il avance rapidement en dépassant avecardeur son énergie naturelle.

Le Crucifix : voilà la forme plus belle de la pauvreté évangélique. À

travers ce prisme de l’exemple divin, nous verrons toute la beauté du

vœu de la Pauvreté et nous serons encouragés à le mettre en pratique. Le

monde qui « n’accueille pas ce qui vient de l’Esprit » (1Co 2,14) dit que

c’est de la folie, parce qu’il n’est pas capable d’en saisir toute la beauté.

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Notre Seigneur dit un jour aux Apôtres qui avaient tout sacrifié :

« Vous recevrez le centuple » (cf. Mc 10,30). À raison, ces paroles ont

traversé les siècles et sont parvenues jusqu’à nous aujourd’hui.

Si vraiment vous vous préparez avec cet esprit de pauvreté et vous

considérez tous les biens terrestres « comme des ordures » (Ph 3,8), vous ne

sentirez pas le tourbillon du corps et vous pourrez viser avec joie au bien

des âmes, « ni bourse, ni sac, ni sandales » (Lc 10,4), comme les Apôtres.

Vous ne vous soucierez que de la gloire de Dieu et de rien d’autre.

b) Le vœu perfectionne la liberté1631 Les vœux perfectionnent la liberté. Par ailleurs, en quoi consiste la liberté ?C’est choisir ce qui convient davantage entre deux choses bonnes ou mêmeindifférentes. Or, les vœux sont de bono meliori (ce qu’il y a de plus profitable).

c) Le vœu augmente le mérite1632 Finalement, les vœux augmentent et redoublent le mérite de nos actes.Le vœu est un acte de religion qui rehausse la valeur de nos œuvres. Cesdernières assument le mérite présent dans les différentes vertus, ainsi que lemérite de l’Institut.

7. CONDITIONS POUR LA PROFESSION RELIGIEUSE1633 Avoir reçu le Baptême. Il est très recommandé d’avoir reçu le Sacrementde la Confirmation. Avoir fait au moins une année de noviciat. On doit avoirl’âge requis par le droit canonique. La personne qui fait la profession religieusedoit être libre de toute contrainte. La profession doit être dûment reçue par lapersonne autorisée à la recevoir, étant elle comme une sorte de contrat entrele candidat et l’Institut dans lequel il veut faire la profession. Il convient qu’ilsoit dépourvu de certains défauts moraux et physiques. Il faut qu’il n’ait pas desdettes, ou qu’il ne doive pas donner raison de l’argent d’autrui. On demandeensuite l’état de grâce. Il doit être pénétré par un profond sentiment d’humilité,de reconnaissance et surtout il doit avoir la ferme volonté de vouloir servir Dieu,se souvenant des paroles évangéliques.

Considérez à la lumière de la foi, ces vérités que je suis venu vous

exposer d’un langage simple. Priez le Seigneur pour comprendre et

pratiquer la Sainte Pauvreté.

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3. Pauvreté (suite)Parme, ISME, 3 mars 19211

1634 Dans la dernière instruction, nous avons abordé le concept du vœu de pauvreté, quelle est son extension, quels sont les degrés et comment on peut manquer à ce vœu. Maintenant nous verrons comment l’on vit ce vœu.

Et pour mieux nous conformer dans notre langage, nous lirons le

Règlement qui devra devenir votre règle de vie. Nous avons pris soin de

bien le formuler, nous l’avons étudié à partir de l’expérience d’autres

Instituts, de sorte qu’en ce Règlement vous puissiez vous former à

l’esprit de l’Évangile.

1. DÉPOUILLEMENT1635 Nous lisons l’article 55 du Règlement : « Le Missionnaire doit considérerles choses qui lui servent au logement, à l’habillement et aux autres effets de lavie, non pas comme siennes, mais de l’Institut dont il est membre ou de laMission à laquelle il appartient ». Il doit donc renoncer au superflu, à ce qui estinutile ».

Qu’on se tienne au nécessaire en ce qui concerne la satisfaction des

exigences de la vie ; mais il faut considérer même les choses nécessaires

non pas comme des biens propres mais de l’Institut. Vous devez vous

dépouiller non seulement de ce qui est superflu, mais même des choses

que vous possédez, petites soient-elles.

1636 Ste Thérèse reprochait les religieuses qui se chargeaient de médailles, de croix, d’images. Elle leur demandait la pauvreté dans l’habillement, dans la nourriture. Le Supérieur doit pourvoir au nécessaire pour que tous servent le Seigneur sine querela (sans se plaindre).

Les médailles et croisettes sont des choses en soi bonnes, mais en ce

léger attachement, Ste Thérèse y voyait une imperfection.

Pour se former à l’esprit de pauvreté on doit donc se détacher de tout.

Celui qui peut vivre avec une seule chaise, avec une seule table, avec

une seule couverture, qu’il n’en cherche pas d’autres choses.

1 Le père Franco Teodori sx publie cette conférence en donnant le titre suivant : « La

pratique du vœu de pauvreté » (cf. FCT 20, p. 27).

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Lisons un autre point du Règlement : « Même concernant les habits :

nous ne pouvons que les utiliser. Le religieux sera indifférent donc de

porter un habit nouveau ou usagé, beau ou moins beau ».

Dans le Règlement, je n’ai prescrit aucune forme précise parce que

les exigences peuvent demander que dans un endroit on porte un habit,

et, ailleurs, un autre. L’Église même pourra proposer des changements

(mais il sera difficile). De toute manière, l’habit traditionnel sera la

soutane, la ceinture, le manteau et, quand vous irez en mission, le

Crucifix que l’évêque lui-même vous remettra. Tous, dans

l’habillement, doivent utiliser la même étoffe. Il n’est pas prudent de

recevoir des habits d’autres personnes en dehors de l’Institut. Tout en

n’y voyant aucun mal, nous pensons que cela n’est pas conforme à la

pauvreté. On recevra de l’Institut de la même manière qu’un pauvre

reçoit un habit d’un riche.

En ordre à la vie ordinaire, le Supérieur doit avoir de la sollicitude

pour que les membres aient tout le nécessaire pour pouvoir se dédier

librement au divin service sine querela. St Benoît insistait beaucoup sur

cela. Les Religieux, d’autre part, ne doivent pas être exigeants, mais ils

s’adapteront à la nourriture commune, et si cela ne conviendrait pas, on

en préviendra le Supérieur ; sinon, on s’y adaptera. Le goût ne doit pas

être ce qui règle notre nourriture ; toutefois les vivres devront être

suffisants puisqu’on ne vit pas pour manger, mais on mange pour vivre.

Nous-mêmes, nous constatons que lorsque, dans quelques Instituts et

Congrégations, on perd l’esprit de pauvreté et on s’abandonne aux soucis

des richesses, on va en dégénérant de mal en pire, jusqu’à se dissoudre.

C’est pour cela que Notre Seigneur disait : « Malheur à vous les riches »

(Lc 6,24). Il est donc plus facile qu’un chameau passe par le trou d’une

aiguille… (cf. Mt 19,24).

En chaque petite chose, vous devez dépendre du Supérieur, et quand

vous serez en Mission vous ne devez pas oublier d’avoir fait le vœu de

pauvreté. Vous vivrez comme un pauvre qui sait de pouvoir disposer de

peu de chose et ne prétend rien qu’il ne soit nécessaire.

On lit une autre règle.

Art. 57. « Quant au vêtement, au lit et à la chambre, outre à ce qui peut

être nécessaire à l’instant, chaque membre ne gardera rien d’autre pour

soi-même. Mais tout le reste sera mis dans le garde-robe commun ».

Vous mettrez tout ce dont vous n’avez pas besoin dans la garde-robe

commune, même pour éviter que cela s’abîme. De même que vous aurez

soin d’un livre que vous avez emprunté, de même vous devez, par esprit

de pauvreté et de justice, garder tout ce que vous recevrez en héritage de

l’Institut.

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Et, après avoir utilisé quelque chose reçue de l’Institut, vous devez la

remettre au Supérieur. Cela pourrait vous paraître bizarre quand vous

considérez qu’ainsi c’est le vrai esprit de pauvreté. Cela est, par ailleurs,

commun à toutes les Congrégations. Même les Salésiens, qui ont une

règle plutôt souple dans ce domaine, doivent rendre compte de tout. Un

religieux me disait que même pour un peu de tabac et pour dix centimes

d’aumône, il demandait au Supérieur et jamais il n’avait en poche plus

de vingt ou trente centimes permis pour l’aumône.

Mais, direz-vous, quel sacrifice ? Certainement, c’est un sacrifice

dans lequel nous offrons au Seigneur tout ce que nous possédons au

Seigneur. On ne peut pas faire de sacrifice sans douleur. Mais le Seigneur

vous récompensera ad usura (abondamment). Celui qui donnera quelque

chose au Seigneur, même dans ce monde, il aura le centuple.

2. UNE PAUVRETÉ HUMBLE, SIMPLE ET CONFIANTE1637 Notre pauvreté doit être humble. Nous devons reconnaître notre besoindevant Dieu et devant les frères.

Nous devons être convaincus de notre pauvreté devant Dieu, nous

nous reconnaissons pauvres, aveugles et nus. Tout ce que nous avons est

don de Dieu et ce qui est nôtre n’est que le péché. Nous devons posséder

ce sentiment et nous convaincre que nous sommes débiteurs à Dieu du

sol que nous piétinons, de chaque jour qui passe, de chaque moment, de

chaque instant. Nous n’avons pas, en nous-mêmes, notre raison d’être.

Nous devons être persuadés de notre pauvreté devant les hommes.

Voyez, par exemple, un roi : plus on est en haut, plus on a besoin les uns

des autres. Le roi a besoin de magistrats, de serviteurs, du paysan, de

l’agriculteur etc. Nous avons besoin l’un de l’autre. Par le vœu de

pauvreté, nous venons à sacrifier très peu de chose : nous ne donnons à

Dieu ce que lui-même nous a offert.

1638 La pauvreté doit être simple, sans mise en scène ou étalage. St Augustin avait l’habitude de dire : « Habillez-vous proprement

pour vous protéger contre l’arrogance » ; et il racontait le fait de Diogène

qui, invité au repas chez Platon, une fois entré dans le triclinium, il

secouait tranquillement les pieds pleins de boue sur le tapis très

somptueux, en disant : « je piétine le faste de Platon. Il y avait plus

d’arrogance, disait Augustin, dans le mépris de Diogène que dans

l’ornement somptueux de Platon ».

Dans vos habillements, il n’y aura rien de sale qui puisse offenser

celui qui vous approche. Pensez à Notre Seigneur : il devait être très

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propre, lui, la propreté en personne. St François a su pratiquer la pauvreté

mieux que tant d’autres personnes. Il aimait la propreté. Un jour, il

reprocha un de ses confrères car il était sale. De même St Ignace : dans

ses règles, il établit un temps spécial pour la toilette. Si vous observez

les Jésuites, vous serez admirés par leur propreté et le sens de l’ordre qui

les distingue, j’allais dire, des autres ecclésiastiques.

Elle est confiante : Quid defuit vobis ? (« Qu’est-ce qui vous manque ? ») S’il est vrai que tout être humain peut et doit confier dans l’aide de

Dieu, de manière spéciale celui qui, par amour de Dieu, a tout quitté. Il

serait un grand outrage que de désespérer dans l’aide de Dieu. Le

Seigneur n’a-t-il pas dit aux disciples qui avaient tout quitté pour le

Christ : Quid defuit vobis ? (« Qu’est-ce qui vous manque ? »). Il ne

vous donnera pas le superflue : au contraire, si vous le preniez, vous

donneriez un mauvais témoignage.

Quand Ste Chantal1 fonda son œuvre, elle n’avait qu’un peu de vin,

la quantité suffisante pour un mois. Elle ne se découragea pas : le

tonneau continua à verser du vin toute une année durant.

Et Cottolengo2 ? Il n’avait en caisse qu’une pièce de vingt lires. Il

n’hésita à la jeter par la fenêtre, en croyant de faire outrage à la

Providence en donnant toute sa confiance en ce peu d’argent. Voilà : la

Providence pourvoit toujours à celui qui a confiance en elle. Les Saints

ont toujours eu confiance en Dieu. Si notre foi ne diminuait pas, le

Seigneur ferait des miracles et votre pauvreté confiante se convertira en

source de richesse.

À celui qui confie en la Providence, le Seigneur donne même en cette

vie, le centuple de ce qu’il a laissé pour lui. Je vous cite un exemple : le

cardinal Ferrari dans la période de son ministère à Milan, a pu construire

102 églises, quelques-unes même riches et grandioses, comme l’église

de la Ste Croix, au centre-ville. Il est mort pauvre et sans dette. Tout

compte fait, l’actif égalisait toujours le passif. Où prenait-il l’argent ? En

parlant du point de vue humain, ce serait de la folie, surtout en des temps

1 Ste Jeanne de Chantal (1572-1641), est une dame française, fondatrice de l'ordre de la

Visitation avec saint François de Sales. Conforti la cite souvent, chez ses novices, comme

modèle de détermination devant l’appel et la mission de Dieu : elle sut quitter sa famille

et son fils pour se donner à la prière et à l’apostolat dans la vie consacrée. 2 Joseph Benoît Cottolengo (1786-1842), prêtre italien, fonda à Turin « La Piccola Casa

della Divina Provvidenza » pour l’accueil et l’éducation des enfants et adolescents

handicapés atteints de déficience intellectuelle. Il fonda également divers Instituts

religieux pour poursuivre cette œuvre charitable.

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comme les nôtres de grande corruption et de peu de foi, où on pense à

tout sauf à la religion. Nous qui avons la foi, nous pouvons tout

expliquer. Ayez confiance et même quand vous serez en mission, la

Providence ne vous manquera pas.

Vous aurez besoin d’un orphelinat, d’une église, d’une résidence, et

vous serez sans un sou dans la poche : votre confiance sera votre trésor.

La divine Providence ne vous manquera pas.

3. SE CONFORMER AU CHRIST1639 Jésus est le modèle de pauvreté dans sa vie publique et dans sa vie privée.

1640 À Bethléem, il naît dans une étable ; en Égypte, il vit de la charité ; à Nazareth, il travaille à la sueur de son front ; dans la vie publique, il est soutenu par les offrandes des personnes fidèles.

Conformez-vous au Christ qu’il agit ainsi. C’est la caractéristique de

Dieu que de tout faire à partir de rien. Au contraire, les hommes ont

besoin de beaucoup de moyens pour réaliser si peu de choses.

Notre Seigneur ne voulut pas naître dans sa maison à Nazareth. Il

vécut par la charité des pasteurs, puis de celle des Égyptiens. À Nazareth

il gagna le pain à la sueur de son front, dans son ministère il était aidé

par les offrandes des fidèles qui étaient gardées par un économe (oh, quel

mauvais exemple d’économe !) qui maintenait toute la communauté.

Quand il ne dormait pas à la belle étoile, il se reposait chez ses disciples,

dans la maison de Pierre qui n’avait probablement pas un château, mais

une pauvre maisonnette qui sentait le poisson. Voilà comment sera votre

vie. Certes, vous n’aurez pas à souffrir les mêmes peines que le Seigneur

lui-même a souffert.

1641 Le centuple est réservé aux âmes qui suivent la pauvreté de l’Évangile. L’Esprit Saint a dit que les filles de Job furent considérées comme les plus belles aux yeux des hommes1.

1642 C’est ce qui se passe dans nos âmes : elles trouvent grâce aux yeux de Dieu.

1 « On ne trouvait pas dans tout le pays de femmes aussi belles que les filles de Job »

(Job 42,15).

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Conforti Mgr Guido Maria

Promoteur du 1er noviciat régulier

et propulseur des lignes maîtresses

de la consécration religieuse et missionnaire

par une présence régulière et paternelle

auprès de ses jeunes en formation

Né le 30.03.1865 à Casalora de Ravadese (Parme), entré au Petit Séminaire de Parme en novembre 1876, ordonné prêtre le 22.09.1888, il fonde l’Institut des Missionnaires Xavériens le 03.12.1895. Ordonné évêque de Ravenne le 11.06.1902, le même jour, il fait la profession perpétuelle. Il devient évêque de Parme le 25.03.1908, diocèse qu’il dessert jusqu’à sa mort, survenue à Parme le 05.11.1931. Il a été canonisé par le pape Benoît XVI le 23.10.2011.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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4. ChastetéParme, ISME, 10 mars 1921

INTRODUCTION Aujourd’hui, je vous parlerai de la vertu et du vœu de chasteté. Je ne

m’attarderai pas beaucoup, parce que vous avez eu plusieurs instructions

sur ce sujet et moi-même, je vous en ai déjà parlé. Je vous rappellerai ici

les choses principales qui concernent cette vertu si délicate et belle.

1. UNE PROMESSE DE PURETÉ1643 Le vœu de chasteté est une promesse faite à Dieu par laquelle la personneconsacre à Dieu l’intégralité de son corps, de son esprit et de son cœur. Elles’oblige donc à éviter toute chose qui puisse brouiller l’intégrité du corps, ainsique la pureté de l’esprit et du cœur.

La vertu de la pureté est une promesse faite à Dieu de conserver

l’intégrité du corps, de l’esprit et du cœur ; la pureté du corps, toutefois,

ne suffit pas. Mais il nous est particulièrement nécessaire la pureté de

l’esprit et du cœur : les yeux doivent se garder purs, en ne regardant pas

ce qui peut brouiller la belle vertu ; les oreilles écoutent ce qui peut éveiller

des mauvaises imaginations, les mains, la bouche, tout notre corps.

1644 Tout doit être chaste : l’esprit avec les pensées, le cœur avec les affections, les yeux avec les regards, les oreilles avec l’ouïe, la langue avec les paroles, les mains avec les œuvres. L’existence est une lutte continuelle contre les assauts de la nature corrompue.

2. LA TRANSGRESSION DU VŒU ET LA PURETÉ1645 La transgression de la chasteté contient deux causes : une, contraire à lavertu et l’autre contre la religion. Cette dernière assume la gravité d’unsacrilège.

Notre pureté doit ressembler à celle des anges et vivre en cette terre

comme si nous n’étions pas de la terre, vivre en ce corps comme si nous

n’étions pas dans le corps.

Les fils de ce monde disent que la pureté est contraire à la nature

humaine. Non : elle est bien supérieure et elle a besoin d’attentions

continuelles, mais elle peut bien obtenir avec la grâce divine.

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C’est la grâce divine qui rend toute-puissante notre faiblesse. Les fils

de ce monde ne savent pas concevoir cela et ne croient pas qu’il soit

possible à une nature humaine de résister aux passions. Mais nous

connaissons ce qu’est la foi et nous savons qu’elle est bien possible avec

la grâce de Dieu. Il est sûr que sans elle, rien nous ne pouvons obtenir.

Salomon l’avait bien expérimenté quand il disait : « Je me suis adressé au

Seigneur et Lui m’a libéré du mal et il m’a exaucé » (Ps 117,5). S’il avait

continué à invoquer le Seigneur, certainement il n’aurait pas été vaincu

par ses passions.

Il est difficile de garder la chasteté par nos seules forces, mais il n’est

pas si difficile avec la grâce de Dieu et avec la pratique des moyens de

sanctification, surtout de la Sainte Eucharistie, le Pain qui rend fécond les

vierges. Que Dieu puisse le réaliser, nous le savons non seulement par la

foi mais aussi par l’expérience quotidienne.

3. L’EXCELLENCE DE LA VERTU DE CHASTETÉ1646 La chasteté est un sacrifice agréable à Dieu. « Nul ne peut évaluer le poidsd’une âme chaste » (Sir 26,20 vulgate)1. Le Christ est né d’une Vierge. Josephest l’époux très chaste. St Jean est le Disciple bien-aimé. « J’ai vu une fouleimmense » (Ap 7,9). La chasteté nous rend semblable aux Anges, elle nous égaleaux Anges et même elle nous rend supérieurs aux Anges. St Thomas affirme quecelui qui vit la continence est l’homme le plus parfait.

L’excellence de la vertu de la chasteté nous est plusieurs fois

manifestée par les Saintes Écritures et de manière spéciale par Notre

Seigneur qui se préoccupait à la pensée que : « Tous ne comprennent pas

cette parole » (Mt 19,11) et par sa vie, il l’a montré assez clairement

combien il aimait la belle vertu.

Il est né d’une Vierge, en réalisant ainsi un grand prodige. Il a voulu

comme père nourricier un homme très chaste. Parmi les apôtres, il en a un

qu’il a choisi comme bien-aimé, et à qui il permet de poser la tête sur son

Cœur divin : l’apôtre vierge. Il lui révèle les événements plus merveilleux

et, enfin, il lui confie ce qu’il avait de plus cher, la Très Sainte Mère. Tout

au long de sa vie, il n’a permis à aucun de ses ennemis qu’on mette en

doute la pureté de Jésus. Il a pris la défense de l’adultère et de Marie

Madeleine, dans ses prédications il a eu une suite de femmes ; à cause de

1 Texte original cité par Conforti : « Omnis ponderatio non est digna anima continentis »

(Sir 26,20). Conforti a probablement sous les yeux le traité de St Thomas sur les Conseils

évangéliques ou, du moins, un auteur qui y fait référence. St Thomas cite Sir 26,20 à

propos du vœu de chasteté en employant la traduction de la Vulgate (cf. Thomas de

Aquino, Summa Theologiae, IIª-IIae q. 155-169).

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cela, dans leur méchanceté, ses ennemis auraient pu trouver des raisons

d’accusation, mais il ne permit pas que même pas une ombre puisse salir

sa pureté. Devant Erode, Jésus ne donne pas de réponse : c’était un

reproche éloquent au roi impudique. Il est vrai que l’homme impudique

« n’accueille pas ce qui vient de l’Esprit » (1Co 2,14). Il ne connaît qu’un

verbe : murmurer.

L’Apôtre Bien-Aimé, dans la sublime vision de l’Apocalypse, contempla

une armée spéciale qui entoure l’Agneau avec un cantique qui elle seule peut

chanter. Qui sont les membres de cette armée ? Ce sont les vierges (cf. Ap

14,4), ceux qui ont purifié leurs robes dans le Sang de l’Agneau.

Même par les yeux de la nature, nous sommes admirés devant une âme

pure. Même le paganisme a un culte de vénération pour la pureté. Quand

le consul entrait triomphant dans la ville, une vestale se présentait pour lui

rendre hommage. Malgré leurs mauvaises passions, ils comprenaient la

grande excellence de la virginité.

St Thomas n’hésite pas à dire que l’homme pur est le plus parfait.

L’homme, dit-il, s’élève au-dessus des animaux par la raison. Sera plus

parfait l’homme qui vivra selon les indications de la raison et de l’esprit,

en oubliant la partie inférieure. En ce qui concerne la pureté, il est

comparable aux Anges. Il leur est même supérieur quand il parvient à

l’état que les Anges ont par nature, grâce au combat spirituel : il sera alors

libéré du corps, pur et semblable à Dieu, très pur esprit.

4. LE PÉCHÉ CONTRE LA CHASTETÉNe rien négliger1647 La gravité de la faute contre la chasteté. On n’y attribue pas de petitessede matière. Il peut y avoir de petitesse de matière dans le vol, dans lamédisance, dans l’aversion au prochain. L’action extérieure n’est pasnécessaire : il suffit d’une pensée, d’une affection, d’un divertissement.

1648 Il faut tenir compte de tout et jamais comme à ce propos on ne peut répéter les paroles de l’Esprit Saint : « Celui qui craint Dieu ne néglige rien » (Qo 7,18).

La vertu de la pureté est précieuse et délicate. Elle est aussi difficile.

Quant à la pureté, il n’y a pas de matière légère. Toute pensée mauvaise à

laquelle on consent, tout acte, petit ou bref, bien délibéré, est péché mortel.

Encore plus chez le Religieux : il est lié par vœu de chasteté et il court

un double péché. Il pèche contre la vertu de la pureté et contre le vœu de

religion. Pour cela, il commet un sacrilège parce qu’il profane ce que, par

vœu, il a déjà consacré essentiellement au Seigneur. Pour un religieux, un

tel péché assume toute la malice et la gravité du sacrilège.

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L’aveu des fautes 1649 De manière particulière, prenons soins d’avouer nos fautes au Confesseur à qui il convient de manifester même nos tentations.

C’est notre grand profit que de manifester au confesseur toutes les

tentations. Au cas où vous tomberiez dans le péché, vous aurez moins de

honte quand vous irez vous confesser. Dans son livre « Mes prisons »,

Silvio Pellico écrivait qu’il n’est pas vrai qu’il suffit de savoir qu’une

chose est bonne pour être poussés à la faire, mais il est beaucoup plus utile

qu’une autre personne nous le dise, parce qu’il y a quelque chose dans la

voix, un encouragement qui ne se trouve pas dans la parole écrite. Oh !

qu’il est profitable qu’on nous dise cette parole-là ! Vous en ferez

l’expérience quand vous irez vous confesser : les choses que vous

ressentez sont toujours les mêmes, mais pour elles vous sentirez une

particulière invitation à progresser dans le bien.

Face à la tentation : Ne pas se décourager et ne pas consentir 1650 Cependant, il ne faut pas s’alarmer de manière exagérée et croire d’être tombé. St Augustin, en parlant de sa vie, disait que peu après sa conversion, il était troublé jour et nuit. Les troubles peuvent venir du tempérament, ainsi que du Démon.

Cela ne doit point vous effrayer. Nous serons toujours tentés. Si nous

nous étonnons de ces tentations, nous tomberons dans l’orgueil ou

l’ignorance du cœur humain. Cette passion n’est qu’une conséquence

naturelle du péché, parce que le corps, corrompu, est un poids pour l’âme.

Quelques Saints ont été épargnés des concupiscences de la terre, comme par

exemple St Louis. Mais ce sont des exceptions que le Seigneur peut faire pour

qui il veut, très souvent comme mérite de la fidélité de ses serviteurs.

Par ailleurs, les plus grands Saints furent durement éprouvés. St Paul

lui-même, après être monté au troisième ciel, angoissé, implorait l’aide du

Seigneur pour qu’il soit délivré de la mauvaise passion : il sentait très fort

le poids de la nature corrompue.

Quand je pense à ces grands Saints, je ne m’étonne pas que cela puisse

m’arriver et que tous expérimentent la violence des passions. Nous devons

toutefois nous convaincre que nous portons avec nous le plus terrible des

ennemis : la nature corrompue. Nous devons être bien éveillés pour qu’elle

ne parvienne pas à nous vaincre et à faire de nous ses victimes.

Mais ne confondons pas le fait de sentir en nous la violence de la

passion avec le consentement : la tentation peut durer en nous une heure,

voire deux heures, le jour, la nuit. Ne soyons pas troublés parce que

jusqu’à quand il n’y a pas de consentement, il ne peut pas y avoir de péché.

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5. COMMENT VIVRE LE VŒUTout ce dont nous avons parlé vaut pour chaque fidèle, mais pour un

Religieux il doit y avoir quelque chose en plus. Il faut qu’il exerce la

chasteté avec perfection. Le Religieux non seulement doit prendre garde

de tout ce qui peut amoindrir la belle vertu, mais il doit veiller

spécialement sur son cœur, parce que celui qui sait gouverner le cœur et

les affections, il peut atteindre au sommet de la sainteté.

S’humilier et se recommander à Dieu 1651 Il faut s’humilier et se recommander à Dieu. Les religieux prendront la résolution de vivre avec perfection cette vertu. Rien n’est plus précieux et délicat, rien n’est plus fragile que la chasteté.

S’abstenir de toute amitié sensible Le cœur est le plus grand des ennemis. Les amitiés sensibles sont une chose qui se présente naturellement : de même que lorsque nous nous approchons de ce qui est chaud nous ressentons de la chaleur, de même quand nous nous approchons de ce qui est congelé nous ressentons du froid ; de même, etc.

À partir de l’amour que quelqu’un manifeste, on peut savoir qui il est :

aime-t-il la terre ? Il est terre. Aime-t-il Dieu ? il est Dieu. Il faut donc

s’efforcer à garder jalousement son cœur parce qu’il est facile de le trahir.

Prenez garde de toute affection sensible. En elle-même, elle n’est pas un

péché. Mais elle est une condition assez dangereuse à laquelle vous vous

exposez. Le passage du sensible au sensuel est très court. Sentir de la

sympathie ou de l’antipathie, c’est la chose la plus naturelle, comme sentir

de la chaleur près du feu ou du froid sur le verglas. Quand nous nous

rencontrons avec une personne très douée, d’un caractère semblable au

nôtre, nous sentons envers elle un sentiment spécial de sympathie qui nous

pousse à l’aimer. En soi, cet amour peut être bon, mais il faut être très

attentifs. Cherchez plutôt à voir en tous vos proches le reflet de Dieu, et

alors, votre amour sera tout surnaturel. Au contraire, si vous vous arrêtez

aux qualités matérielles, il est facile de dégénérer. Oh ! Que vos affections

soient toutes guidées par des raisons surnaturelles. Malheur à nous si nous

nous trompions dans l’affection !

S’abstenir de trop de familiarité et de gestes impurs Nous lisons dans la biographie d’un saint qu’en se reconnaissant impur et en devant être changé d’habit, il répondit : « Ne le faites pas, car je suis faible ».

Les moralistes sont tous d’accord en disant que celui qui fuit ce genre

de passions, en sortira victorieux.

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Un jour, un moine alla demander conseil à son confesseur sur la

manière d’affronter de telles tentations. Il eut cette réponse : fuge cito,

longe, semper (« fuis tout de suite, pars au loin, fuis toujours). Il faut fuir

immédiatement, parce que le fait de s’arrêter même un seul instant,

devient dangereux pour notre forte inclination. Nous sommes sur une voie

glissante (« sdrucciolevole »), dans laquelle on tombe facilement. Étudiez,

chantez, lisez, faites n’importe quoi pourvu de dévier de votre esprit

l’enchantement de la passion. En vous arrêtant un instant, vous serez vite

troublés et votre raison sera entourée d’une fumée qui la rend incertaine et

découragée. Brisez cette chaîne. Elle vous traînerait dans la boue. Fuyez

toujours, sans exception. Age contra (« agis contre, fais exactement le

contraire »), disaient les anciens. Faire des concessions en donnant

seulement le « a », signifierait aller jusqu’au « z ».

Se maîtriser Veiller à la bonne maîtrise de la parole, des lectures et de la manière de vous habiller.

Les lectures constituent un autre facteur de risque. Il y a des livres qui

ne sont pas interdits, mais qui, à quelqu’un, pourraient faire du mal, tandis

qu’ils ne feraient rien à quelqu’un d’autre qui, d’ailleurs, pourrait

beaucoup les aimer. Dans ce monde, tout est relatif : ce qui semble

convenable à l’un, constitue un danger pour l’autre, selon les différents

tempéraments, extravertis ou mélancoliques. Veillons donc à nos

lectures ! Pour lire un livre, il ne suffit pas de dire : c’est un livre bon et

saint ! Quand vous lisez un livre et que vous remarquez, par le bon

discernement, qu’il y a quelque chose qui peut vous faire du mal, laissez-le.

Les sens sont nos ennemis capitaux : ils sont la porte par laquelle

entrent les mauvaises imaginations et la source de tous les péchés.

Recommandez-vous tous les jours au Seigneur pour qu’il vous accorde la

force, l’énergie pour vaincre la nature corrompue.

Fuir la paresse et être toujours à l’œuvre De toutes vos forces, fuyez la paresse : soyez toujours à l’œuvre.

Depuis le temps de votre noviciat, soyez disponibles à prendre l’habit de

l’activité permanente, de sorte que l’ennemi vous trouve toujours occupés.

C’est toujours dans la paresse que la passion se fait sentir plus vive et

surgit et devient rebelle. Qu’il n’y ait pas un seul instant où vous n’est pas

occupés. « La paresse enseigne bien de vices » (Sir 33,29), dit l’Esprit

Saint. Quand entre dans l’âme cette mauvaise passion, peu à peu entrent

avec elle tous les vices. Elle n’entre jamais toute seule. On dit que la

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paraisse est la mère de tous les vices. C’est vrai parce que l’oisiveté est

celle qui dispose au vice impur qui entraîne tous les autres.

Conclusion : comprendre, se préparer et observer Depuis le temps de votre noviciat, préparez-vous, donc, à la profession

religieuse et au vœu de chasteté, en récitant avec foi la prière que la sainte

liturgie met sur vos lèvres : mites fac et castos (« rends nos cœurs humbles

et purs)1.

Comprenez toute la beauté et la valeur de cette vertu. Le Seigneur dit :

« Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu » (Mt 5,8). Le Seigneur

habite dans les âmes pures, et le vice contraire l’éloigne d’elles pour la

logique des contraires. Le joug du Seigneur est très doux et léger.

Si les défections sont nombreuses parmi les ministres de Dieu, c’est

justement parce qu’ils ont cédé à la passion et se sont précipités de ruine

en ruine. Mais vous, fournissez des efforts pour devenir purs et dignes de

plaire à Dieu.

Par cette vertu, vous obtiendrez toute grâce divine, même la plus

merveilleuse. Vous gagnerez, pour ainsi dire, le cœur de Dieu. Il suffit que

vous sachiez y correspondre à travers l’observance régulière du vœu que

vous avez fait.

1 « Mites fac et castos » c’est un vers de l’hymne mariale « Ave Maris Stella » (Salut,

étoile de la mer). La phrase dit : « Virgo singularis, inter mones mitis, nos culpis solutos,

mites fac et castos » : « O Vierge sans pareille, Vierge douce entre toutes, obtiens le

pardon de nos fautes, rends nos cœurs humbles et purs ».

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Bonardi P. Giovanni

Premier maître des novices, recteur de la Maison-mère,

apprécié pour la clarté de ses idées,

pour la cohérence de ses principes, pour son esprit dynamique,

l’équilibre de ses prises de position et de son comportement

vis-à-vis des personnes et des événements.

Né le 11.02.1881 à Boston (Massachussetts), entré à Parme le 18.07.1898,

ordonné prêtre le 14.06.1903, envoyé en Chine le 18.01.1904, il fut appelé en

Italie, en 1911, pour le service d’éducateur des jeunes en formation à Parme.

Jusqu’en 1931, il sera le bras droit de Conforti dans la direction et l’animation

de l’Institut, Vicaire du Supérieur Général (1932-1937) et Procureur auprès du

Saint Siège (1935-1965). Il meurt à Parme le 01.05.1974.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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5. ObéissanceParme, ISME, 17 mars 1921

Introduction : l’abrégé de la vie religieuse La dernière fois, nous avons vu quelque chose sur l’excellence de la

vertu de la chasteté. Parmi les raisons qui suscitent beaucoup d’estime

envers le Missionnaire, il y a la manière différente dont il vit, par rapport

aux autres et, non seulement il se distingue de ceux qui ne connaissent pas

Jésus, mais il se différentie des autres annonciateurs de l’Évangile qui

prétendent avec arrogance exercer une mission qu’ils n’ont pas reçue.

Aujourd’hui nous aborderons la vertu et le vœu de l’obéissance.

Nous pouvons considérer l’obéissance comme l’abrégé de toute la vie

religieuse, si bien que certaines Religions et Congrégations ne proposent

que ce vœu d’obéissance, convaincus que la parfaite obéissance aux règles

et aux autorités instituées, permet aux membres de pratiquer toutes les

vertus.

1. UNE PROMESSE SANS RÉSERVE1652 L’obéissance est une promesse que nous faisons à Dieu et par laquellenous nous obligeons à obéir à une personne en tout ce qu’elle commande enconformité aux règlements et aux constitutions d’un Institut.

1653 Cette promesse n’a pas de réserve en ordre à l’extension de l’obéissance. Elle n’a pas de réserve en ordre à la durée, parce qu’elle dure pour toute la vie. C’est une promesse entièrement libre et volontaire. Elle est faite après une année de noviciat.

2. LE SACRIFICE DE NOTRE VOLONTÉ1654 Par ce vœu nous faisons le sacrifice à Dieu de notre volonté ; par lachasteté de notre corps ; par la pauvreté de nos biens matériels.

L’obéissance est un vœu par lequel nous consacrons à Dieu notre

volonté en nous soumettant à un Supérieur qui nous gouverne sur la base

de règlements et des constitutions préétablies qu’il ne pourra pas changer.

L’obéissance ne permet pas de limites ni selon la manière, ni selon le

temps puisque, après les vœux perpétuels, on demeure lié pour toujours

aux promesses faites.

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Par le vœu d’obéissance, nous ne sommes plus les maîtres de notre

volonté, mais nous cherchons à nous soumettre à la Très Sainte Volonté

de Dieu, manifestée dans les Constitutions, approuvées par l’Église, dans

laquelle œuvre celui qui a fait profession d’obéissance et celui qui a été

constitué en autorité.

Par le vœu de pauvreté nous nous privons de l’utilisation de toutes nos

choses, par le vœu de chasteté nous nous interdisons tout plaisir pour notre

corps, et par le vœu d’obéissance, nous sacrifions notre volonté à nous.

Par l’obéissance, le sacrifice est donc plus total.

De l’éloge de la volonté à son renoncement 1655 Le vœu d’obéissance est le vœu le plus grand parce que la volonté est la chose la plus précieuse que nous avons. Dante Alighieri l’avouait magnifiquement : “Parmi tous les dons que Dieu, dans sa bonté, a fait à l’homme, la volonté est l’expression de la liberté dont les créatures intelligentes, et rien qu’elles, en sont douées »1.

Dante exalte très bien la beauté de la liberté humaine. Il fait l’éloge de

cette faculté qui distingue l’homme des autres animaux et qui le rend

supérieur à eux. Or, par le sacrifice de cette liberté, nous refusons ce que

nous avons de plus cher, nous offrons, pour ainsi dire, le plus grand des

dons que nous possédons. Bien sûr, il est beaucoup plus facile relinquere

sua quam relinquere semetipsum (il est plus facile de renoncer à ses biens

que de renoncer à soi-même)2 ; mais justement parce qu’il est plus difficile

de nier sa volonté, que le Seigneur fait grandir davantage notre sacrifice.

1 Conforti paraphrase la maxime de celui qu’il appelle “le divin poète”, Dante Alighieri

(1265-1321) qui disait : “Lo maggior don che Dio per sua larghezza fesse creando, e a la

sua bontate più conformato, e quel ch’e’ più apprezza, fu de la volontà la libertate; di che

le creature intelligenti, e tutte e sole, furo e son dotate” (Paradiso, canto V, 19-24). 2 Souvent Conforti reprend cette pensée, attribuée à Saint Grégoire le Grand (cf. I Reg

XV,22), pour manifester la beauté et l’exigence de l’appel de Dieu. Par exemple, au

recteur de la maison de formation de Vicenza, il écrit en 1921, à propos de l’avenir de

l’Institut et de ses membres : « Parmi nos candidats, les abandons ne manqueront pas et

resteront seulement ceux qui sont bien motivés, et cela ne doit pas nous troubler. Cela

doit plutôt nous pousser à mieux préparer nos candidats à la vie apostolique et religieuse,

prêts à tout, - l’obéissance nous l’enseigne -, ce qui manque de nos jours chez plusieurs

de nos membres qui manifestent clairement combien il est vrai qu’il est plus facile

relinquere sua, quam relinquere semetipsum (de renoncer à ses biens plutôt que de

renoncer à soi-même)» (Guido Maria CONFORTI, « Lettre au père Antonio Sartori,

Parme, le 07.05.1921 », dans FCT 2, p. 87).

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3. LE BIENFONDÉ DE L’OBÉISSANCE

1656 « Melius est obedientia quam victima » (Qo 4,17)1.

1657 Tant que l’obéissance fleurira, toutes les autres vertus fleuriront. En effet, qu’est-ce que les règlements disposent ? Qu’est-ce que les Supérieurs commandent ? Rien d’autre que des actes de vertu.

Là où la vertu de l’obéissance ralentit, toutes les autres vertus

s’affaiblissent également.

St Ignace, grand maître d’esprit, qui, par ses capacités, aurait pu gouverner

tout un État, donnait un grand poids à l’observance de l’obéissance : « Laissez

inachevée votre lettre, disait-il, quand la cloche sonne ! »2

À observer de près, il est facile de se convaincre que l’observance de

toutes les règles, et donc l’exercice de toutes les vertus, se réduit à

l’obéissance. Si les vertus sont éclairées par l’obéissance, elles deviennent

plus précieuses, parce qu’on n’agit pas à cause de son initiative

personnelle, mais parce qu’on est soumis aux règles et aux Supérieurs, en

se privant ainsi de sa volonté.

Par l’obéissance tout se convertit en or. Vous connaissez le récit du roi

Midas, raconté dans la mythologie grecque, qui, ayant le pouvoir de tout

changer en or, finit par mourir de faim, parce que le même pain qu’il

touchait se convertissait en or. Au fond, ce récit nous révèle la vérité selon

laquelle l’homme ne peut pas se rassasier des choses de ce monde.

Toutefois, de manière spéciale, ce mythe peut s’appliquer à celui qui

observe bien la vertu de l’obéissance : donnez-moi un jeune obéissant, il

convertira en or toutes ses actions, et il trouvera ces actions écrites en or

dans le livre de la vie.

1 Le verset de la Vulgate dit : « Custodi pedem tuum ingrediens domum Dei, et

appropinqua ut audias. Multo enim melior est obedientia quam stultorum victimæ, qui

nesciunt quid faciunt mali » (Qo 4,17). « Surveille tes pas quand tu vas à la Maison de

Dieu ; approche-toi pour écouter plutôt que pour offrir le sacrifice des sots : ils ignorent

le mal qu’ils font » (Qo 4,17). 2 La source nous est inconnue. Plutôt, Saint François de Sales (1567-1622), en parlant

sur l’obéissance, recommande explicitement d’accueillir la voix de Dieu à partir du son

de la cloche : « Quand la cloche sonne et nous appelle pour quoi que ce soit, il faut être

prompte à partir et quitter tout. Il ne faut rien faire contre l’obéissance (…). Quand la

cloche sonne, pensez que Notre Seigneur vous dit : Ma fille, viens chanter mes

louanges » (Saint François de Sales, Avis spirituels 1, « De l’obéissance »).

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4. UN VŒU RAISONNABLE1658 L’obéissance est raisonnable. Parce que rien n’est plus raisonnable de ceque quelqu’un choisit librement. Parce que l’obéissance est conforme à la nature.

« Si tu veux être parfait » (Mt 19,21), dit Notre Seigneur ; en effet, nous

sommes bien libres de faire ce que nous voulons en choisissant entre deux

biens ou entre deux choses différentes. Mais nous sommes obligés de

choisir le mieux. Nous sommes libres et nous ne faisons pas le vœu avant

d’en avoir bien pondéré l’excellence et l’avantage.

1659 L’État, l’armée, le navire, les abeilles, les oiseaux migratoires. Regardez, toutefois, l’homme : par sa nature, il est né pour

l’obéissance. Lui, en effet, il est naturellement sociable. Or, il ne peut pas

y avoir de société sans lien pour lequel quelqu’un s’oblige à observer les

Constitutions en vigueur dans la société dans laquelle il veut s’agréger.

Rien de plus raisonnable que de s’agréger à une société, après avoir bien

examiné le but et les moyens dont on se sert pour l’atteindre.

1660 L’obéissance est raisonnable parce que les individus élisent leur Supérieur. Ainsi on s’oblige à en respecter les lois et les Supérieurs institués. Rien

de plus raisonnable que l’obéissance aux Supérieurs, parce que ces

derniers ne sont que les préférés, les élus des membres de la société. Cela

n’arrivait pas dans les grandes sociétés. Est-il peut-être irraisonnable

d’obéir à ceux que vous-mêmes, vous avez élus après les avoir retenus

idoines ?

1661 Elle est raisonnable parce que le Religieux reconnaît dans le Supérieur, la personne même de Jésus Christ.

5. COMMENT VIVRE LE VŒUObéissance et acceptation1662 La conséquence du vœu d’obéissance est l’acceptation de tous les autresengagements que le Supérieur croira de soumettre à ses confrères.

Comme conséquence logique et nécessaire, quand quelqu’un

appartient à une société, il doit être prêt à assumer tous les offices qui ne

sont pas contraire à la loi de Dieu et au statut, puisqu’une fois la loi

approuvée, même les Supérieurs ne peuvent pas être supérieurs à la loi.

Seulement en ce dernier cas, le religieux n’est pas dans l’obligation

d’obéir.

Le Supérieur doit être indifférent à toutes les charges honorifiques, en

les acceptant avec une vraie humilité. Parfois, il y a ceux qui croient ne

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pas en avoir les qualités et ils cherchent à en être exonérés. Ceci n’est pas

un vrai esprit d’obéissance.

On peut évidemment exposer ses doutes et ses craintes, mais si on ne

les retient pas opportuns, on doit aussitôt soumettre sa volonté, ses vues

particulières, malgré les sacrifices que cela comporte. Plus est petite notre

consolation dans l’obéissance, plus est grand le mérite que nous acquérons

auprès de Dieu.

Obéissance et humilité 1663 Le service peut être important ou humble. Dans les deux cas, on ne doit pas refuser l’obéissance. S’il est important, accepte-le sans vanité ni présomption, ni fausse humilité : la confiance en Dieu doit porter l’inférieur à l’accepter. Si le service est humble, alors tu l’accepteras avec humilité, sans le rejeter. S’il suscite en toi du dégout, alors tu l’accepteras avec encore plus de plaisir, parce qu’il t’offrira plus de mérites.

1664 N’oblige jamais le Supérieur avec insistance à faire ta volonté, parce qu’alors l’obéissance n’aura plus aucun mérite.

L’obéissance doit être simple : il ne faut pas, par des astuces, induire

le Supérieur à faire notre sainte volonté. Dans la longue expérience de

ministère avec les prêtres, j’ai souvent constaté ce fait : ils ne disent pas

non, mais ils insistent tellement qu’ils passent par des tierces personnes

afin que le Supérieur change son avis.

Voilà l’hypocrisie dans l’obéissance : faire la très sainte

volonté personnelle ! Cela ne doit jamais vous arriver, à vous qui êtes

doublement obligés. Vous devriez aller en Mission et, aussitôt vous irez ;

vous serez rappelés à rentrer dans votre Pays pour qu’ici puisse être utile

votre œuvre, et aussitôt vous rentrerez.

St François Xavier avait bien compris l’excellence de l’obéissance, et

s’il avait reçu l’ordre de St Ignace de rentrer à Rome, aussitôt il se serait

mis en route en renonçant d’effectuer ses vastes projets ; il voyait devant

lui un champ immense, il pensait d’entrer en Chine, de passer en

Amérique, puis en Afrique et, à nouveau, aux Indes. Mais s’il avait reçu

l’ordre de St Ignace, il n’aurait hésité même pas un instant et il aurait

répété l’affirmation des Écritures Saintes : melius oboedentia quam

victima.

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Cinq traits de l’obéissance 1665 L’obéissance doit être aveugle, affectueuse, prompte et persévérante.

§1. Aveugle : toi qui fais vœu d’obéissance, ne regarde ni la personne, ni lesqualités du Supérieur, ni la chose qui t’est commandée. Vois l’exempled’Abraham.

On ne syndicalise pas l’ordre du Supérieur, même si on ne comprend

pas son caractère raisonnable. On s’y soumet avec enthousiasme, en

pensant que celui qui est en haut voit plus loin que celui qui est en bas,

même s’il est myope. On raconte qu’un jour un Cardinal avoua au pape

Léon XIII : « Maintenant que vous êtes Pape, pensez-vous différemment

que lorsque vous étiez encore archevêque de Pérouse ? » Alors Léon XIII

lui répondit : « Depuis la chaire de Pierre, on voit différemment que depuis

celle de Pérouse, parce que celle de Pierre est plus haute ».

Votre obéissance doit être aveugle comme celle d’Abraham qui

n’hésite pas à porter son fils unique en sacrifice au Seigneur, bien qu’il ait

mis en lui beaucoup d’espérance pour être le germe d’un peuple entier.

Abraham n’oppose rien, et voyez comment le Seigneur l’a récompensé

pour son obéissance absolue.

§2. Prompte, sans procrastiner. Ainsi les Anges obéissent à Dieu. Ainsi Abrahamobéit à Dieu en quittant sa terre. Ainsi firent les Apôtres qui abandonnèrent lesfilets et le travail pour suivre Jésus. Vois St Paul sur la route de Damas.

Combien de grâces le Seigneur accorde à celui qui répond

immédiatement à l’appel, comme les Apôtres qui, relictis omnibus, (en

laissant tout) le suivirent. Le jeune riche ne fit pas ainsi. Par contre,

l’obéissance de Matthieu fut prompte : il quitte aussitôt sa table, ses

transactions et d’autres activités semblables qu’il gérait. St Paul a aussitôt

répondu au Seigneur : « Que voulez-vous que je fasse ? Va chez Ananie,

dit le Seigneur » (cf. Ac 9,1-12). St Paul obéissant devient un fervent

chrétien. Nous ne disposons que d’un instant. Quelle meilleure manière de

le déployer quand nous le faisons dans l’obéissance ?

§3. Affectueuse : elle ne doit pas être inspirée par la crainte, mais par l’amour.Elle doit, donc, être joyeuse, sans lamentations : « Dieu aime celui qui donnejoyeusement » (2Co 9,7).

§4. Persévérante, sans atermoiements entre les choses qui plaisent et qui neplaisent pas. Vois la persévérance du Christ qui, du berceau au tombeau, futobéissant au Père céleste.

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Malheur à celui qui met la main à la charrue et puis il regarde en arrière

(cf. Lc 9,62).

§5. Sans murmurations. Il y a de ceux qui contestent tout : la manière, le temps,les circonstances. Voilà une obéissance sans mérites. « Qui vous écoute,m’écoute. Qui vous rejette, me rejette ». St Benoît met en garde contre ceuxqui murmurent.

1666 Combien de mal ils causent ! Ils sont comme la goutte d’eau qui tombe sur une pierre et qui parvient à la perforer. Il est permis d’exprimer respectueusement son avis au Supérieur, mais, par la suite, il faut, non pas insister, mais s’abandonner à ses dispositions.

Conclusion : prendre conscience des vœux L’essence de toute la vie religieuse se résume dans les vœux. Pondérez

bien les obligations que vous assumerez par les vœux. Que votre sacrifice soit

conscient, et, alors, sera plus grand le mérite que vous aurez auprès de Dieu.

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Uccelli P. Pietro

Formateur de grande ardeur missionnaire,

mystique, entreprenant et créatif

avec un profond esprit d’obéissance

et de confiance dans la Divine Providence

Né le 10.03.1874 à Barco de Bibbiano (Reggio Emilia), ordonné prêtre le 18.09.1897, entré à Parme le 30.11.1904, envoyé en Chine le 13.01.1906, il fut appelé en Italie, en 1919, pour le service d’éducateur des jeunes en formation à Parme et Vicenza. Il meurt à Vicenza le 29.10.1954. Le Saint Siège, le 21.05.2018, l’a déclaré Vénérable, ayant reconnu l’héroïcité de ses vertus.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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6. ConstitutionsParme, ISME, 31 mars 1921

1. L’OBSERVANCE DES CONSTITUTIONS ET LA PROSPÉRITÉ DE L’INSTITUT1667 Les Constitutions sont une nécessité indispensable pour un Institutreligieux et pour l’acquisition de la perfection pour ceux qui y appartiennent.

L’obéissance se manifeste dans les actes, par l’observance de toutes les

règles et les Constitutions de son Institut.

Nous avons vu comment l’obéissance est la synthèse de toute la vie

religieuse au point qu’en plusieurs Congrégations on ne faisait que ce vœu

en croyant implicitement d’englober les autres vœux.

Il est important d’avoir une très grande considération de l’obéissance,

et, en particulier, du devoir d’observer les Constitutions dont dépend le

bienêtre de l’Institut et de ses membres.

2. LA CRÉATION EST RÉGIE PAR DES LOIS1668 Le monde physique a ses lois. Dieu rarement les déroge. En 6.000 années,une fois seulement, le Seigneur a dérogé l’ordre du soleil (cf. Jos 10,12-13). Toutest merveilleusement ordonné. « Dieu, dans les plus petits, fait briller sagrandeur »1.

1669 Les Empires et les Royaumes sont régis par des lois. Même les communautés religieuses doivent avoir des lois, d’autant plus que leurs membres ont renoncé par vœu à disposer de leur propre volonté.

Toute chose est bien structurée par des règles. La création : regardez

comment Dieu, qui est l’essence de toute loi, est capable de répandre ses

règles dans toute la création ! Voyez comment il sait bien les rayonner

dans la création, si bien que l’ordre qui se découvre en elles, est une raison

suffisante pour démontrer l’existence de Dieu. Depuis le fil d’herbe, si

fragile, au cèdre du Liban, de la graine de poussière aux astres qui tournent

au tour du firmament, tout parle de l’ordre, de la loi par laquelle Dieu

gouverne le monde.

1 L’aphorisme « Eminet in minimis maximus ipse Deus » (Dieu se surpasse lui-même

dans les petites choses) est attribué à St Augustin. Pourtant il semble qu’on ne le trouve

dans aucun de ses textes.

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Même dans les choses les plus petites, on aperçoit la main puissante et

ordonnatrice de Dieu.

Admirez l’ordre dans le changement des saisons, dans la succession du

jour et de la nuit, dans le mouvement ordonné des astres qui ne déclinent

même pas un instant de leur trajectoire.

Tout, dans la création, est soumis aux lois. Difficilement, et seulement

par miracle, Dieu a parfois dérogé pour des fins nobles. Une seule fois, il

dérogea la loi de la rotation des planètes quand, pour favoriser la victoire

aux Israelites, il commanda au soleil de s’arrêter, comme on le dit même

aujourd’hui dans le langage ordinaire.

Tout est gouverné par des lois. Même les règnes procèdent avec

prospérité jusqu’au point où ils sont bien gouvernés. Mais dès que diminue

l’esprit de soumission et d’observance de la loi, ils s’affaiblissent. Même

dans les petites sociétés cela arrive. Et beaucoup plus dans les

Congrégations religieuses qui se proposent d’atteindre la perfection

évangélique. Souvenez-vous bien de ceci : de l’observance des règles

dépend la prospérité et le bienêtre de notre Institut.

3. LE BIENFONDÉ DES CONSTITUTIONS1670 Les Constitutions sont un encouragement à acquérir la Perfection. Cettedernière consiste dans la pratique des conseils évangéliques. Les règlestournent autour de cela. Elles sont comme les ailes pour les oiseaux et les rouespour les chars. Elles nous aident à vaincre les trois grands obstacles, source detout mal, qui sont les trois concupiscences du genre humain.

1671 Dans un Institut religieux, quand les règles sont observées, tout prospère. C’est l’ensemble de l’Institut qui prospère. Ce sont les individus qui prospèrent dans la vertu.

Les règles et les Constitutions sont pour nous comme les ailes des

oiseaux. Il est vrai qu’elles sont un poids, mais, grâce à elles, nous

pouvons rayonner dans les cieux. Elles sont comme les roues d’un char :

elles sont lourdes. Mais, grâce à elles, il nous est plus facile de porter le

poids et la fatigue de la perfection. Les règles sont les ailes qui nous

permettent de nous élever jusqu’à Dieu. Elles sont les roues qui nous

permettent de faire le voyage et d’atteindre les sommets de la perfection

et de la sainteté chrétienne.

Les règles n’ont d’autre but que de parvenir à éradiquer les trois

passions qui tourmentent notre existence ; la concupiscence de la chair, la

concupiscence des yeux et l’orgueil de la vie.

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1672 Tout le contraire arrive quand les Constitutions ne sont pas observées. À la pauvreté l’abondance, à la mortification le relâchement, à l’obéissance les convenances personnelles, à la ferveur l’acédie.

1673 L’observance des règles est, ensuite, très bien acceptée par Dieu qui aime l’ordre, étant, par ailleurs, l’ordre par excellence.

Si les règles ne sont pas observées, l’Institut tend vers son déclin. Si,

cependant, elles sont observées, on atteint le bienêtre de l’Institut et on

suscite le bonheur de ses membres. Par elles, on jouit de la paix véritable,

celle qui, après la grâce de Dieu, constitue le meilleur don qu’on peut

souhaiter recevoir dans ce monde.

Mais supposez que l’ordre diminue. Aussitôt la paix vient à manquer,

la discorde s’installe et les paroles de Notre Seigneur se réalisent : « Tout

royaume divisé contre lui-même devient un désert » (Mt 12,25).

Avec la concorde, se conservent les choses les plus petites. Avec la

discorde s’abîment les plus grandes.

Regardez dans l’histoire de l’Église comment les Congrégations

étaient stables et florissantes jusqu’au moment où l’observance des

Constitutions a régné. Mais, le jour où au lieu de la pauvreté a surgi

l’abondance, la souplesse a pris la place de la mortification, alors, on a

préféré faire ses intérêts plutôt que de se soumettre à l’obéissance. Quand

on préfère à la vertu les commodités de la vie du monde, on constate

facilement la vérité de la terrible phrase des saints : « la corruption de ce

qu’il y a de meilleur, est la pire » (Corruptio optimi pessima !)

Les plus grands hérétiques qui ont divisé l’Église et lui causèrent

beaucoup de torts, sont venus des Congrégations religieuses, dans

lesquelles ils ont négligé l’esprit religieux de concorde et de soumission.

Quand une Congrégation cesse d’observer les règles, s’affaiblit aussi

la raison d’être de la Congrégation parce que toute société doit se baser

sur ses Constitutions.

4. POURQUOI OBSERVER LES CONSTITUTIONS ?

a) Par l’acte de notre profession religieuse1674 En particulier, pour quelles raisons les Religieux doivent-ils observer leursConstitutions ? Parce qu’ils se sont proposés de tendre vers la perfection selonles Constitutions de l’Institut auquel ils ont donné leur nom. Pour cela, lesConstitutions doivent être expliquées aux novices : elles constituent la règle deleur vie. St Ignace insiste sur cette recommandation auprès de ses élèves.

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Nous sommes tenus à l’obéissance par l’acte même par lequel nous

donnons le nom à la Congrégation. Nous nous proposons de tendre à la

perfection par les moyens qu’elle offre, tels que l’observance des règles et

des Constitutions qui lui sont propres. En vertu du vœu d’obéissance, nous

faisons sacrifice au Seigneur de notre volonté, en nous soumettant à la

sienne que nous voyons manifestée à travers les règles.

b) En vertu du vœu d’obéissance1675 Les Religieux sont implicitement obligés à l’observance des Constitutionsen vertu du vœu d’obéissance. Dans les Constitutions, ils doivent reconnaître lavolonté de Dieu : « c’est vivre pour Dieu que de vivre conformément à unerègle »1. Une telle observance doit être universelle, sans admettre d’exceptionentre une règle et une autre. Les Religieux observent leurs règles par le bonexemple. Il n’y a aucun autre facteur qui influence l’évolution d’unecommunauté que les bons ou les mauvais exemples.

Rien de ce qui se fait, n’échappe au regard de nos condisciples : les

exemples édifient (exempla trahunt !) Les paroles sont très belles, mais

les exemples séduisent davantage. Les paroles sont de l’argent, tandis que

les exemples sont de l’or. Notre vie doit être une homélie éloquente du

bon exemple et, à notre tour, nous devons toujours imiter les exemples les

meilleurs. Nos compagnons ne doivent pas trouver en nous quelque chose

de moins parfait. Donner le bon exemple, c’est une grande responsabilité

que nous assumons devant Dieu.

1676 Quelques exemples peuvent le prouver : St Louis de Gonzague, St Stanislas, St Jean Berchmans.

1677 Voir un Religieux qui a peu de piété et peu de mortification, qui est nonchalant dans l’accomplissement de ses devoirs, donne une impression de torpeur, de laisser-aller, d’irrégularité.

1678 Il faut être fidèles aux règles, en tout. « Celui qui est digne de confiance dans la moindre chose est digne de confiance aussi dans une grande » (Lc 16,10).

1 La locution latine, citée par Conforti, est plus synthétique et facile à retenir : « Qui

regulae vivit, Deo vivit ».

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5. LES CONSTITUTIONS OBLIGENT-ELLES SOUS PEINE DE PÉCHÉ ?1679 Comment doit-on interpréter le principe selon lequel les Constitutionsn’obligent pas sous peine de péché ?

1680 Avant tout, remarquons qu’une chose peut être mauvaise : soit parce qu’elle s’oppose à une loi divine ou ecclésiastique ; soit parce qu’un précepte particulier, établi par une société qui a le droit de faire des lois, impose ou interdit un acte ; soit par suite d’un principe vicieux, soit pour les circonstances qui accompagnent l’acte, ou pour le scandale qui peut être causé.

1681 Ainsi l’acte peut être plus ou moins mauvais, selon qu’il assume toute ou une partie de la malice des circonstances citées ci-haut. Un exemple peut être celui qui laisse à moitié la Sainte Messe.

1682 Les règles n’obligent pas sous peine de péché : ce principe doit être interprété à partir du législateur qui n’avait pas l’intention d’obliger sous peine de péché. Cela n’empêche pas, toutefois, que pour les circonstances qui précèdent, qui accompagnement et qui suivent un acte, cela ne soit pas un péché.

1683 Quand est-ce qu’une telle transgression sera, de fait, un péché ? Ce n’est pas un péché si elle a été commise par inadvertance ou par fragilité.

1684 Par contre, si elle a été commise par négligence ou tiédeur, alors elle est, au moins, un péché véniel.

1685 Si elle a été commise par mépris ou par un parti pris, alors elle est un péché mortel.

1686 St Thomas considère comme mépris l’habituelle négligence des Constitutions d’un Institut.

1687 Celui qui se trouverait dans cet état, il est dans une condition déplorable. L’Église nous enseigne que nous ne sommes pas obligés d’observer les

règles sous peine de péché. C’est bien vrai et juste et donc n’ayons pas de

scrupules à ce sujet. Toutefois, malheur à nous si, pour cette raison, nous

commençons à nous laisser pénétrer par un esprit de laxisme dans

l’observance des règles ! Il est vrai que la règle n’oblige pas sous peine de

péché, mais cela peut être aussi faux. Il est vrai selon la logique de celui

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qui a formulé ces règles et qui, normalement, n’entend pas obliger sous

peine de péché. Cependant, pour le reste, il n’est pas rare de voir dans une

transgression d’une règle un péché quelconque, parce qu’il est facile, dans

la transgression d’une règle, qu’il y ait une raison pour laquelle un acte

peut être péché.

En soi, il n’est pas un péché de transgresser une règle, mais si celui qui

la transgresse le fait par mépris de l’autorité, voilà tout de suite le péché,

parce que le mépris de l’autorité instituée et choisie par Dieu, est toujours

un péché.

Soyons donc très attentifs car il ne suffit pas que le mépris soit formel,

car cela est sans doute un péché mortel : même quand nous transgressons

une règle habituellement par négligence, volontairement, nous

commettons également un péché, selon la doctrine de St Thomas. Que ce

péché soit véniel ou grave, nous ne nous y attardons pas. Je ne veux pas

mettre en vous des scrupules, mais fixez bien en vous cette conviction, car

elle vient du plus érudit des saints docteurs de l’Église.

Il y a péché même quand, dans la transgression, il y a une raison de

causer un mauvais exemple pour le scandale qu’on donne et le

relâchement qu’on peut susciter dans la discipline. C’est un péché car la

cause est peccamineuse.

Mes bienaimés, ne suivez pas ceux qui pensent que la non-observance

des règles n’entraine pas de péché. Au contraire, ayez un grand soin pour

ne pas être une pierre d’achoppement pour vos compagnons.

6. LA PAIX DURABLE ET LA JOIE DU CŒUR1688 Voulez-vous jouir de la paix durable et de la joie du cœur ? Observez vosrègles.

Dans le jardin sublime de votre communauté, rien ne vous sera de

désordonné de manière qu’au terme de la journée vous pourrez, au

moment de l’examen de conscience, dire d’avoir observé toutes les règles.

Toute observance de règle est un acte de vertu. Si nous ne faisons pas cet

acte de vertu, nous ne sommes pas dans le chemin de perfection et nous

ne pouvons pas plaire à Dieu qui trouve des taches même chez les Anges.

1689 St Jean Berchmans, au point de mourir, s’est exclamé : « Je suis heureux de n’avoir transgressé aucune règle ».

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Imitez l’exemple de St Louis de Gonzague, de St Jean Berchmans et

de tous les saints religieux qui ont été très respectueux des règles1.

Je vous souhaite qu’au terme de la vie communautaire, dans cet

Institut, vous puissiez avoir le réconfort de St Jean Berchmans qui disait :

« Je ne me souviens pas d’avoir transgressé une règle de l’Institut ».

Ainsi, vous aurez atteint facilement la perfection, vous aurez travaillé

à la pratique de la vertu chez les autres et, tout cela, vous le trouverez écrit

dans le livre de la vie. Commencez à faire fleurir cette pratique dans le

Saint Noviciat, pour continuer, ensuite, dans la vie communautaire de

l’Institut, et, pour autant qu’il sera possible, même dans votre vie de

Mission.

1 Depuis sa jeunesse, Conforti s’inspire à ces deux saints jésuites, Louis de Gonzague

(1568-1591) et Jean Berchmans (1599-1621), morts jeunes et modèles typiques des

séminaristes de l’époque (cf. Guido Maria Conforti, « Bonnes résolutions, n. 14 de

1884 », dans Ermanno FERRO, Pagine confortiane, éd. Centro Studi Confortiani

Saveriani, Pro manuscripto, Parma 1999, p. 17). La dévotion envers Jean Berchmans

était en pleine diffusion, au temps de Conforti, car Berchmans fut béatifié en 1865 et

canonisé en 1888.

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Magnani P. Luigi

Étudiant xavérien, militaire au front, devenu Capitaine

par ses vertus civiles et son héroïsme,

premier du groupe à partir en Chine, premier à mourir

Né le 22.01.1894 à Roccabianca (Parme), entré à Parme le 11.09.1911, appelé au service militaire au front pendant la 1ère Guerre Mondiale (1915-1918), ordonné prêtre le 16.10.1921, envoyé en Chine le 04.01.1922, aumônier militaire en Chine (1927-1929), consulteur de la Direction Générale et recteur de la Maison-mère (1929-1934), décédé à Parme le 18.03.1934.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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7. Charité envers le prochainParme, ISME, 8 avril 1921

1. UN SEUL ESPRIT ET UN SEUL CŒUR1690 Dans notre dernière instruction1, nous avons vu ce qu’est la charité, sonexcellence, l’objet, le rapport avec les autres vertus, les moyens pour l’acquérir.Il y a un double objet : aimer Dieu et le prochain.

La charité mutuelle est le grand secret pour votre bonne réussite, non

seulement pendant le temps de votre noviciat et de votre formation de base,

mais pour toute votre vie d’apostolat. Si vous parvenez à former, entre vous,

un seul cœur, vous verrez que tout procèdera à merveille. Au contraire, si la

discorde venait à régner, toutes les actions deviendraient stériles. Donc,

vous devez former, entre vous, un seul esprit et un seul cœur pour pouvoir

assurer un bon résultat à ce que vous faites. Tant de fois vous avez entendu

parler de cette vérité, mais elle doit être comme le pain que nous mangeons

chaque jour, sans jamais nous fatiguer, même si c’est toujours le même :

nous savons que c’est bien l’aliment le plus nourrissant. Ainsi nous ne

devons jamais nous fatiguer de nous exhorter à vivre cette vertu essentielle.

Le commandement nouveau 1691 Nous devons aimer le prochain. « Et le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Mt 22,39). « Je vous donne un commandement nouveau. À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jn 13,34-35). L’apôtre St Jean disait : « Mes petits-enfants, aimons-nous l’un l’autre, selon le commandement de Jésus » (cf. 1Jn 3,23).

Notre Seigneur, dans l’Évangile, après le premier commandement,

ajoute : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Mt 22,39). « Je

vous donne un commandement nouveau » (Jn 13,34). Voilà le précepte

par excellence, dans lequel consiste toute la loi et les prophètes, presqu’un

abrégé de tout l’enseignement divin. C’est un « commandement

nouveau » puisque le concept de charité avait été altéré, si bien qu’il

n’allait pas au-delà des frontières de ses compatriotes et qu’il considérait

1 Cette expression laisse entendre que Conforti se serait entretenu avec les novices sur la vertu

théologale de la charité. Cette conférence ne nous est pas parvenue. Teodori dit que cette

conférence a été tenue également au Séminaire Diocésain, le 08.03.1921 (cf. FTC n. 0, p.

129). Il se peut donc que Conforti ait utilisé les mêmes annotations pour les deux lieux et que

la conférence dont il fait allusion, il l’aurait tenue au Grand Séminaire du Diocèse de Parme.

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les autres comme des ennemis. Voilà pourquoi, à raison, il est appelé

« nouveau ». « Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés »

(Jn 13,34). Nous voyons ici la caractéristique du chrétien, comme quand

Jésus disait : « À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous

avez de l’amour les uns pour les autres (Jn 13,35). Pour cette même cause,

Jésus prie : « Père, que tous soient un » (Jn 17,21). Qu’ils soient une seule

chose comme une seule chose nous sommes toi et moi. St Jean, en faisant

écho aux paroles du Maître Divin, ne se fatigue pas de répéter : « Mes

petits-enfants, aimons-nous l’un l’autre » (cf. 1Jn 3,23). Paul répondait à

ceux qui l’accusaient de revenir toujours sur le même enseignement :

« C’est le commandement du Seigneur » (cf. Tt 1,3).

La première communauté chrétienne 1692 L’exemple de la première communauté : « La multitude de ceux qui étaient devenus croyants avait un seul cœur et une seule âme. Personne ne disait que ses biens lui appartenaient en propre, mais ils avaient tout en commun » (Ac 4,32).

Les premiers chrétiens s’aimaient avec tendresse, en faisant tout en

commun : ils ne considéraient pas froidement « ce qui est à moi et ce qui est à

toi ». Ce n’était pas un ordre imposé à la manière des Socialistes d’aujourd’hui :

ils agissaient librement, poussés par la grande charité qui rend tous frères.

2. RAISONS POUR LA CHARITÉ ENVERS LE PROCHAIN1693 Pourquoi devons-nous aimer les frères ? Parce qu’ils sont l’œuvre de Dieu,fils d’un seul Père selon la chair, fils et frères de Jésus Christ, frères selon lamême foi, fils de cette terre commune.

Aimez-vous ici dans ce milieu enfermé du Séminaire car vous vous

aimerez aussi quand vous serez missionnaires. Beaucoup de raisons

doivent nous pousser à nous aimer les uns les autres. Tout d’abord, la

pensée que nous sommes tous l’œuvre de Dieu qui nous a tiré du néant et

qui nous a créés enfants du même Père. Tout ce qui existe ici-bas vient de

Dieu. St François d’Assise le savait bien quand il se plaisait à appeler la

sœur lune, le frère soleil, la sœur eau et il vivait une grande fraternité avec

toutes les créatures. À plus forte raison, nous devons considérer cette

fraternité entre nous puisque, selon la chair, nous sommes enfants d’Adam.

Ensuite, aux yeux de Dieu, nous sommes tous nobles. Il n’y a pas de

distinction ni de classe, ni de société, ni de nation. Nous sommes fils de

Jésus Christ qui nous a engendrés de la Croix et nous a reçus en héritage par

son Père Divin. Nous sommes frères de Jésus Christ, parce que comme

nous, il a revêtu la chair humaine, fils d’Adam, et il fut appelé justement par

les Saints « le Premier-né » (cf. Col 1,18). Nous sommes obligés de nous

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aimer par la foi, en vertu de cette fusion concorde d’esprit dans la même

croyance.

Charité ordonnée 1694 Nous devons aimer les parents, les Supérieurs et Précepteurs, les compagnons, les cadets, bref, tout le monde.

Nous sommes fils d’une même patrie. Non pas dans le sens

discriminatoire qui opposait les Romains des Grecs et qui fait qu’on parvienne

à détester ce qui n’est pas Italien ou pour l’Italien. Il s’agit d’une charité

ordonnée : avant la famille, puis la patrie et les autres frères, sans exclure

personne. L’amour du Christ, disait St Jacques, ne fait pas de distinction entre

Grec et Gentil, mais il embrasse tous les hommes, selon la parole du Christ :

« il y aura un seul troupeau et un seul pasteur » (Jn 10,16). Selon ce principe,

aimons nos parents, premiers représentants de Dieu, mais selon la volonté de

Dieu. Soyons donc prêts à faire le sacrifice même de cet amour quand la gloire

de Dieu nous le demande. Ainsi aimons les Supérieurs, qui peuvent bien

exercer sur nous une paternité spirituelle parce que nous leur devons la vie du

cœur qui n’est pas moins noble que celle qui nous fut donnée par les parents.

Aimons également nos condisciples, en voyant en eux le visage du Christ.

Aimons nos petits frères, en nous souvenant des paroles de Notre Seigneur :

« Ce que vous aurez fait au plus petit de vos frères, vous l’aurez fait à moi »

(cf. Mt 25,31-40). Jésus a voulu se mettre à la place du plus petit pour nous

inculquer la fraternité universelle et nous donner l’envie de la bâtir. Les Saints

préféraient toujours montrer leur charité avec les pauvres, en rendant service

dans les hôpitaux, jusqu’à sucer la pourriture de leurs plaies pour les soigner.

3. COMMENT ÊTRE CHARITABLE1695 De quelle manière ? En voulant et en procurant le bien, en conseillantdans les doutes, en consolant dans les afflictions, en encourageant au bien parle bon exemple, en priant les uns pour les autres : « Priez les uns pour les autresafin d’être sauvés » (Jc 5,16).

Il faut aimer dans les actions. Vous le pouvez, en réconfortant vos

condisciples quand vous les voyez dans le doute : une seule parole peut

être un rayon de lumière. Réconfortez-les dans les afflictions. Ne refusez

pas de répandre sur eux une goutte de parfum. Secourez-les dans tous leurs

besoins, des différentes manières possibles. St Paul dit que celui qui ne

vient pas au secours de son propre frère, il a renié la foi et il est pire qu’un

infidèle (cf. 1Tm 5,8). On peut s’aider avec l’édification, et beaucoup

même, parce qu’elle est un fort encouragement au bien et à être bon.

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Considérez comme corollaire de tout ce que je viens de dire, le fait que

vous devez prendre garde de tout ce qui peut offenser la charité mutuelle.

4. LES VICES CONTRAIRES À LA CHARITÉ1696 Le premier vice contraire à la charité est l’égoïsme : l’envie, les antipathies et ladiscorde causées par la médisance, les chuchotements et l’esprit de contradiction.

La gravité du péché s’évalue par la grandeur de la vertu offensée. La

vertu de la charité est, parmi toutes, la plus belle et il est assez facile de

manquer de charité. Je ne veux vous transmettre aucune peur, mais les

paroles du Seigneur viennent confirmer cette pensée : « Si quelqu’un

insulte son frère, il devra passer devant le tribunal. Si quelqu’un le traite

de fou, il sera passible de la géhenne de feu » (Mt 5,22). On peut donc

manquer très facilement à un frère, ne serait-ce que par un sentiment

d’antipathie ou de haine qui peut lui causer une grave tristesse. Pensez-y :

rendre triste une âme immortelle !

L’égoïsme est l’ennemi de la charité, étant un amour désordonné de

soi-même, sans point s’intéresser à ses frères. L’apôtre, par contre, doit

être éminemment altruiste. Quelqu’un a bien dit que le prêtre doit avoir

une âme royale. St Grégoire commente en disant que ce n’est pas pour rien

que Notre Seigneur pose à trois reprises la question à Pierre : « M’aimes-

tu ? » (cf. Jn 21,15-17). C’est pour que nous puissions comprendre que la

première qualité d’un cœur d’apôtre doit être celle de la charité. Par

tempérament, nous tendons à être, même inconsciemment, égoïstes. Mais,

souvenez-vous, que cela est en contradiction éclatante avec l’esprit apostolique,

pour lequel il faut chercher à combattre efficacement contre l’égoïsme.

Prenez garde, encore, des antipathies ainsi que des sympathies, parce

qu’elles ne sont que des affections naturelles, tandis que notre amour doit

être tout surnaturel. Facilement elles peuvent devenir vicieuses. Cela n’est

pas digne d’une âme chrétienne. Soyons supérieurs à ces sentiments qui

portent la discorde dans la famille et la tempête dans le cœur. Autrement,

il n’y aura pas en nous l’équilibre qui est si nécessaire pour vivre dans la paix.

Que la charité règne toujours parmi vous car elle cimente et fortifie tout.

Prenez garde de la murmuration : ne dites jamais sur quelqu’un, en son

absence, ce que vous ne diriez pas en sa présence.

Attention à la médisance. À cause d’elle, sans vous en apercevoir, vous

vous habituerez à avoir toujours la boutade ou le mot piquant qui, comme une

épée à deux tranchants blesse énormément la charité. Malheureusement, ce

vice est si commun chez les clercs ! « Si quelqu’un ne commet pas d’offense

par sa langue, dit St Jacques, c’est un homme parfait, capable de maîtriser son

corps tout entier » (Jc 3,2). Combien de méchancetés sortent de la bouche !

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Si vous ressentez des démangeaisons de dire une parole peu charitable et

offensive, faites-en sacrifice sur l’autel de la charité chrétienne.

Prenez garde des chuchotements parce que, selon la Sainte Écriture, le

chuchotement salit l’âme. Le fait de reporter à droite et à gauche ce qu’on

apprend de peu édifiant sur les condisciples, engendre méfiance et

suspicion, si bien que la charité mutuelle diminue sensiblement. Si vous

entendez quelque chose, n’allez jamais la dire au frère car, ainsi, vous

diminuerez la paix et la tranquillité. Même celle-ci est une plaie très

répandue à notre état de vie et elle cause des inimitiés profondes et des

aversions qui entrainent les conséquences les plus tristes.

Fuyez la jalousie, même des bonnes choses du cœur. C’est une triste

passion, diabolique parce qu’elle nous rend tristes du bien d’autrui. Elle est

diabolique parce qu’elle était au cœur de Satan, quand il eut l’envie que

Dieu fût supérieur à lui, quand il envia le sort heureux de nos progéniteurs.

Cette envie triste poussa Caïn à répandre le sang innocent de son frère Abel.

Au lieu d’envier le bien d’un confrère, il faut s’efforcer de chercher à

l’imiter et à devenir meilleur. L’émulation est une belle vertu, de même que

l’envie est un mauvais vice, une passion vraiment diabolique. Si un de vos

condisciples réussit et fait du bien, remerciez le Seigneur et imitez-le.

1697 Un autre vice contraire à la charité est la colère, à laquelle il faut opposer la mansuétude.

Nous tous, plus ou moins, nous sommes tentés par des mouvements de

colère. Même les personnes plus douces, malheur à elles quand elles se

fâchent ! Les Saints, tentés par la colère, ont su si bien se maîtriser jusqu’à

croire de manquer de courage. Il suffit de penser à St François de Sales qui

avait toujours un tempérament doux et calme. Une fois, il fut agressé par

quelqu’un qui voulait le tuer. Il demeura maître de la situation jusqu’à aller

rendre visite à son ennemi, lui obtenir le pardon, ne lui demandant rien d’autre

qu’il cesse de le haïr. On croyait que François manquait de courage, tellement

il était maître de ses sentiments. Voilà un exemple récent de maîtrise de soi.

Sur l’autel de la charité du Christ, faites sacrifice de tous les tempéraments,

les antipathies et les sympathies, les mouvements de colère et d’envie, bref,

offrez tout. Si vous ne parvenez pas à atteindre la charité du Christ qui est

pour vous la porte du Paradis, vous trouverez l’entrée de la prison à perpétuité.

St Paul nous le dit énergiquement : « Charitas omnia vincit. La charité

triomphera toujours ! » (cf. 1Co 13,8). Voilà le secret de la vraie force, du

courage et du triomphe. Si tous avaient, comme fondement de leurs lois, la

charité du Christ, les résultats seraient bien différents en qualité et en dignité.

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Morazzoni P. Eugenio

Colonel valeureux auprès des militaires blessés,

devenu Missionnaire audacieux en Chine

et formateur porteur de grande ferveur missionnaire.

Son livre préféré : l’expérience de vie missionnaire.

Son secret : attachement à la prière, amour pour les âmes,

esprit de sacrifice.

Né le 11.09.1895 à Fagnano Olona (Varese), Grand Séminariste au Diocèse de Milan il est envoyé, pendant la 1ère guerre mondiale (1915-1918), au service militaire à Parme où il rencontre Mgr Conforti. Entré à Parme le 20.04.1919, ordonné prêtre le 16.10.1921, envoyé en Chine le 04.01.1922, où il fut aussi séquestré par les « Brigands ». En 1947, il fut appelé en Italie pour le service de formateur et de supérieur de communauté. Il meurt à Gênes le 12.09.1982.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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8. Union habituelle avec DieuParme, ISME, 21 avril 1921

1. UN GRAND DANGER1698 Un des dangers pour ceux qui se donnent au bien du prochain est celui des’oublier soi-même à cause des autres. Pour cela, il est nécessaire de cultiverl’union habituelle avec Dieu.

Cela peut arriver très souvent, surtout à l’homme apostolique, toujours

plongé en beaucoup d’activités.

« Quel avantage, en effet, un homme aura-t-il à gagner le monde entier,

si c’est au prix de sa vie ? » (Mt 16,26). Que sert-il d’opérer des prodiges

de conversion dans le monde si nous négligeons notre sanctification ?

Cherchez, depuis ce temps du noviciat, à prendre vos précautions et à vous

habituer à éviter ce danger, grâce à l’effort de l’union habituelle avec Dieu.

Cette dernière nous empêchera de tomber dans le danger de l’activisme

parce que la pensée de Dieu, qui est présent toujours et partout par son

regard qui scrute les reins et le cœur, toujours, la nuit et le jour, nous aidera

à progresser dans la perfection.

2. EN QUOI CONSISTE-ELLE ?1699 Il s’agit de penser souvent à Dieu, d’avoir toujours à l’esprit que Dieu noussuit, nous assiste par son regard, aussi bien quand nous sommes seuls ou encompagnie, le jour et la nuit. Cette pensée de la présence de Dieu alimente ennous deux sentiments différents d’amour et de crainte. D’amour, parce qu’iln’est pas possible de penser à Dieu sans en évoquer la bonté, l’amabilité, lesbienfaits reçus par lui. De crainte, parce qu’il est impossible de penser à Dieu etde ne pas penser en même temps que nous devrons lui rendre compte detoutes les pensées qui traversent notre esprit et de tous les sentiments de notrecœur.

3. LA CRAINTE DE DIEU1700 Il a été dit que cette crainte coupe les ailes aux élans généreux et affaiblitles esprits. Tout au contraire.

Ce n’est pas vrai que la crainte affaiblit les esprits. Rien n’est plus faux

car l’Esprit Saint dit que « le commencement de la Sagesse c’est la crainte

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de Dieu » (Ps 111,10). Il s’agit d’une crainte filiale et bénéfique qui nous

pousse aux œuvres les plus généreuses.

Cette crainte vient de l’amour et donc dilate le cœur aux plus nobles entreprises. C’est la crainte des martyrs qui, plutôt qu’offenser leur Dieu, affrontent la mort. C’est la crainte de toutes les âmes saintes qui, aimant Dieu, prennent garde de tout ce qui peut l’offenser. Pour lui plaire, ils sont même disposés à affronter les sacrifices les plus ardus.

4. CHERCHER CE QUI EST PLUS PARFAIT1701 Ste Jeanne de Chantal s’était proposée de choisir toujours ce qui était plusparfait. Nous de même, si nous cherchions à avoir cette union avec Dieu, fondéesur l’amour et la crainte, nous ferions des grands progrès dans la vertu, nousparviendrons à la sanctification des autres, sans pour autant nous vanter denotre perfectionnement spirituel.

1702 Cette union avec Dieu rendra beaucoup plus léger le poids de notre croix. Elle nous fera goûter les joies saintes du Paradis qui consistent justement en une union plus étroite avec Dieu.

Dans l’union avec Dieu, vous trouverez la perfection, votre croix sera

moins lourde et la pratique des vertus sera plus facile. Vous goûterez aux

joies du Paradis si bien que vous serez, comme les Saints, toujours dans la

joie.

Oh oui ! Vous goûterez ici-bas le Paradis ! Qu’est-ce le Paradis si ce

n’est-ce que l’union avec Dieu ? Ici-bas, cette union est encore limitée et

restreinte, mais elle est de la même nature que celle que nous goûterons

au ciel. L’union que nous pouvons avoir ici, même « de manière confuse,

comme dans un miroir » (1Co 13,12), pour le moment nous suffit comme

avant-goût du don que nous aurons dans l’éternité.

5. COMMENT ACQUÉRIR L’UNION AVEC DIEU1703 Comment pouvons-nous acquérir cette union avec Dieu ?1704 (n. manquant dans Pagine Confortiane)

a) La méditation quotidienne1705 Avec la méditation quotidienne. Quand nous aurons bien fait la méditation, nous serons plus portés à penser à Dieu.

Avant tout, avec la méditation fervente : par elle, notre esprit s’envole

souvent vers Dieu et nous serons forts. En elle, le Seigneur se révélera à

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nous, nous parlera cœur à cœur, nous poussera au bien. Par contre, si nous

la négligeons ou si nous ne l’accomplissons pas bien, aussitôt nous nous

sentirons plus faibles et moins disposés et ardents dans le service divin.

St Bernard disait au pape Eugène IV qu’il considérait perdu le jour où

il n’avait pas fait une bonne méditation.

Voulez-vous acquérir l’union avec Dieu ? Faites bien la Sainte

Méditation, mettez en elle toute votre application de l’esprit et les

affections du cœur. Dieu nous parlera, poussera notre cœur à avancer

d’une nouvelle ardeur dans notre perfection.

b) La pureté d’intention : agir pour la gloire de Dieu1706 En offrant à Dieu ses actions, dans l’ensemble et chacune en particulier. Disons : « Voilà, tout cela est pour toi, Seigneur, tout pour toi ». Que ces paroles sont profitables pour rendre précieuses nos activités et pour en purifier l’intention !

Un deuxième moyen efficace pour acquérir l’union avec Dieu, c’est de

renouveler souvent la pureté d’intention : chaque matin nous offrons toute

la journée à Dieu, mais il sera plus profitable de s’habituer à faire cette

offrande à chaque action, à l’exemple de St François de Sales qui offrait

au Seigneur même les actions les plus banales en disant « tout pour vous,

Seigneur ! »

c) Voir Dieu en toute chose1707 En voyant Dieu en toute chose. Les créatures sont en effet un reflet de Dieu. Elles nous parlent de ses qualités divines : les sons, la beauté de la création, les fleurs, les astres, la bonté des repas et, surtout, les confrères eux-mêmes.

Vous devez vous habituer à voir Dieu en toute chose. Tout peut être le

reflet de la grandeur de Dieu, de sa sagesse infinie et de son immense

amour. « Les cieux proclament la gloire de Dieu, le firmament raconte

l’ouvrage de ses mains » (Ps 18,2).

1708 Nous savons que quand Ste Catherine de Sienne s’émouvait en voyant une fleur. Elle s’exclamait : « Le Seigneur, depuis l’éternité, a pensé à toi et il t’a créée pour me faire plaisir ». Le père Alphonse Rodriguez1 raconte l’anecdote d’un saint religieux qui frappait avec une canne les fleurs et les herbes qu’il rencontrait sur son chemin, en

1 Conforti fait référence ici à l’ouvrage suivant, très célèbre en son époque : Alphonse

RODRIGUEZ sj (1532-1617), Pratique de la perfection et des vertus chrétiennes. Le

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disant : « Silence ! Ça suffit ! Votre manière de rendre gloire à Dieu par votre parfum et pas vos couleurs resplendissantes, me reproche de ne pas assez glorifier Dieu autant que vous ! ». La vie de St François d’Assise, elle-même, est pleine de ces exemples.

Partout, « l’œil de la foi » nous permet de voir Dieu : les fleurs, les

fruits, la magnificence de la nature, tout cela nous pousse à l’union avec

Dieu.

Demandons-nous, maintenant : pourquoi ne savons-nous pas lire dans

le livre magnifique de la nature qui est toujours ouvert pour nous tous ?

Parce que nous négligeons la réflexion. Habituons-nous à lire dans ce

grand livre : il nous apprendra, avec la parfaite union avec Dieu, la

perfection à laquelle nous aspirons.

d) Interroger notre foi1709 En interrogeant notre foi, en toute rencontre et circonstance, si bien que la foi, par la grâce de Dieu, nous instruira toujours.

Discernez toute chose avec le regard de la foi, les événements heureux

et malheureux. Alors la foi sera pour vous l’écho de Dieu, la parole même

de Dieu, le signe sûr par lequel vous serez aimés par Dieu. Discernez donc

tout avec l’œil de la foi, en toute circonstance et incertitude.

e) Penser à Jésus Christ en toutes nos rencontres1710 En pensant à Jésus Christ, surtout en réfléchissant, en parlant et en agissant comme lui-même aurait réfléchi, parlé et agi (cf. Ph 2,1-5).

Voulez-vous un autre moyen pour grandir dans la parfaite union avec

Dieu ? Pensez à Notre Seigneur Jésus Christ. Réfléchissez de la même

manière que lui-même aurait fait. En toute circonstance, agissez comme

Jésus aurait agi et vous trouverez une réponse sûre. C’est bien lui, le vrai

et unique modèle de perfection infinie, la forme idéale de tous les états de

vie, les conditions, les âges et le modèle de toutes les perfections qui

s’élèvent au rang divin. En Jésus il y a le modèle pour les enfants, les

jeunes, les adultes, les pauvres, les riches et surtout pour les prêtres : il est

l’exemple d’un parfait détachement de toute chose d’ici-bas. Pensez

père Dagnino sx présente cet ouvrage comme suit : « Le traité plus classique et complet

de l’ascèse chrétienne est le célèbre chef d’œuvre de Rodriguez, L’exercice de la

perfection et des vertus chrétiennes (1609). (…) Dans mon Noviciat, 1934-1935 ce livre

était encore lu quotidiennement et cette lecture était si importante que chacun devait en

faire un résumé » (Amato DAGNINO, Il cantico dell’amore, éd. Paoline, Torino 1990,

p. 9).

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comment Jésus Christ aurait agi : vous allez acquérir, à court terme, la plus

haute perfection.

f) Formuler souvent des jaculatoires1711 En répétant fréquemment des jaculatoires. Elles sont comme autant d’aspirations vers le ciel.

g) Ne pas se négliger1712 Si nous agissons de la sorte, nous accomplirons le bien pour les autres sans négliger le nôtre. Nous ressemblerons ainsi à un oiseau qui se pose au sol pour reprendre force de ses vols sublimes. Nous traverserons la boue sans nous salir. Nous descendrons au plus bas des périphéries de l’existence, pour conduire au plus haut les autres. Nous serons comme la colombe qui sortit de l’arche de Noé et qui retourna vite car elle n’avait pas où se poser, sans se noyer. N’imitons pas le corbeau qui, par contre, n’est plus rentré dans l’arche.

Prenez garde de penser aux autres sans penser à vous-mêmes. Soyez

comme l’oiseau qui, pour quelques instants, se pose à terre avant de se

soulever à des plus grandes hauteurs en entraînant même ses compagnons.

Imitez la colombe de Noé qui ne s’est pas posée au sol pour ne pas

s’embourber et qui a préférée rentrer dans l’arche ; par contre, le corbeau

sortit de l’arche sans plus y rentrer car il préféra se nourrir des cadavres.

Voilà donc le noviciat, un temps propice et convenable pour vous

habituer à l’union avec Dieu.

Ne pas lâcher prise 1713 Nous travaillerons alors toujours pour la plus grande gloire de Dieu. Notre ministère sera fécond.

1714 Nous ne dirons jamais : « ça suffit ! », car nous aurons toujours la soif de la justice, la soif des âmes.

1715 Nous ne lâcherons jamais prise. Nous avons vu des prêtres se donner avec enthousiasme aux œuvres externes du ministère, mais, une fois plongés dans le tourbillon des affaires, ils ont oublié leur sanctification et ils devinrent comme du sel sans saveur, ils abandonnèrent la charrue jusqu’à défectionner parce que surgirent contre eux les passions qu’ils ont combattues chez les autres mais qu’ils n’ont pas combattues en eux-mêmes.

Dans les voies ordinaires du Seigneur, il peut nous demander

incessamment de nous efforcer toujours davantage pour avancer dans la

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perfection, puisque « non progredi est regredi », ne pas avancer c’est

reculer. C’est une conviction des Saints, mais qui a été confirmée maintes

fois par les hommes apostoliques et, même, par chacun de nous.

Nous avons connu des missionnaires qui faisaient un grand bien, mais

qui, par la suite, ont abandonné le sillon et la charrue jusqu’à défroquer,

voire apostasier et se mettre contre la religion. Quelle en fut, selon vous,

la vraie raison ? Faites la philosophie de l’histoire et vous verrez que

« personne ne précipite au fond de l’abîme subitement ». Ils ont oublié de

prendre soin, de penser résolument et correctement au soin d’eux-mêmes.

Peu à peu, s’est donc affaibli en eux l’esprit de prière. Ils se sont sentis

inégaux à leur devoir, impuissants parce qu’ils n’ont pas su puiser la force

dans la prière, ni chercher l’union avec Dieu. Chers jeunes, que cela ne

vous arrive jamais.

Priorité sur la vie intérieure 1716 Aux yeux de Dieu, mettons la priorité sur la vie intérieure plutôt que trop nous centrer sur l’extérieur et sur la vie active.

1717 Dieu est le maître de tout, mais la priorité doit être mise sur la vie intérieure. Les œuvres externes ne sont qu’une faible expression de la profondeur de la vie intérieure.

Je ne vous cite qu’un exemple. Regardez Pierre : plein d’une sainte

ardeur, il avait promis de suivre Jésus jusqu’à mourir pour lui. Mais il est

tombé parce qu’il n’a pas su prier ni veiller. Il a perdu l’oraison et l’énergie

et, au moment de l’épreuve, non seulement, il abandonna son Maître,

comme les autres ont fait, mais il le renia à trois reprises.

1718 Considérons la vie d’ici-bas de Notre Seigneur Jésus Christ : 30 ans de recueillement, 3 ans d’apostolat, précédés par 40 jours au désert, et, souvent « il passait la nuit à prier Dieu » (Lc 6,12). Il disait à Marthe que sa sœur « avait choisi la meilleure part » (Lc 10,42).

1719 Les apôtres disaient : « Quant à nous, nous serons assidus à la prière et au ministère de la parole » (Ac 6,4).

1720 Tous les docteurs conviennent sur le fait de donner la priorité à la vie intérieure sur la vie extérieure.

Si nous ne prions pas, si nous ne veillons pas, nous irons vers notre

perte. Sans l’union avec Dieu, point de salut : nous n’irons que de ruine

en ruine.

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1721 « Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait » (Mt 5,48).

1722 Dieu donne à tout le monde sans s’appauvrir. Ainsi, en quelque sorte, l’apôtre devrait agir. L’âme de l’apôtre doit d’abord être inondée par la lumière pour pouvoir la transmettre aux autres.

En synthèse, voici comment grandir dans l’union habituelle avec Dieu 1723 Faire la méditation ; 1724 Renouveler l’intention d’agir pour la gloire de Dieu ; 1725 Voir Dieu en toute chose ; 1726 Interroger notre Foi ; 1727 Penser à Jésus Christ en toutes nos rencontres ; 1728 Formuler souvent des jaculatoires.

Cherchez à tirer du profit de cet enseignement et à acquérir l’union

habituelle avec Dieu depuis votre temps du noviciat.

Elle sera pour vous comme un bon oxygène que vous stockez et qui

sera pour vous d’une grande utilité et qui servira à rendre votre apostolat

fécond d’un grand bien.

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Vanzin P. Callisto

Le leader avisé,

marqué par une noblesse de tempérament et une agilité spirituelle,

une soif de reproduire l’esprit de Conforti

et de connaître les nouvelles expressions de la mission,

capable de décliner la mission avec la culture,

toujours tourné vers l’avenir

Né le 21.01.1900 à Villotta (Pordenone), entré à Parme le 16.10.1914, ordonné prêtre le 29.06.1922, envoyé en Chine le 16.11.1924, où il fut aussi recteur du Grand Séminaire de Loyang. En 1930, il fut appelé en Italie pour le service de supérieur de communauté et au service de la presse missionnaire et des Congrégations Romaines. Après 5 ans au Congo (1969-1974), il meurt à Rome le 30.10.1976.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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9. Aridité et scrupulesParme, ISME, 28 avril 1921

INTRODUCTION L’union avec Dieu et l’épreuve

Quand une âme n’est pas habituellement unie à Dieu, il lui arrivera

d’être comme une bouteille de vin ou de n’importe quelle liqueur qui, une

fois enlevé le bouchon, perd la vigueur et tout le vin devient du vinaigre.

Le Seigneur dit : « Si le sel perd sa saveur, avec quoi la lui rendra-t-on ? »

(Mt 5,13). Si nous perdons l’union avec Dieu, avec quel profit pouvons-

nous servir les autres ? Devient du sel sans saveur celui qui oublie de

demeurer avec Dieu, de qui vient la force et la lumière pour faire le bien,

d’abord pour soi et puis pour les autres.

Il faut bien que nous nous rendions compte que, de nous-mêmes, nous

ne savons rien faire. Jésus l’a bien dit : « Sans moi, vous ne pouvez rien

faire » (Jn 15,5). Sans cette union, dit un saint père, nous serons comme

l’eau du baptême qui agit bien sur celui qui est baptisé, mais puis elle

même tombe en terre et elle est piétinée.

Mais pour parvenir à cette union avec Dieu, il faut passer souvent par

des épreuves, face auxquelles vous devez toujours être vigilants.

L’heure de l’épreuve 1728bis « Mon fils, si tu viens te mettre au service du Seigneur, prépare-toi à subir l’épreuve » (Sir 2,1).

C’est très simple de dire « vie intérieure ». Mais elle demande à tous

d’affronter l’épreuve et la lutte. « Prépare-toi à affronter la tentation ».

Deux sont, en particulier, les épreuves que doivent affronter ceux qui font

la profession de vie parfaite : la première est commune à tous les Saints,

et l’autre n’est pas fréquente, mais elle peut arriver même aux âmes très

belles. La première est l’aridité spirituelle, la seconde est le scrupule.

Je vous parlerai de l’une et de l’autre, afin que vous sachiez comment

vous régler, sans vous décourager.

1. L’ARIDITÉ D’ESPRIT1729 Depuis toujours, Dieu a l’habitude de favoriser les âmes bonnes en leurenvoyant des consolations. Mais aux consolations succèdent, par la suite, desdésolations et des épreuves.

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La première épreuve, qui en différentes manières a fait souffrir les

Saints, est l’aridité spirituelle.

À ceux qui se donnent au service divin, le Seigneur offre d’abord la

dilatation du cœur et l’illumination de l’esprit. Il fait voir la beauté de la

perfection. Tout paraît savoureux, facile jusqu’à dire comme le scribe :

« Je te suivrai partout où tu iras » (Mt 8,19).

Mais, par la suite, pour les mettre à l’épreuve, il se retire si bien qu’à

la lumière se succèdent les ténèbres, à l’énergie suit l’inertie.

Manifestations de la sécheresse spirituelle 1730 L’intellect ne voit plus la beauté du service de Dieu ni les raisons d’atteindre la perfection, en se trouvant ainsi dans un état de ténèbres.

1731 La volonté ne sent plus aucun élan vers le bien, elle ne sait aboutir en aucune bonne résolution, en se trouvant comme dans l’inertie, incapable de fournir d’effort.

1732 La mémoire semble ne plus savoir évoquer à l’esprit les vérités éternelles ni les bénéfices de Dieu : elle-même entraîne dans un état d’inertie.

1733 L’appétit inférieur trouve de la répugnance pour la vertu, pour le bien, pour les pratiques de piété.

On ne voit plus la beauté de la perfection, on ne comprend plus rien

dans le domaine spirituel. Tout paraît impossible à la volonté. La mémoire

n’a plus d’énergie pour rappeler les pensées qui motivent la volonté. La

partie inférieure ne voit qu’obscurité, ténèbres, difficultés : il est

impossible de persévérer dans le bien. L’âme se retrouve dans un état

d’angoisse aussi bien en ordre à ses puissances qu’en ordre à la partie

inférieure.

1734 L’âme réduite à cet état se trouve comme abandonnée par Dieu. Souvenez-vous de Ste Catherine de Sienne qui, pendant des années, fut

tourmentée par une grave aridité spirituelle jusqu’à croire d’avoir été

abandonnée par Dieu. Une fois, elle se jeta la face contre terre, en

s’exclamant : « Pourquoi, Seigneur, permettez-vous que je vive dans cet

état ? Pourquoi m’avez-vous abandonnée ? ». Et le Seigneur lui apparut

en lui disant : « J’étais plus proche que ce que tu pensais. Je me réjouissais

en te voyant supporter cet apparent éloignement ». Et, à partir de cet

instant-là, la paix parfaite revint, dans son esprit surgit le ciel serein et son

cœur ressemblait à une mer parfaitement calme.

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Nous pourrions dire de même chez St François de Sales : lui aussi,

opprimé par la sécheresse spirituelle, dans un moment de désolation, voire

de désespoir, il se prosterna devant l’autel de Marie et il récita la belle

prière Memorare de St Bernard1. Aussitôt la paix revint chez lui.

1735 Entretemps, le démon, qui pêche dans l’eau trouble, tente l’âme avec le désespoir, lui rappelle son passé. Il la maltraite avec mille pensées horribles. Et, tandis qu’il provoque les tentations, il suscite également le doute si consentir ou pas. Ainsi, s’il ne fait pas tomber l’âme, il lui empêche le bien qu’il pourrait faire si elle possédait le calme d’esprit.

Le démon voit alors l’opportunité pour faire sa part. Il suscite des

doutes et des peurs par rapport au passé, en exagérant les fautes. Il montre,

par rapport à l’avenir, la vertu impossible. Il réveille en nous des pulsions

pour faire reculer l’esprit, pour nous convaincre que nous n’aimons pas

Dieu, que nous ne fournissons pas assez d’effort pour servir Dieu et, à ce

niveau, il suscite en nous le doute d’avoir consenti au péché si bien que

les doutes et les peurs, peu à peu, nous feront précipiter vers le bas.

Remèdes contre la sécheresse 1736 Quoi conseiller ? Portez patiemment l’heure qui passe, l’épreuve. Ne perdez pas la détermination.

Si, vous aussi, vous serez un jour visité par l’aridité d’esprit, ne vous

découragez pas. Attendez avec confiance. Offrez tout au Seigneur. Dites :

« Je vous offre ces peines pour la réparation de mes péchés. Je ne peux

rien faire de moi-même, je ne parviens pas à penser à vous. Mais je ne

souhaite que de vous plaire ». C’est le plus beau sacrifice que vous pouvez

faire, encore plus beau que cent jeûnes ou de cent pénitences que vous

pouvez faire. Ces épreuves peuvent vous offrir l’occasion de nombreux

mérites.

Dans l’aridité, nous devons nous confronter avec le mauvais temps.

Comme dans la mauvaise saison, quand il y a le grand brouillard, tombe

la pluie si bien que même le physique en ressent les conséquences, nous

1 “Memorare” (Souvenez-vous) est une prière adressée à la Vierge Marie. Elle fut

composée au XII siècle par St Bernard de Clairvaux. Voici le texte : « Souvenez-vous, ô

très miséricordieuse Vierge Marie, qu'on n'a jamais entendu dire qu'aucun de ceux qui

ont eu recours à votre protection, imploré votre assistance ou réclamé vos suffrages, ait

été abandonné. Animé d'une pareille confiance, ô Vierge des vierges, ô ma Mère, je cours

vers vous, je viens à vous et, gémissant sous le poids de mes péchés, je me prosterne à

vos pieds. Ô Mère du Verbe ne rejetez pas mes prières, mais écoutez-les favorablement

et daignez les exaucer. Ainsi soit-il ».

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ne pouvons que nous réjouir en pensant que le beau temps viendra un jour.

Mais, pour l’instant, bon gré mal gré, il faut résister à ces intempéries,

confiants que le beau temps va bientôt venir. S’il pleut, on reste chez soi.

S’il y a mauvais temps, on n’effectue pas un long voyage. Ainsi, vous

devez vous maîtriser pendant les moments de l’aridité de l’esprit.

À ce propos, St Ignace disait : « dans les moments d’aridité, ne prenez

aucune délibération, ne faites aucune bonne résolution parce que vous

n’avez pas assez de calme pour bien le faire »1. Tenez-vous plutôt aux

pratiques et exercices que vous avez déjà l’habitude de faire. Demeurez

dans le bon « statu quo ».

Le temps de la sécheresse n’est donc pas le moment pour formuler des

résolutions en dehors de l’ordinaire. Bien sûr, nous pouvons choisir des

bonnes résolutions habituelles avant toute action, mais, je répète, ne

faisons rien d’extraordinaire. Pour voyager, il faut attendre le serein et le

calme. Alors, vous pouvez délibérer, selon la conscience et selon le conseil

du père spirituel, sûrs de mieux percevoir la réalité qu’auparavant.

Je me souviens d’un bel exemple d’un Saint à propos de l’aridité. Il

invitait à voir la surface de l’eau de la mer, quand elle est calme et non

agitée par les vagues. Alors les plantes et les fleurs qui sont au rivage se

voient dans l’eau comme dans un miroir. Mais si l’eau s’agite… aussitôt

nous voyons que tout change et se bouleverse, comme s’il allait se briser

ou se détruire. En réalité, les plantes et les fleurs sont toujours là. Ainsi il

arrive pour les choses de l’esprit pendant l’aridité où on ne comprend plus

rien et où tout paraît très bizarre.

Il faut donc que vous ayez beaucoup de patience. Accueillez l’aridité

comme un bénéfice du Seigneur pour nous faire connaître notre misère et

pour savoir en tirer des mérites, en l’offrant au Seigneur en réparation de

nos péchés.

2. LE SCRUPULE1737 Le scrupule est un doute sans fondement, une vaine appréhension, unepeur exagérée d’avoir péché.

Le scrupule est l’autre épreuve que le Seigneur présente à ceux qui se

donnent au service divin. Elle n’est pas si fréquente que la première.

Le scrupule est un doute sans fondement, une peur exagérée d’avoir

péché. Combattons cela et cherchons à savoir comment ce sentiment peut

nous troubler.

1 cf. IGNACE DE LOYOLA, Exercices spirituels, 1ère semaine, 5ème règle.

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Symptômes 1738 Les symptômes du scrupule sont les suivants : changer à chaque moment d’avis sur la licéité ou pas d’une action, s’égarer dans des réflexions minutieuses en négligeant peut-être des choses plus graves, montrer un grand attachement à son opinion personnelle, agir toujours avec anxiété.

Le scrupuleux change souvent d’avis sur l’opportunité d’une action :

puis-je la faire ou dois-je l’éviter ? Ainsi, le doute et la peur surgissent. En

même temps, le scrupuleux tient mordicus à son avis jusqu’à rejeter toutes

les autres argumentations.

Le scrupule surgit à cause de l’orgueil, mais, normalement, il vient

d’une des causes suivantes : soit de Dieu, soit de la nature, soit du démon.

Causes des scrupules 1739 Les scrupules peuvent venir de Dieu pour éprouver, pour expier les fautes du passé, pour maintenir l’humilité. Ils viennent de Dieu quand ils viennent de l’amour de Dieu, de la peur de l’offenser.

Dans ce cas, Dieu veut éprouver l’âme en lui donnant l’occasion de

grandir dans la vertu, d’expier les fautes du passé, de s’exercer dans

l’humilité et dans la connaissance de sa misère et de son inconstance. Nous

reconnaissons que le scrupule vient de Dieu quand notre âme est angoissée

pour une peur exagérée d’offenser Dieu.

1740 Ils peuvent venir de la nature : par exemple, un tempérament mélancolique, une imagination intense, une finesse d’esprit qui porte à tergiverser, un orgueil encore plus épais.

Dans ce cas, le scrupuleux manifeste un tempérament mélancolique et

il voit tout sombre. Il se laisse conduire par une structure mentale qui tend

au sophisme si bien qu’en voulant trop pondérer la réalité, il parvient à

douter et à revêtir d’ombres les corps.

1741 Ils peuvent venir de l’esprit du mal. Cet ennemi de notre bien observe attentivement nos penchants vicieux et cherche à entrer dans l’âme par la porte la plus fragile. S’il voit quelqu’un disposé à la détente, il suggère de donner l’importance aux choses banales de manière à négliger les plus importantes. S’il voit une âme rigide qui tend à la perfection, il lui rappelle les doutes sur le passé et sur le présent.

Si la cause du scrupule est le démon, il faut savoir que celui-ci est très

avisé. On dit que depuis notre naissance, il prévoit nos tendances et

passions en observant nos humeurs et notre corpulence.

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Malheureusement, il se trompe très souvent, surtout avec les Saints. Il agit

comme le capitaine qui, quand il doit combattre une forteresse, cherche

toujours à attaquer le côté faible et sur ce front-là il concentre toutes ses

énergies.

Selon la nature de tout un chacun, le démon peut tenter au laxisme, en

lui mettant les scrupules qui le poussent à relativiser les petites choses pour

le forcer, par la suite, à des graves transgressions. Il peut même tenter au

rigorisme, en faisant exagérer les péchés, en mettant des doutes et des

peurs sur le fait que l’âme se soit effectivement bien repentie.

Observez donc bien de quel côté le scrupule peut surgir : s’il vient de

Dieu, priez qu’il vous en délivre. S’il vient de la nature, étudiez pour vous

corriger. S’il vient du démon, luttez contre cette partie où vous vous

reconnaissez plus faibles.

Remèdes contre les scrupules 1742 Remèdes : la prière humble, fervente, confiante ; l’obéissance aveugle aux conseils du Directeur Spirituel ; la fuite de l’oisiveté pour mener une vie continuellement active ; mépriser toutes les pensées tristes jusqu’à les chasser de sa vie. « Le Seigneur n’est pas dans le tremblement de terre » (1R 19,11). « Servez le Seigneur dans l’allégresse » (Ps 99,2).

Les moyens plus efficaces pour combattre les scrupules sont, d’abord,

la prière humble et confiante : ce n’est que la prière qui peut éclairer

l’esprit et fortifier le cœur.

Ensuite, abandonnons-nous au discernement du Maître de l’esprit. Le

proverbe dit « les contraires se guérissent par les contraires », (contraria

contrariis curantur), parce que souvent le scrupule vient de l’orgueil.

« Espérez contre toute espérance » (Rm 4,18). Celui qui s’abandonne

complètement entre les mains du Père spirituel, il ne tardera pas à résoudre

l’épreuve.

Enfin, il faut procurer une laboriosité continue qui ne permette pas à

l’imagination de donner un corps aux ombres. Celui qui travaille sans

cesse, il n’a pas le temps pour penser aux scrupules. Voilà pourquoi, dans

les Instituts de vie contemplative, il est facile de trouver des âmes

scrupuleuses, parce qu’en ces lieux, le calme continue permet à

l’imagination de divaguer, surtout chez les moniales où le cœur prime sur

l’intelligence et le sentiment sur la raison.

Ces trois moyens sont les meilleurs, même si les pères spirituels en

donnent d’autres. Un jour, un évêque était tourmenté par des scrupules. Il

alla demander conseil chez plusieurs personnes, mais personne ne parvint

à le persuader. Alors, il décida d’aller chez le pape Léon XIII. Le pape

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l’écouta avec patience. Mais, le Pape, en voyant que lui-même ne

parvenait pas à le convaincre et qu’il avait d’autres choses à faire, dit à

l’évêque : « Eh bien, faites ceci : choisissez un directeur spirituel bien

éclairé et pieux. Puis faites exactement tout ce qu’il vous dira ». Et ainsi,

l’entretien se termina.

Exhortations finales Disons avec St Philippe Neri : « Scrupules et mélancolie, je n’en veux

pas dans ma maison ». Celui qui sert Dieu doit être heureux. Laissons que

ceux qui servent le monde cherchent leur bonheur. Mais nous, aimons

répéter la phrase de Saint François d’Assise : « Il est si grand le bien qui

m’attend, que toutes les peines sont ma joie »1.

Que votre vertu soit toujours sereine. Quand je vois un jeune content,

je vois en lui des grandes espérances, tandis que si je le vois toujours

mélancolique et triste, il me rend triste, moi aussi.

Si vous déplorez donc quelques misères, ne vous en faites pas : ayez

confiance au Seigneur. Il n’est pas mesquin comme nous.

Pensez à l’exemple et aux paroles de Notre Seigneur au bon larron :

« Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis » (Lc 23,43). « Servez le

Seigneur dans l’allégresse » (Ps 99,2).

Même quand vous serez Missionnaires, privés des aides que vous

recevez ici au noviciat, tant que vous serez heureux et que vous ferez

comme je vous ai dit, vous résisterez facilement, malgré les tentations du

démon et vous direz avec assurance : « Élevons nos cœurs ! » (Sursum

corda).

Toute la sainteté consiste en accomplissant son devoir. Ne cherchons

pas d’autres consolations. Cherchons plutôt le Dieu des consolations.

Ainsi vos œuvres seront plus fécondes : elles deviendront comme de l’or

précieux que vous trouverez comme ornement dans le grand livre de la

vie.

1 Conforti cite cette celèbre locution franciscaine en italien : “Tanto è il bene che mi

aspetto che ogni pena mi è diletto”.

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Fontana P. Lorenzo

Musicien talentueux, doué d’une oreille musicale très fine,

il apprit la langue chinoise à la perfection.

Formateur aimable,

Maître des novices d’une grande affection envers l’Institut,

il fut apprécié comme homme des idées larges,

très respectueux des Confrères, semeur de joie et de bonheur.

Né le 03.10.1901 à Sulpiano (Turin), entré à Parme le 17.10.1914, ordonné prêtre le 05.10.1924, envoyé en Chine le 16.11.1924, il y resta de manière ininterrompue pendant 26 ans et il y vécut trois ans dans un camp de concentration (1943-1945). En 1950, appelé en Italie pour le service de formateur, il savait créer un climat de famille et de confiance réciproque. Il meurt à Parme le 22.01.1990.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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10. Sanctification des actions ordinairesParme, ISME, 4 mai 1921

Introduction : tout pour la gloire de Dieu 1743 L’âme religieuse cultive son intériorité et son désir de sainteté non seulement dans les retraites mais aussi dans les actions les plus communes. « Tout ce que vous faites : manger, boire, ou toute autre action, faites-le pour la gloire de Dieu » (1 Co 10,21).

Il ne vous est pas demandé seulement la perfection dans les œuvres de

piété, c’est-à-dire, dans ces choses qui sautent aux yeux, mais encore dans

les petites observances de la vie quotidienne, qui passent souvent

inaperçues, mais que vous devez aussi transformer par l’esprit de foi,

parce que, l’Esprit Saint dit : « Celui qui est juste à mes yeux par la foi

vivra » (He 10,38) ; et l’apôtre St Paul : «Tout ce que vous faites : manger,

boire, ou toute autre action, faites-le pour la gloire de Dieu » (1Co 10,21).

La vie doit être un entrainement continu pour faire trésor des mérites

pour le ciel. En vous, tout doit être guidé par le regard surnaturel. Rien ne

doit révéler des bassesses humaines.

L’Évangile, expliqué par Papini1, fait voir comment Jésus Christ a

voulu toujours diviniser l’homme. Et c’est correct : la vie doit être un

entrainement permanent aux vertus, un investissement spirituel continu,

pour que nous ne soyons pas reprochés, un jour, d’être des serviteurs

paresseux.

1. NÉGLIGER LES PETITES CHOSES : TROIS CONSÉQUENCES1744 Notre vie est un croisement continu d’œuvres, de telle sorte qu’ellesdevraient former comme une belle chaînette d’or. À chaque acte vertueux,correspond un degré de grâce et à chaque degré de grâce un degré de gloirepour le Saint Paradis. Celui qui néglige cela, dit un illustre écrivain, prépare unemort plus triste, un jugement plus sévère, un châtiment plus rigoureux.

1 Giovanni Papini (1881-1956) publie en 1921 son best-seller : L’histoire du Christ. Il

relate, à la façon d’un journal de bord, la rencontre décisive de Papini avec le Christ,

personne vivante, découverte dans les Évangiles et qui a abouti à sa conversion.

L’allusion de Conforti au livre de Papini, écrit la même année de sa conférence aux

novices, montre comment le Fondateur suivait l’actualité littéraire.

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Celui qui néglige un tel exercice, tend rapidement vers une mort plus

amère : tout en n’ayant pas des fautes graves, en jugeant à notre manière,

nous serons désolés de ne pas avoir profité de toutes les occasions pour

acquérir des mérites. Si les Saints pouvaient exprimer un regret au Paradis,

ils montreraient comment ils n’ont pas pu être encore plus ardents dans les

petites choses. S’ils pouvaient revenir sur la terre et travailler jusqu’à la

fin du monde, et tout cela pour le seul mérite d’une Ave Maria,

certainement ils le feraient, parce qu’à chaque petit mérite, correspond un

degré de gloire majeure.

Ceux qui négligent les petites choses, se préparent à un jugement plus

rigoureux : c’est sûr, le Seigneur demandera un compte rendu plus exigent

à nous qui avons été immergés dans les grâces par rapport à un pauvre

paysan ou à un broussard ou un illettré.

Celui qui néglige les petites choses se procure un châtiment plus sévère

que celui qui n’a pas étudié, qui a vécu au milieu du monde, sans qu’il

s’aperçoive que d’autres personnes pouvaient compter sur lui.

2. TROIS ACTIVITÉS COMMUNES ET INAPERÇUES, PRÉCIEUSES ET À SANCTIFIER

La pureté d’intention et la glorification de Dieu 1745 Pour rendre méritoires nos actions, il faut la pureté d’intention, et nous aurons la pureté d’intention si nous référons tout à la plus grande gloire de Dieu. Nous appartenons à Dieu par le droit de la création, d’acquisition, d’élection et encore plus comme religieux. Cela demande que nous adressions à Dieu toutes nos actions.

Sanctifier les œuvres les plus ordinaires 1746 L’ennemi le plus terrible des œuvres est l’amour propre. J’ai dit que nous devons sanctifier aussi les œuvres les plus ordinaires, telles que le repos, le sommeil, les repas, les récréations.

Mais quels sont ces éléments que vous devez bien retenir pour grandir

dans la sainteté ?

Je ne vous parle pas des études, comme parmi les plus importants, car

vous y êtes déjà persuadés. Mais je souligne les choses les plus communes

et inaperçues que nous pouvons rendre précieuses et les sanctifier.

Et, en parlant maintenant en général, en toute occasion, ayez toujours

l’intention droite de tout faire pour la plus grande gloire de Dieu.

En faisant abstraction même de l’état surnaturel, dans lequel nous

devons toujours opérer, la raison humaine elle-même nous donne cet

avertissement, car nous avons tout reçu de Dieu. Mais nous devons

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toujours garder à l’esprit que nous sommes aussi chrétiens : en Dieu,

Créateur, nous avons à voir le Rédempteur qui a voulu spontanément nous

choisir pour son divin service par la grâce du baptême, et il nous a voulus

religieux, à un état donc où on nous demande plus de perfection.

Concrètement, je me limite à vous indiquer trois éléments que vous

cultiverez pour en tirer un bon profit sur le chemin de la sainteté : le repos,

la réfection et la recréation. Étudiez la manière pour les rendre méritoires

et fructifiez-les de la meilleure manière.

a) Le reposLe sommeil est une nécessité à laquelle nous tous nous devons nous

soumettre.

Comment sanctifier le sommeil, le repos ? Nous occupons dans le repos (dans le sommeil) une troisième partie de la journée et donc une troisième partie de notre existence. Il faut donc sanctifier ce temps. Comment ? - en prenant le repos pour récupérer les forces et mieux servir le Seigneur ;- en s’endormant avec des saintes pensées ou du moins bonnes, parce que

les pensées avec lesquelles nous nous endormons, seront celles qui nousferont réveiller ;

- en prenant le repos avec exactitude et en nous levant avec modestie, ensilence.

Sanctifiez le sommeil en ne vous accordant pas plus du nécessaire.

Maintenant vous avez la règle et l’horaire. Quand vous serez

missionnaires, vous aurez toujours votre règlement qui, tout en ne

précisant pas un temps exact à cause de différentes raisons, vous indiquera

toutefois une moyenne au-delà de laquelle vous ne devez pas dormir. Si le

manque de sommeil affaiblit l’esprit et le corps, même la surabondance

endormit l’intelligence et frustre le corps. Cherchez l’équilibre et cherchez

à respecter le règlement.

Prenez soin régulièrement de la modestie. Dieu est toujours présent, il

nous suit toujours et il nous voit. Ne prenons aucune position, même licite,

que nous ne prendrons pas devant une personne qui se respecte. St Paul

dit : « Que votre bienveillance soit connue de tous les hommes » (Ph 4,5).

Il est donc important de sanctifier le sommeil. Nous y passons un tiers

de notre journée, de l’année et de la vie. Combien de vie gaspillée si nous

ne pensons pas à le sanctifier. Dites toujours, avant de vous endormir :

ceci, o Seigneur, pour pouvoir mieux vous aimer et vous servir. Un Saint

avait l’habitude de dire : « Seigneur, autant de respirations je fais, autant

de palpitations je donne, autant je veux qu’elles deviennent des actes

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d’amour ». Le Seigneur aura certainement écouté ce désir. Pensez

maintenant combien de mérites aura gagné ce Saint-là.

Pourquoi vous ne pouvez pas le faire, vous aussi ? Ainsi, le sommeil

ne sera pas du temps perdu, même s’il occupe une bonne partie de notre

existence.

b) La réfection1747 La réfection est l’action la plus animale que nous accomplissons et quinous expose aux dangers majeurs. Elle présente d’abord le désir alléchant de lanourriture qui peut surgir en nous.Nous ne devons pas nous mettre à table avant le temps.Ensuite, pendant le repas, le danger se présente en le consommant avec uneavidité débordante, en se laissant aller à la sensualité.Enfin, il se présente après le repas, parce que le corps, en ayant récupéré desnouvelles forces, il est plus impétueux dans ses mouvements et nous avons uneplus grande difficulté à le soumettre.

Considérons d’abord que cette action nous parle de notre misère car

nous avons toujours besoin de nous alimenter pour pourvoir aux pertes

d’énergies. Que c’est misérable !

Nous devons en rendre gloire à Dieu. Le fait de manger présente

plusieurs dangers : avant, pendant et après le repas.

Avant, à cause du désir démesuré d’aller au repas, et donc on ne pense

qu’à seconder ce désir. Respectez l’horaire et vous vous y rendrez, sans

trop vous en faire avant l’heure.

Il y a ensuite le danger pendant le repas. Gardons toujours à l’esprit

que nous n’avons pas été créés pour manger et que nous mangeons pour

nous soutenir dans l’existence.

Il y a danger après le repas, car c’est le moment où le corps est bien

rassasié et plus susceptible aux tentations. Notre corps est comme un

cheval : plus tu le contentes, plus il te frappera du talon.

« Je châtie mon corps, disait l’Apôtre, afin qu’il ne me rende pas

esclave » (cf. 1Co 9,27)1. Nous aussi, mortifions-le par quelques petites

privations, sans l’exténuer, parce que nous devons le conserver pour les

fatigues apostoliques et donc nous avons une raison en plus pour ne pas

nous donner à trop de mortifications indiscrètes.

1 La traduction de la Bible liturgique dit : « Je traite durement mon corps, j’en fais mon

esclave, pour éviter qu’après avoir proclamé l’Évangile à d’autres, je sois moi-même

disqualifié » (1Co 9,27).

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Cependant, il vous sera très profitable de faire quelques mortifications,

tandis que vous vous asseyez à table, sans que personne ne s’en aperçoive.

Soyez-en sûrs : ce n’est pas une bouchée en moins, ou une gorgée en

moins, ce qui créera préjudice à votre santé. Au terme du repas, levez-

vous de la table avec toujours un peu d’appétit.

Ceux qui ont pu vivre pendant plus longtemps sont ceux qui ont dû être

sobres dans la consommation des repas. Au contraire, ceux qui ont

succombé au vice de la gourmandise, n’ont pas eu de longue vie.

1748 Et nous devons sanctifier cette action, d’abord en levant à Dieu notre prière, pendant qu’elle se déroule en alimentant quelques bonnes pensées, et après, en remerciant le Seigneur.

Tandis que vous vous nourrissez physiquement, cherchez également à

nourrir votre esprit, en faisant recours à la bonne pratique de la lecture

spirituelle.

Et puis, remerciez le Seigneur : tout est don de Dieu. Même Notre

Seigneur faisait toujours sa prière avec les apôtres. L’Évangile nous dit

que Jésus, avant de prendre le repas, il levait les yeux au ciel. Puis, à la

fin, il dit : « Après avoir chanté les psaumes, ils partirent » (Mc 14,26). Il

accompagnait toujours cette action par la prière. De cette façon, il rendait

méritoire aussi cette activité.

c) La récréation1749 Nous devons sanctifier aussi les recréations. Nous sommes faits pour vivreen société. Les récréations servent à élever l’esprit, à consolider l’unionfraternelle. Mais nos recréations doivent être toujours accompagnées par lamodestie religieuse et par la sage retenue (ritenutezza) ; qu’elles soientconsistantes et utiles. « Que votre bienveillance soit connue de tous leshommes » (Ph 4,5).

1750 C’est pendant les récréations que nous nous éduquons. Que les conversations soient consistantes et utiles. « Ce que dit la bouche, c’est ce qui déborde du cœur » (Mt 12,34). Choses utiles et édifiantes. Veillons sur les contestations, sur les blagues qui peuvent blesser la susceptibilité des compagnons et spécialement veillons sur la médisance et la murmuration.

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Que nos compagnons ne puissent jamais trouver dans nos actions

quelque chose qui ne leur soit pas d’édification. Parmi eux, vous devez

exercer l’apostolat du bon exemple, qui est le plus fécond de tous.

Pensez comment a été édifiante la conversation des Saints : quel est

grand le désir de converser comme eux ! Nous pouvons faire comme eux :

il suffit que nous nous engagions. Que vos discours soient toujours

respectueux. Je ne dis pas que vous devez parler toujours de piété, de

théologie, de philosophie, de littérature – ce serait une étude sans fin ! une

occupation incessante – mais nous ne devons pas nous abandonner à des

bassesses. La bouche parle toujours de l’abondance du cœur. Qui est du

monde parle toujours des choses mondaines. Le marchant parle toujours

de ses affaires. Nous devons être tous surnaturels, et, tout en étant joyeux,

il ne doit y avoir rien en nous de vulgaire, d’indiscret, de désordonné.

Prenez garde surtout des défauts qui peuvent blesser aussi bien la

charité que l’équilibre. Il est très facile de laisser introduire en nous des

sympathies et des antipathies, cependant nous devons être supérieurs à ces

choses et, en tous nos frères, cherchons à honorer l’image de Dieu et des

divines perfections. Que rien ne blesse la reine des vertus, qui est la

charité. Comme je vous l’ai déjà dit en d’autres occasions, prenez garde

car, dans le domaine de la charité, il est très facile de tomber dans l’erreur,

même gravement.

AIMEZ-VOUS, RESPECTEZ-VOUS !

Deux belles vertus à concilier Aimez-vous comme des frères ! Aimez-vous comme des frères puisque

vous avez tant de raisons de vous appeler ainsi.

Respectez-vous comme des princes, toujours reconnaissants et ayant le

sentiment de votre grandeur. Qu’y a-t-il de plus grand qu’un ministre du

Très-Haut ? Vous-mêmes, selon un saint, vous êtes des dieux et fils du

Très-Haut. Mais votre amour sera un amour noble : pas de discordes, pas

de confidences indiscrètes. Vous vous aimerez et vous vous respecterez

en sachant ainsi concilier ces deux belles vertus.

La médisance Il semble souvent de ne pas pouvoir parler sans diminuer les talents et

les vertus de notre prochain. Dans la médisance, il y a deux manquements :

pèche celui qui murmure et pèche celui qui écoute, parce qu’ainsi donne

l’occasion à l’autre de murmurer. On dit que ce défaut est répandu chez

les prêtres. Je ne veux pas juger, mais il y a certainement des causes pour

que cela arrive : parce que nous formons une caste à part, parce qu’en

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donnant des leçons de morale aux autres, nous nous sentons assez portés

à les observer et donc, aussitôt, nous relevons leurs défauts, ou bien, parce

que nous sommes toujours en relation avec la loi de Dieu et que nous

sommes portés à observer les détails, plus que les gens du monde. Quoi

qu’il en soit, la médisance est toujours quelque chose de désagréable à

tous, et elle est déplorée par tous les maîtres d’esprit.

Rendons-nous compte que nous n’avons pas moins de défauts des

autres. Sachons-les regretter si nous voulons être acceptés par nos frères.

Tous s’éloignent de la personne médisante : ils savent que si aujourd’hui

elle crache sur une personne, demain elle pourra faire de même sur eux.

Par contre « la charité couvre une multitude de péchés » (1P 4,8) !

Rappelez-vous de l’image de la sacoche que nous portons au dos : les

défauts des autres sont comme la partie extérieure et visible de la sacoche,

alors que les nôtres sont dans la partie intérieure. Nous ne voyons alors

que les défauts des autres, même s’ils sont moindres et plus légers.

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Lampis P. Angelo

Missionnaire laborieux et très courageux

dans un contexte de persécution et de tortures,

jusqu’à devenir un lumineux « Aumônier des brigands »

Né le 31.08.1901 à Arbus (Cagliari), entré à Parme le 15.09.1916, ordonné prêtre le 05.10.1924, envoyé en Chine le 16.11.1924, où il fut appelé, « Père lumineux »: il a travaillé souvent au milieu de l’insécurité des « brigands » et il passa une année dans un camp de concentration (1944-1945). Expulsé en 1952, il travailla en Italie comme supérieur de communauté et directeur spirituel. Il meurt à Parme le 06.05.1973.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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11. PrudenceParme, ISME, 13 mai 1921

VERTUS CARDINALES 1751 La foi nous dit que dans le Baptême nous avons reçu l’habit des vertus théologales, et, comme appendice, comme conséquence et comme corollaire, même l’habit des vertus morales. Toute notre perfection consiste dans l’exercice des unes et des autres. Après vous avoir parlé des vertus surnaturelles, théologales, je vous parlerai des vertus morales, en me limitant pour le moment à celles qui sont appelées cardinales, c’est-à-dire la charnière et la base des vertus morales. Elles sont : la prudence, la tempérance, la force et la justice. De même que des sept vices capitaux dérivent, par une malsaine racine, tous les autres vices, de même que des vertus cardinales prennent vie et aliment toutes les autres vertus morales.

Il y a une vertu dont on ne parle pas beaucoup. Elle est parmi les vertus

cardinales et elle est même la base de toute vertu morale car elle

accompagne tous nos actes. J’ai pensé de vous en parler ce soir pour voir

si vous la possédez. C’est la vertu de la prudence : très importante, je dirais

même indispensable, pour grandir dans la vertu.

SIGNIFICATION DE LA PRUDENCE a) Selon les anciens1752 Qu’est-ce qu’est la prudence ? Selon les anciens : l’habileté de l’hommede connaître ce qui sert et ce qui nuit à notre intérêt individuel, à notre bonheurprésent. « Le maître fit l’éloge de ce gérant malhonnête car il avait agi avechabileté ; en effet, les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les filsde la lumière » (Lc 16,8). Le Seigneur fit l’éloge de l’habileté, non pas del’injustice.

Les anciens, guidés par la seule raison, la définissaient : l’habileté de

savoir prendre ou éviter ce qui nous intéresse et qui convient au bonheur.

Pour vous, il ne doit pas en être ainsi, puisque vous êtes éclairés par la vie

surnaturelle. Cette conception purement mondaine de la prudence est la

vertu du paysan, dont parle l’Évangile, qui a cherché à se faire des amis

avec ceux qui avaient des dettes de son maître, pour qu’il puisse bénéficier

de cette amitié quand il ne serait plus au service de son maître. Et,

d’ailleurs, il fut loué par son maître. Par-là, nous constatons que les fils

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des ténèbres sont plus prudents que les fils de la lumière. Il ne fut pas loué

à cause de son acte, en soi mauvais, mais pour la prudence dont il sut

prévoir son avenir. Il s’agit ici de la sagesse et de la prudence du monde

dont l’auteur sapientiel dit : « la prudence de ce monde est folie devant

Dieu » (1Co 3,19).

b) Sens chrétienLa prudence chrétienne, par contre, est la tendance qui nous fait connaître, quinous fait distinguer les actes qui conviennent de ceux qui ne conviennent paspour poursuivre notre but dernier. Pour cela, St Augustin définit la prudencecomme : « la science des choses que l’on programme et qui s’enfuient »1. Cettevertu, donc, doit accompagner tous nos actes. La prudence est pour la créatureraisonnable, ce que l’instinct est pour l’animal. Le bœuf qui broute, saitdiscerner la bonne herbe de la mauvaise. L’agneau sait discerner le chien duloup.Que devra-t-il faire un bon Séminariste pour exercer la prudence ? Toutd’abord, nous remarquons qu’il n’arrivera jamais à être prudent celui qui,depuis son enfance, ne s’est pas habitué à raisonner et à vivre correctement.Depuis le Séminaire, le Séminariste doit s’exercer dans la prudence avec laréflexion et les actions droites. L’œuvre suit toujours le discernement.Les anciens résumaient les règles de la prudence en trois verbes : connaître,choisir et mûrir.

TROIS VERBES POUR VIVRE LA PRUDENCE a) Connaître1753 Connaître le conseil, l’opinion des autres. « Mon fils, sans conseil, tu nesauras rien faire » (Sir 32,24 vulgate). Et ailleurs, nous lisons : « De tout toncœur, fais confiance au Seigneur, ne t’appuie pas sur le conseil de ta prudence » (Pr 3,5). Quels seront les Conseillers du Séminariste ? Le Directeur Spirituel, leSupérieur, les Précepteurs, et, pendant les vacances, le Confesseur, le Curé etd’autres personnes prudentes.

Ce que tu dois faire, considère-le bien sous les différents points de vue.

Souviens-toi du conseil des personnes qui peuvent nous éclairer et dissiper

les doutes qui peuvent surgir facilement. Cette vertu revient à ceux qui ont

des grandes responsabilités, ainsi qu’à celui qui n’a pas encore

d’expérience et qui évolue dans la formation. Vous devez donc demander

1 Conforti cite en latin la définition augustinienne de la prudence : « rerum agendarum et

fugendarum scientia ».

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conseil à votre directeur spirituel (et au maître des novices) qui vous sera

toujours utile. Vous verrez que, quand vous serez prêtres et missionnaires,

vous n’hésiterez pas à demander conseil à votre Supérieur qui est

beaucoup plus éclairé que vous. L’Esprit Saint dit : « Mon Fils, ne fais

rien sans avoir été conseillé ». Souvenons-nous de l’adage célèbre :

« plusieurs yeux voient mieux qu’un seul »1. Seulement l’orgueilleux ne

demande pas conseil, parce qu’il est sûr de son avis. Par contre, l’humble

et le prudent – puisque l’humilité rime toujours avec la prudence –,

n’hésite pas à écouter le conseil des autres. Même le Souverain Pontife,

avant de promulguer ses décrets, convoque le Conseil et consulte l’avis de

ses frères dans l’Épiscopat. Ne soyez donc pas vexés, mes bienaimés,

quand vous allez demander conseil à vos Supérieurs.

b) ChoisirChoisir. La prudence situe toute chose dans une balance et, ainsi, suggère ce quiconvient de choisir, puisque c’est plus ou moins adapté au but que nous voulonsatteindre. Tant qu’il reste au Séminaire, le Séminariste n’a pas beaucoup àréfléchir sur le choix des moyens qui peuvent le conduire à l’accomplissementde son but : ces moyens consistent dans l’acquisition du savoir et de la sainteté.Il parviendra au savoir en s’appliquant aux études, selon les directives desprogrammes et des professeurs. Il grandira en sainteté par la prière, lessacrements, la méditation.

Choisissez les moyens les meilleurs pour atteindre la fin ultime. Ces

moyens sont indiqués par les circonstances. Si la première étape, celle de

la connaissance, a été bien effectuée, la deuxième ira de soi.

c) MûrirMûrir : il faut avoir une volonté constante et ferme pour mener à terme l’œuvrede son perfectionnement intellectuel et moral. Pour vaincre ses passions, sesinclinations mauvaises, il doit, d’une certaine manière, mettre en pratique ladevise du poète d’Asti : « vouloir, vouloir toujours, vouloir très fortement »2.Les fruits sont l’œuvre du temps, du soleil et des pluies.

Ne soyez ni pressés ni impulsifs dans l’exécution des décisions. Les

pressés et les impulsifs terminent mal, parce qu’ils négligent l’importance

de cette troisième étape. Personne ne devient excellent en deux secondes.

La vertu et la sagesse est un long processus si bien que nous ne pourrons

1 La locution latine, citée par Conforti, est : « plus vident oculi quam oculus ». 2 Conforti fait allusion à Vittorio Alfieri (1749-1803) qui disait : « volli, sempre volli,

fortissimamente volli ».

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jamais dire d’avoir atteint le point d’arrivée. Notre Seigneur nous a donné

l’exemple : « Soyez parfaits comme est parfait votre Père qui est aux

cieux » (Mt 5,48).

Ceux qui agissent trop impulsivement seront toujours confrontés à des

désillusions. Les fruits ne mûrissent pas en 24 heures. Il faut beaucoup de

pluie et de soleil pour faire pousser les fleurs, et encore d’autre pluie et

soleil pour commencer à voir les fruits. Mais il faut encore du temps pour

qu’ils parviennent à maturation.

De la même façon, les fruits de la vertu et de la sainteté ne s’obtiennent

qu’au bout d’un travail long et constant. Celui qui n’est pas convaincu de

cela, il oublie que la récompense est réservée à celui qui persévère

jusqu’au bout.

Trois règles de la prudence a) Penser à son passé

Et pour se perfectionner dans la vertu de la prudence, il conviendra detemps en temps de penser à son passé selon le bien accompli et le mal commis. La prudence se perfectionne avec l’expérience et l’expérience est caractérisée par des succès et des échecs. « Pour ceux qui aiment le Seigneur, tout concourt au bien » (cf. Rm 8,28). « Errando discitur », on apprend en se trompant.

Pour nous perfectionner dans la vertu de la prudence, il est nécessaire

de penser à nos expériences passées, les bonnes ainsi que les mauvaises.

L’expérience est faite de succès et d’échecs. Même les échecs doivent

servir à perfectionner notre prudence, parce que « pour ceux qui aiment le

Seigneur, tout concourt au bien » (cf. Rm 8,28).

Quand Sainte Thérèse se trouvait dans un moment de découragement,

- puisque même les Saints traversaient des périodes de découragement et

d’épreuve -, elle pensait à son passé, aux défauts de sa jeunesse et cela lui

servait comme encouragement pour s’engager en faveur du bien. Les

erreurs doivent nous servir d’encouragement, de même que les succès.

b) Considérer l’avis des autres sur nous-mêmesIl conviendra, ensuite, de tenir compte de ce que les autres disent de nous-

mêmes. Nous ne devons pas nous préoccuper des jugements des hommes, puisque nous sommes tels que nous le sommes devant Dieu. Parfois les avis des autres peuvent être faux, mais parfois ils sont justes. Tenons-en donc compte. Jésus lui-même s’est demandé : « Au dire des gens, qui est le Fils de l’homme ? Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » (Mt 16,13.15). Il n’avait pas besoin de cette consultation. Nous, par contre, nous en avons besoin. Tel fut le cas de Giambologna, après avoir achevé la célèbre statue équestre.

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Nous devons tenir compte également de ce que les autres disent à notre

sujet. Pour autant, ne soyons pas esclaves de l’avis des autres, puisque

l’auteur de l’Imitation du Christ nous dit : « Nous sommes ce que nous

sommes devant Dieu et rien nous n’obtenons, ni nous perdons avec les

éloges ou avec les blâmes »1. Cependant nous devons savoir bien profiter

d’une opinion faite à notre égard. Ne la rejetons pas surtout quand elle

contrarie notre orgueil. Si elle est fausse, ne nous en soucions pas. Mais,

si elle est juste, pourquoi ne pas en profiter pour nous corriger ? Ne peut-

elle pas nous aider à être plus cohérents et diligents ? Jésus lui-même a

demandé aux Apôtres : « Pour les gens, qui suis-je ? Et vous, qu’en dites-

vous ? » (cf. Mt 16,16-19). C’est alors que Saint Pierre fit cette magnifique

profession de foi. Bien sûr, lui, il n’avait pas besoin de poser cette

question, alors que nous, nous en avons fort besoin pour nous corriger et

pour grandir dans la vertu. Seulement les orgueilleux se considèrent

infaillibles et ils croient de n’avoir besoin de personne.

Qui peut-il se considérer complètement innocent et parfait ? Seulement

le Seigneur Jésus Christ. Même les saints avaient, tous, leurs

imperfections.

Ne vous en faites donc pas si l’on vous reproche. Observez les

situations avec un calme objectif. Ne soyez pas troublés à cause de

quelques petites humiliations. Profitez-en pour votre croissance dans la

vertu.

c) Ne pas avoir confiance en soi-mêmeUne troisième règle est celle de mettre en pratique le proverbe italien :

avoir confiance c’est bien, mais ne pas en avoir c’est mieux2. Nous ne devons pas l’appliquer à nos frères, mais à nous-mêmes. Le plus grand et terrible ennemi de l’homme est l’homme lui-même, l’orgueil, la sensualité. Nous ne devons pas faire confiance à nos faibles forces : si David n’avait pas fait confiance en soi-même, il ne serait pas misérablement tombé (cf. 2Sam 11,2-9). Le Seigneur nous recommande d’être simples comme les colombes et prudents comme les serpents. Parce que le serpent, quand il est poursuivi et il se voit en danger, il cache sous ses anneaux la tête. Ainsi, nous-mêmes, nous devons, avant tout, mettre en sécurité ce qui est plus précieux en nous, notre âme, la vertu, notre salut éternel.

1 cf. L’imitation du Christ, livre 2, ch. 6. 2 Dans sa conférence, Conforti explique bien le sens de ce proverbe qui, en italien, se

dit : “fidarsi è bene, non fidarsi è meglio”.

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Le proverbe dit : « avoir confiance, c’est bien ; ne pas en avoir, c’est

mieux ». Quand nous disons : « Ne pas avoir confiance », nous

n’attribuons pas cette expression à nos frères, car cela serait contraire à la

charité et, donc, un mal. Par contre, nous disons qu’il ne faut pas avoir

confiance en soi-même, dans l’ennemi qui est en nous, notre nature

corrompue, notre égoïsme. N’ayez pas confiance en vous-mêmes dans les

occasions qui se présentent. N’écoutez pas la voix de votre orgueil qui

vous assure que vous serez vainqueurs. Ne permettez pas aux pensées

mauvaises de s’installer en vous, en prétendant de parvenir à y faire face.

Regardez David. Il n’a pas appliqué cette maxime. Il regarda et il

contempla ce qu’il ne devait pas regarder. Il tomba alors dans la plus

profonde abjection morale.

« Soyez simple comme des colombes, mais prudents comme des

serpents » (Mt 10,16), dit Notre Seigneur. Quand le serpent se sent en

danger, il cache sa tête dans les anneaux et il se croit, ainsi, en sécurité.

Nous aussi, nous devons agir de la sorte. « Une seule chose est

nécessaire » (Lc 10,42). Nous devons mettre toutes nos forces pour sauver

cette seule chose nécessaire qui est notre âme et notre vertu.

Les filles de la prudence Les conséquences, ou mieux, les filles de la prudence sont la

prévoyance, la circonspection, la précaution et le discernement.

1754 La prévoyance. Elle consiste dans le fait de disposer avant tout des moyens pour poursuivre un but fixé à la lumière de l’Évangile. « Quel est celui d’entre vous qui, voulant bâtir une tour, ne commence par s’asseoir pour calculer la dépense et voir s’il a de quoi aller jusqu’au bout ? » (Lc 16,28).

Nous devons faire de même, pour qu’on ne nous dise pas d’avoir

commencé et de ne pas avoir achevé.

1755 La circonspection. Elle permet de considérer les circonstances du temps, du lieu et des personnes, sur lesquels se baser pour atteindre un objectif.

Souvenez-vous-en, surtout quand vous serez missionnaires. Tenez

compte de la circonspection, autrement vous sombrerez facilement dans

l’échec. Supposez, par exemple, que quelqu’un organise une mission

d’évangélisation pendant le temps de la moisson ou de la récolte : les gens

ne viendraient pas et la mission échouerait.

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1756 La précaution1. Elle permet d’enlever les obstacles que nous rencontrons dans l’achèvement d’une œuvre. Elle nous aide à débarrasser la route de tout empêchement.

Celui qui avance hâtivement, il finit par perdre face aux difficultés. En

toute circonstance, agissez toujours selon la foi. Dans les doutes et les

incertitudes, interrogez la foi. Elle aura toujours une parole de conseil,

voilà où se fonde toute la différence entre la prudence du monde et celle

de l’Évangile. Agissez toujours selon ce que la foi vous inspire. En toute

action, réfléchissez si elle est pour la gloire de Dieu. Une fois posés ces

fondements, nous pouvons faire confiance dans les talents reçus et dans

l’aide de Dieu.

1757 Le discernement. Il est fils de la prudence car il aide à pondérer les avantages et les inconvénients de nos actions futures, avec un juste critère, en donnant à l’une et à l’autre la juste importance, en n’oubliant pas que devant la parité entre les avantages et les inconvénients, nous devons préférer la dilatation.

Celui qui s’engage hâtivement et naïvement, ne peut qu’en avoir honte.

Facilement, on pèche par excès ou par défaut. Il est donc nécessaire de

bien se former dans la vertu de la prudence : surtout quand vous

terminerez la formation de base et que vous devrez décider vous-mêmes.

Maintenant vous vous trouvez dans la condition de celui qui voyage dans

une voiture conduite par un chauffeur. Demain, vous serez comme ceux

qui voyagent à pied et qui doivent bien connaître la route à prendre.

Méditez bien sur l’importance de cette vertu et fixez bien en tête les trois

verbes : connaître, choisir et mûrir.

La règle souveraine de la prudence 1758 La règle souveraine pour agir avec prudence est celle d’interroger sa propre foi, en toutes les contingences et en toutes les rencontres. Alors, nous aurons toujours une réponse sûre. Alors, vous n’aurez jamais à regretter vos actes et vos déterminations.

1 Conforti emploie le terme italien « cautela », qui signifie l’attitude de prudence qui tend

à rassurer, à respecter et à protéger ses objectifs, même par des mesures et des actions

conséquentes.

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De Martino Mgr Pasquale

Formateur du clergé en Chine, authentique missionnaire

promoteur de la culture et de la spiritualité chinoise,

il traverse la tourmente maoïste au cachot,

il est envoyé en Indonésie

où il est nommé 1er Préfet Apostolique de Sumatra

Né le 07.03.1900 à Como, Grand Séminariste de son Diocèse, il est envoyé, pendant la 1ère guerre mondiale au service militaire à Parme où il rencontre Mgr Conforti. Entré à Parme le 04.04.1919, ordonné prêtre le 05.10.1924, envoyé en Chine le 16.11.1924, il se consacra à l’enseignement au Séminaire. Incarcéré pendant six mois, en 1946, et expulsé en 1951, il rentre en Italie où il sera Consulteur Général. Envoyé en Indonésie en 1953, il fut nommé Préfet Apostolique de Sumatra. Neuf ans après, il rentre en Italie et il fera 5 ans au Brésil, avant de mourir à Tavernerio le 07.08.1968.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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12. ForceParme, ISME, 20 mai 1921

INTRODUCTION Je vous parlerai aujourd’hui d’une autre vertu cardinale et morale, dont

on ne parle pas beaucoup : la force.

Habituellement, on n’y donne pas l’importance qu’elle mérite. Nous

devons la considérer aujourd’hui de manière spéciale. Demandons-nous si

nous la possédons et engageons-nous pour l’acquérir coûte que coûte.

Elle est le fondement, la structure et la vie des autres vertus. Si vous

enlevez cette vertu, toutes les autres manqueront de structure. Toutes nos

chûtes dépendront toujours du manque de la force et de l’énergie

nécessaire pour résister aux tentations.

Commençons par la définition.

La vertu de la force 1759 La force est la vertu qui nous fait dépasser les obstacles qui s’opposent à la pratique du bien et à la tolérance du mal.

Est-ce nécessaire ? 1760 Est-ce nécessaire ? Oui. De même que les nerfs sont nécessaires à notre corps, de même la force est nécessaire à notre esprit pour la pratique du bien.

C’est une vertu de première nécessité. De même que les nerfs le sont

pour soutenir le corps et lui donner l’agilité. Enlevez les nerfs du corps et

vous le rendez incapable d’agir.

1. LA FORCE DANS LES ÉCRITURESComme il faut le fondement à la solidité du bâtiment, ainsi la force estindispensable pour la perfection de notre vertu. Pourquoi ? Notre vie ici-bas estune lutte sans cesse.

Selon le poète Carducci, qui a écrit le poème « Satan », l’Évangile est

fait pour efféminer les âmes et pour les rendre paresseuses1.

1 Josué Carducci (1835-1907) fut un poète, écrivain, critique littéraire italien. En 1865, il publia l’Hymne à Satan, où Satan, identifié avec la science et la nature, serait l’emblème du progrès des institutions modernes brutalement piétiné et occulté par le clergé.

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Qu’il se fait compatir, quand il parle ainsi ! Oh, s’il avait lu l’Évangile,

il aurait trouvé qu’il n’y a pas de plus grand livre au monde qui incite à la

force. Dans chacune de ses pages, nous tirons une ardeur incroyable qui

nous édifie.

« Le Royaume des cieux est pris par violence, et les violents le ravissent » (Mt 11,12). « Prends ta part de souffrances comme un bon soldat du Christ Jésus » (2Tim 2,3). « J’ai combattu le bon combat » (2Tim 4,7). « L’athlète n’est pas couronné, s’il n’a combattu suivant les règles » (2 Tim 2,5).

Regardez le feu qui vient des épitres de St Paul : il parle toujours de

luttes, de combat. « J’ai combattu le bon combat » (2Tim 4,7), dit-il de

lui-même. Et, en faisant allusion à ceux qui combattent dans les arènes et

qui sont couronnés s’ils gagnent, il dit : « Courez de manière à

l’emporter » (1Co 9,24).

2. LA FORCE DANS LA PENSÉE DE L’ANTIQUITÉL’antiquité résumait ces préceptes dans la célèbre devise : vince te ipsum, soisle vainqueur de toi-même.

On ne peut pas être vertueux si on n’a pas la force de lutter.

Jésus Christ a élevé cette force à l’état surnaturel : renonce à toi-même,

prends ta croix et suis-moi. Si tu veux être mon disciple, d’une manière

plus ou moins parfaite, quel que soit ton état de vie, la lutte est nécessaire,

voire indispensable.

Kempis disait : « Nul en ce monde, fût-il roi ou pape, n’est exempt

d’angoisses et de tribulations »1.

3. LE MISSIONNAIRE : UN COMBATTANT AU PREMIER RANGIl nous faut la force même parce que nous devons être les hommes de la scienceet de la vertu et tout cela comporte un travail continu, une lutte sans cesse.Pour acquérir la science nécessaire, nous devons vaincre notre inertie naturelle.La pensée pour acquérir le savoir, entraine un effort constant, une applicationrégulière. Fatigue davantage une heure de réflexion intense que plusieursheures de fatigue matérielle musculaire.Le dicton nous l’enseigne : In fama non si vien sotto le coltri (L’on ne devientpas célèbre en ne restant que sous les couvertures du lit).

1 L’imitation de Jésus Christ, livre 1, ch. 22, n.1.

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L’adulte épanoui, quand il était enfant, a fourni beaucoup d’effort et enduré la chaleur et le froid1.

Nous, de manière particulière, nous devons toujours être prêts au

combat. Nous qui sommes appelés à être les hommes de la sagesse, de la

vertu et de la sainteté, nous devons être bien fournis de cette force qui nous

prépare à la lutte.

Vous devez être les combattants au premier rang, les soldats du front,

ceux qui descendent au terrain contre l’ennemi de Dieu et de notre foi.

Il faut que nous fassions de notre mieux pour vaincre la nature humaine

qui, normalement, repousse la fatigue. Comme le corps repousse la

fatigue, ainsi l’esprit fuit ce qui demande trop d’application. Bien sûr : une

heure de travail mental est plus fatigante que dix heures de travail manuel.

La preuve en est que parmi les cultivateurs et les ouvriers nous trouvons

des gens costaux, tandis que parmi les intellectuels, il est facile de trouver

des malades aux poumons et des neurasthéniques car l’application mentale

fatigue le système nerveux jusqu’à l’affecter.

Nous, cependant, nous devons nous rendre supérieurs à toutes les

difficultés. Nous n’acquérons un degré élevé de savoir qu’au prix de

sacrifices. Horace disait que pour parvenir à quelque chose de consistant

dans la poésie, il faut à la fois transpirer et souffrir le froid. Soit nous

dépassons les difficultés, soit nous nous affaiblissons face à un devoir

précis tel que l’instruction.

Lutter pour la pureté On demande la force, ensuite, parce que l’homme d’Église doit être la personne de la vertu et, spécialement, d’une pureté angélique. Il n’y parviendra qu’à travers une lutte constante. « Le Seigneur connaît les chemins de l’homme intègre qui recevra un héritage impérissable » (Ps 36,18). « Mais, dans les membres de mon corps, je découvre une autre loi, qui combat contre la loi que suit ma raison et me rend prisonnier de la loi du péché présente dans mon corps » (Rm 7,23). Et nous voyons ce que les Saints ont fait pour bien garder le cap. St Benoît, St Louis, St François d’Assise et St Paul. « Je traite durement mon corps, j’en fais mon esclave » (1Co 9,27).

1 Conforti cite ici une phrase d’Horace qui, dans son intégralité, dit : « Qui studet optatam

cursu contingere metam multa tulit fecitque puer, sudavit et alsit Abstinuit Venere et

Baccho. Celui qui, dans la course du stade, aspire à atteindre le but qu’il s’est fixé, quand

il était enfant, il a fourni beaucoup d’efforts, enduré la chaleur et le froid, s’est abstenu

de l’amour et du vin » (Horace, Epistulae - Epistularum Liber Ii – 3).

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Nous devons être aussi des hommes de la sainteté et surtout des

hommes de la pureté. C’est vite fait de dire : je veux être pur comme un

Ange !

Qui peut-il manquer d’admirer ces chers Saints, qui ont su si

merveilleusement dépasser toute chose d’ici-bas ? Eh bien, pour atteindre

leur degré, il faut une grande force.

St Paul, lui-même, tout en étant au troisième ciel, sentait les tentations

de la chair, pour qu’il puisse, ainsi, se garder humble et combattre jusqu’au

dernier souffle la nature corrompue. Nous savons ce qu’ont fait les Saints

pour se conserver purs.

On dit que quand St Bernardin était assailli par des fortes passions, il

se jetait dans les ronces.

Et St Bernard, qui était un ange de pureté, pendant la nuit il tenait

toujours près de lui un réservoir d’eau glacée, même pendant l’hiver, et il

s’y plongeait pour étouffer le bouillonnement de la passion.

Savez-vous comment St François d’Assise, qui était plus qu’un ange,

un vrai séraphin avec des semblances humaines, savait réprimer ses

instincts humains ? Si vous allez à Assise, vous pourrez voir la roseraie où

il s’était jeté pour vaincre la tentation. Cette roseraie grandit encore de nos

jours de manière merveilleuse, en produisant des roses vermilles et

parfumées.

Oh la pureté, chers jeunes : elle ne se conserve qu’à force de luttes et

de résistances !

Le missionnaire est l’homme de la lutte Pour une autre raison, vous devez vous procurer la force : pour être

missionnaires, vous en avez besoin de manière particulière.

Le missionnaire est, par excellence, l’homme de la lutte. Ainsi se

réalisera en vous ce que l’apôtre Paul disait de lui-même : « Luttes au

dehors, craintes au-dedans » (2Co 7,5), tels que les dangers de navigation

sur la mer, sur les rivières, ou les naufrages… Il était toujours et partout

dans une lutte continue.

Il semble vraiment que ces paroles soient adressées à vous ! Vous serez

tourmentés par les angoisses de l’âme, vous devrez combattre contre les

doutes des Mandarins ou les Chefs Africains ou les Indigènes Américains,

ou les Aborigènes de l’Océanie, contre les superstitions, contre la

méfiance qu’inspire votre être étranger.

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4. LES FILLES DE LA FORCE1761 Les filles de la force sont les suivantes :1. La confiance : elle nous donne une certaine assurance pour affronter le

combat de la vie. « Je peux tout en celui qui me fortifie » (Ph 4,13).2. La magnanimité : elle allume le feu de l’amour pour les grandes choses. Elle

nous fait dire : « plura, Domine, plura » (davantage, Seigneur, davantage).Et nous voyons ce qu’ont fait les saints et les Apôtres pour la propagationdu Royaume de Dieu.

3. La persévérance : elle nous fait agir dans le bien jusqu’au bout. « Celui quipersévérera jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé » (Mt 10,22).

4. La patience : elle nous soutient dans les adversités, en nous faisantsupporter toute chose avec du calme. « Je surabonde de joie au milieu detoutes nos tribulations » (2Co 7,4).

5. LES VICES QUI S’OPPOSENT À LA FORCE1762 Les vices qui s’opposent à la force sont :1. L’audace : elle affronte imprudemment les dangers.2. La présomption : elle pousse à oser ce qui est supérieur à nos forces.3. Par défaut : la pusillanimité, la paresse et le respect humain qui nous font

reculer devant le danger.

6. LES MOYENS POUR ACQUÉRIR LA FORCE1763 Pour acquérir la force, il faut cultiver la volonté.Or, le philosophe enseigne que les puissances se perfectionnent par l’exercice.Voulons-nous acquérir la force ?Entraînons la volonté par la fidélité au devoir et aux bonnes résolutions, entenant devant nos yeux les exemples des Saints qui nous ont précédés dans lalutte de la vie.

Mais, comment pouvez-vous acquérir cette force si, dès à présent, vous

ne commencez pas à vaincre les petites difficultés, si vous ne cherchez pas

dès maintenant la force de la volonté, celle qui est le fruit d’un long travail,

une longue répétition des actes qui servent à la renforcer ?

Voulez-vous vérifier si vous possédez cette force ?

Tenez toujours, pour règle générale, celle-ci : n’oubliez jamais vos

bonnes résolutions. Ne vous précipitez pas à prendre des résolutions et,

une fois que vous les avez retenues, vous les oubliez sans parvenir à les

mettre en pratique. Quel que soit le sacrifice que cela vous coûte, ne faites

pas d’exception en pratiquant vos bonnes résolutions, même si vous êtes

surpris par quelque imprévu. Ne vous demandez pas si c’est obligatoire

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ou pas, si c’est une grande ou petite chose. Soyez toujours fermes, des

hommes de parole, ne reculez même pas d’un cran face à une bonne

décision prise. Alors, sans vous apercevoir, vous aurez atteint une

merveilleuse force de volonté.

Maintenant que vous êtes au Séminaire et que vous avez une règle, bon

gré mal gré, vous devez vous lever à l’heure établie. Mais, quand vous

serez en dehors du Séminaire, continuez à vous imposer cette force de

volonté.

Ne négligez pas votre devoir : faire telle prière régulière ou telle

mortification choisie, quel que soit le sacrifice que cela vous coûtera.

Faites-le, je vous le répète, toujours et partout, même quand vous êtes

devant des imprévus. Ce sont les petites choses qui révèlent la force d’une

personne. N’importe quel bon chrétien évite de commettre des graves

actions !

Ainsi pourra se réaliser en vous ce qui est dit dans l’Évangile à propos

du serviteur fidèle. Celui qui est fidèle dans les petites choses, il le sera

même dans les grandes.

Comme il est beau de voir un jeune qui sait se maîtriser. Prenez votre

bonne résolution, par exemple, de ne transgresser aucune règle

volontairement, et cela pendant un mois, pour deux, pour une année : sans

vous en apercevoir, vous aurez acquis une grande force qui est la légitime

conséquence de l’habitude de faire le bien.

Chaque jour faites l’examen de conscience pour vérifier comment vous

avez été fidèles à vos résolutions. Soyez rigoureux avec votre volonté.

Imposez-vous souvent quelques petites mortifications. Est-il le temps

d’étudier ? Est-ce l’heure de prier ? Appliquez-vous toujours et avec toute

votre ferveur.

Observez avec ponctualité toutes les règles. Et même si, en manquant,

vous ne commettez pas de péché, ayez-en du regret. Soyez sévères envers

vous-mêmes et, alors, se réalisera en vous la parole de l’Évangile : « Si

vous ne jugez pas les autres, vous ne serez pas jugés » (Mt 7,1).

Multipliez les actes de force de volonté et vous vivrez dans le bonheur.

Vous pourrez alors être sûrs que votre conscience est bien habituée à se

soumettre au combat du fameux « agere contra ».

Alors la pratique de la vertu sera pour vous une nécessité. Vous ne

trouverez plus de difficultés et celles que les autres considèrent des

grandes difficultés, ne seront pour vous que des petites choses. Vous ne

devez pas connaître le terme « difficile ». Au contraire, au milieu des

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difficultés, vous aurez la sainte folie de répéter avec St François Xavier :

Plura, plura Domine !

Certainement, les Saints n’ont pas eu, dès leur naissance, la force de

volonté que nous admirons en eux. Mais c’est avec le temps qu’ils se sont

engagés dans le combat : eux aussi, ils sentaient la douleur et la

répugnance pour les choses d’ici-bas. Mais, ils en sortaient vainqueurs

grâce à leur nature supérieure qui les poussaient à répéter : plura,

Domine !

Nous lisons dans l’Évangile que la couronne appartient à celui qui

persévère jusqu’à la fin et que le prix est à celui qui sait lutter. Cela ne

s’obtient qu’avec la force de la volonté.

Il est vrai que c’est le Seigneur qui agit en nous et qui nous donne la

grâce de la persévérance et qu’il n’y a pas de force quand nous nous

éloignons de la protection de Dieu. Mais Dieu veut aussi notre

collaboration : l’apport de notre énergie.

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Battagliarin Mgr Dante

Le plus jeune du groupe, profès à 17 ans, parti en Chine à 22 ans,

revenu en Italie pour deux décennies dans le service de l’autorité,

pionnier des Xavériens au Bangladesh et 1er évêque de Khulna

« heureux de dépenser et de se dépenser pour les âmes »

(2Co 12,15)

Né le 19.03.1904 à Treporti (Venise), entré à Parme le 29.10.1916, ordonné prêtre le 29.08.1926, envoyé en Chine le 28.09.1926 où il rédigea des précieux articles de chronique missionnaire. Envoyé en Italie en 1932, il est supérieur de communauté, Consulteur général et Préfet de l’économie. En 1952, il commence la présence xavérienne au Bangladesh : il est ordonné évêque de Khulna le 23.09.1956. Après s’être dévoué dans ses visites pastorales et dans la formation des agents pastoraux et du clergé local, il meurt à Parme le 29.04.1978.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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13. Sincérité et véritéParme, ISME, 1 juin 1921

INTRODUCTION Une vertu à pratiquer 1764 Il y a des vertus que nous devons toujours pratiquer dans les relations avec notre prochain et, parmi elles, la sincérité et la véracité occupent sans doute une place incontournable.

1. LE MEILLEUR ÉLOGE : ÊTRE UN HOMME DE PAROLE1765 Le meilleur éloge qu’on puisse faire d’une personne est celui de dire qu’ilest un homme de parole.

La sincérité constitue un des éléments fondamentaux pour former le

caractère d’un jeune, de tout homme, mais spécialement d’un prêtre et

d’un missionnaire qui doit être maître de vérité.

Tous doivent aimer la sincérité, mais de manière particulière le prêtre

pour suivre l’exemple de notre Seigneur Jésus Christ qui dit : « Je suis la

lumière et la lumière s’oppose aux ténèbres » (cf. Jn 8,12).

Dans notre Règlement, il y a un article spécial qui fait allusion à cette

vertu. Nous lisons, en effet, le n. 181, à propos du maître des novices :

« Sans altérer leur tempérament naturel, que le maître des novices les aide

à acquérir un trait saintement joyeux, sans complexe, courtois, loyal et

fort, ennemi de toute duplicité et artifice, toujours prêt à s’astreindre aux

tâches pénibles et à faire face à toutes sortes de difficultés, du moment que

cela est exigé par la gloire de Dieu et le profit des âmes »1.

Un des éléments ontologiques essentiels demeure l’ouverture d’esprit

et la loyauté. L’éloge le plus beau qu’on peut faire à quelqu’un, même ici-

bas, c’est d’être un homme de parole, tandis qu’un des injures plus graves

c’est de dire : tu n’as pas tenu à ta parole. Tu nous as mentis ! Et on

considère cela d’une telle gravité qu’on pense souvent de laver l’injure

avec le sang : voilà l’origine de tant d’affrontements. Jusqu’à certaines

limites, cela a une raison d’être.

L’homme est fait pour la vérité.

1 Dans l’édition des Constitutions Xavériennes de 1983, cet article des Constitutions de

1921 est repris dans la « Règle fondamentale » au n. 69.

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La vraie monnaie 1766 La vérité est la monnaie qui porte l’effigie de Dieu et qui circule parmi les hommes de chaque nation. Nous sommes faits pour la vérité et, donc, quand nous disons un mensonge, nous payons notre semblable avec une fausse monnaie.

2. LE FONDEMENT DES RELATIONS1767 Pourtant, nous ne respectons plus la vérité. Souvenons-nous de DeMaistre.

Joseph-Marie De Maistre (1753-1821) disait que la parole est faite

pour cacher la vérité, mais, avant lui, plusieurs siècles auparavant, St

Grégoire le Grand l’avait dit, en décrivant la corruption du monde depuis

jadis. Voilà que le monde devient aujourd’hui toujours plus vieux et rusé.

La vérité est le lien de la société, la base des relations commerciales et politiques. Si c’est une faute grave de mentir dans les choses terrestres, il est encore plus grave de mentir dans le domaine religieux. Souvenons-nous d’Ananie et Saphira (cf. Ac 5,1-11).

Accepter la mort au lieu de manquer à cette vertu 1768 Tous ont toujours considéré la véracité comme une chose hautement recommandable. Voyons l’exemple d’Atilius Regulus.

Marcus Atilius Regulus (299-246 av. JC) se rend à un champ de

bataille des Romains pour plaider la paix, mais il savait bien que la paix

n’aurait pas été avantageuse pour son peuple. C’était la condition sine qua

non pour être sauvés. Il plaida alors avec audace contre la paix plutôt que

de trahir la vérité : il resta ferme ! Cela lui mérita de mourir martyr de la

vérité. Nous espérons que le Seigneur aura tenu compte de son acte

généreux et loyal.

Eléazar quand il fut menacé de mort par Antiochus s’il ne sacrifiait pas aux dieux et s’il ne mangeait pas les viandes sacrifiées.

Eléazar refuse énergiquement l’ordre d’Antiochus de manger la viande

sacrifiée aux idoles, parce que c’était interdit par la loi. « Fais semblant de

manger, les amis lui disent, ainsi tu contenteras Antiochus et tu ne

manqueras pas de fidélité à la loi ». « Jamais, crie le généreux Eléazar : je

veux que tous sachent que je demeure fidèle à la loi. Je préfère mourir

plutôt qu’être déshonoré. Il vaut mieux mourir que salir ma vieillesse,

comme dit le Texte Sacré » (cf. 2Mac 6,17-30).

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3. JÉSUS, HOMME VÉRIDIQUE1769 Il n’y a pas de vertu qui resplendisse davantage dans la vie privée de NotreSeigneur Jésus Christ, comme nous le remarquons dans le Saintes Écritures. Iln’y a pas de faute plus reprochable que l’hypocrisie. Cette vertu s’appelle lavérité. Ses ennemis la reconnaissent très bien : « Maître, nous le savons : tu estoujours vrai et tu enseignes le chemin de Dieu en vérité, tu ne te laissesinfluencer par personne » (Mt 22,16). Jésus Christ fait l’éloge de Jean Baptisteet de Nathanael car ils ont défendu la vérité1. Il recommande à ses Apôtresd’être « prudents comme le serpent et simples comme les colombes » (Mt10,16). Jésus Christ fut martyr de la vérité. Caïphe l’interroge et il lui souscrit sacondamnation à mort. « Si vous ne changez pas pour devenir comme lesenfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux » (Mt 18,3).

4. UNE VERTU CONTRE L’HYPOCRISIE1770 Il y avait une classe de personnes qu’il détestait, les Scribes et lesPharisiens : « vous purifiez l’extérieur de la coupe et à l’intérieur vous êtespleins d’impuretés, sépulcres blanchis » (cf. Mt 23,25-26).

1771 « Que votre parole soit “oui”, si c’est “oui”, “non”, si c’est “non”. Ce qui est en plus vient du Mauvais » (Mt 5,37).

Jésus Christ lui-même est mort martyr de la vérité. En effet, quand

devant le Grand Prêtre il fut interrogé s’il était vraiment le Fils de Dieu, il

a pu répondre évasivement, comme il avait fait parfois sans, pour autant,

manquer à la vérité. Il l’a fait pour nous apprendre qu’il peut y avoir des

cas où nous pouvons agir ainsi, nous aussi. Quand il fut interrogé s’ils

devaient ou pas donner le tribut à César, il répondit évasivement, parce

qu’il savait qu’on cherchait à le piéger : s’il disait « oui », alors on l’aurait

considéré comme un ennemi du peuple d’Israël qui ne reconnaissait pas la

domination étrangère, s’il disait « non », on l’aurait vu comme un rebelle

et ennemi de César. Il s’en est sorti très bien, sans répondre directement :

il se fit donner une monnaie. Il n’a pas voulu toucher cet argent perfide

par lequel on paye toutes les prostitutions. « Rendez à César ce qui est à

César, dit-il, et à Dieu ce qui est à Dieu » (Lc 20,25).

Il se peut que la prudence nous conseille, parfois, d’agir de cette

manière, sans pour autant manquer à la valeur de la vérité, quand la vérité

pourrait être déshonorée.

1 Jésus dit à propos de Nathanael : « Voici vraiment un Israélite : il n’y a pas de ruse en

lui » (Jn 1,47). Il aimait la vérité et il n’a pas tardé à connaître la mission divine des

Apôtres.

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La vérité pour Pierre et Paul 1772 St Paul écrit : « Rejetez donc le mensonge ; que chacun de vous dise la vérité à son prochain » (Ep 4,25).

1773 St Pierre : « Rejetez donc toute méchanceté, toute ruse, les hypocrisies, les jalousies et toutes les médisances ; comme des enfants nouveau-nés, soyez avides du lait non dénaturé de la Parole qui vous fera grandir pour arriver au salut » (1P 2,2-3).

L’exemple des Saints 1774 Les Saints ont bien su exercer cette vertu. Saint Anthime, Évêque et martyr à Nicomédie, était recherché à mort parce qu’on avait su qu’il professait la foi chrétienne.

Les policiers vinrent chez lui, dans sa maison. Il les accueillit

gentiment, il les considéra très bien et, quand, le lendemain, ils lui

demandèrent s’il connaissait quelqu’un au nom d’Anthime, il n’hésita pas

de leur dire que c’était bien lui.

Les policiers lui répondirent : « Jamais de la vie ! Nous ne pouvons pas

saisir celui qui nous a accueilli si gentiment. Nous dirons plutôt que nous

n’avons pas pu te trouver ».

« Il n’est pas correct pour les chrétiens de mentir », répondit Anthime.

Et il voulut qu’on le saisisse : il fut condamné et il mourut martyr de la

vérité.

St Alphonse était avocat. Un jour, il s’est trompé en interprétant un document contre son adversaire et il finit par abandonner le lieu du tribunal.

St Alphonse Marie de Liguori avait une bonne carrière de juriste et il

commençait à être célèbre pour sa mémoire extraordinaire et pour sa

singulière rhétorique.

Mais un jour, il s’est aperçu que pour agir contre un adversaire, il devait

employer des intrigues et des tromperies.

Il ressentit donc une telle horreur de ce genre de vie qu’il se donna tout

au service de Dieu et il devint l’Évêque et le Docteur extraordinaire que

nous connaissons.

Aimons la vérité et prenons garde car nous pouvons tomber des

différentes manières.

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5. EXHORTATIONS FINALES1775 Nous pouvons nous rendre coupables de mensonge de plusieursmanières : en disant une chose au lieu d’une autre, ou bien, en taisant unepartie de la vérité, en la mutilant, et donc en enduisant en erreur celui qui nousécoute ; en exagérant les choses plus du nécessaire, par excès ou par défaut(deux plus deux c’est quatre et non pas trois et quatre-vingt-dix-neuf centimes).

1776 Voilà ce qui, habituellement, nous pousse au mensonge : les préjugés qui altèrent notre considération sur les autres ; l’animosité ; le profit personnel et surtout l’amour exagéré de soi-même.

Chers jeunes, qu’il ne vous arrive jamais, même pas pour tout l’or de

ce monde, d’avoir à dire le plus petit mensonge, parce que même ce petit

mensonge offense Dieu qui est Vérité.

Combien de fois, pour vouloir être apprécié ou considéré, on tombe

dans le mensonge !

1777 Les facteurs de protection de la vérité sont l’humilité et la charité. Que nous serons plus libres, plus sereins, sans soucis ni doutes, en

disant toujours la vérité ! Un proverbe italien dit : « Le mensonge a

toujours les jambes courtes », et il ne tarde pas à venir à la surface, si bien

que le menteur ne fera que rougir. Celui qui dit la vérité est vraiment libre

de la liberté des enfants de Dieu. Faites une introspection en vous autour

de cette vertu et regardez si vous avez quelque chose à corriger. Si vous

êtes sincères, vous serez dans le cœur de Dieu et des hommes : c’est bien

le secret pour se faire aimer. Une âme vraiment sincère obtient, avec

l’estime de Dieu, aussi la confiance et le respect des hommes.

1778 Que la règle de votre vie soit toujours la suivante : soyez francs, ouverts, candides, sincères, simples dans les actions. Fuyez toute duplicité, toute tromperie, toute simulation. Alors vous vivrez selon les maximes de l’Évangile. Vous serez saintement libres. « La vérité vous rendra libres » (Jn 8,32). Vous ne serez jamais dans l’embarras. La vertu ne cause jamais de la honte.

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Chiarel P. Alessandro

Sténographe précis du groupe,

livreur des précieuses conférences de Conforti aux novices

et endurant missionnaire en Chine

Né le 28.11.1901 à Revine Lago (Trévise), entré à Parme le 02.09.1920, pendant le 1er noviciat il saisit les conférences de Conforti aux novices. Ordonné prêtre le 28.02.1926, envoyé en Chine le 25.05.1926, il y demeura de manière ininterrompue jusqu’au terme de sa vie : il meurt à Hsu-Chang le 23.08.1950.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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14. TempéranceParme, ISME, 8 juin 1921

INTRODUCTION En parlant à des jeunes, comme vous, qui tendent vers la perfection, je

devrais parler de la mortification, sans me contenter de vous entretenir sur

la tempérance.

Toutefois, si ce n’est peut-être pas le cas pour la mortification, mais

vous tous vous devez vous efforcer de pratiquer la tempérance, puisqu’en

dessous d’elle il y a le péché et en dessus d’elle il y a la perfection qui peut

atteindre l’héroïcité.

Je vous dirai quelque chose sur cette vertu afin qu’en elle vous repériez

le point de départ pour acquérir la perfection, et cela sur l’exemple de

Jésus Christ et des Saints.

1. LA VERTU DE LA TEMPÉRANCE1779 La tempérance est la vertu qui nous modère dans la jouissance des plaisirsde cette vie.Elle se définit encore comme suit : elle est la vertu qui règle, dans des justeslimites, l’utilisation des choses qui attirent les sens et, particulièrement, le goûtet le toucher.

Le sentiment du plaisir selon les Philosophes 1780 Le sentiment du plaisir est connu surtout pratiquement. Rares sont les personnes qui le connaissent psychologiquement. Les philosophes se sont occupés des rapports entre le plaisir et la vie de l’homme.

La vertu de la tempérance se compose d’actes élémentaires qui, vus

spéculativement, facilement nous convainquent par leur vérité : mais il

n’en est pas ainsi dans la pratique.

Il est facile de pratiquer la vertu quand elle ne s’oppose pas à nos

passions et à nos penchants particuliers. Mais c’est quand elle les contrarie

qu’il nous est plus difficile de la pratiquer. Et très souvent il nous semble

même difficile. D’où l’énorme différence entre vertu observée de manière

spéculative et celle pratiquée effectivement en acte.

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1781 Les Épicuriens appelait le plaisir : « la suprême aspiration de la vie ». Les Stoïciens l’appelait essentiellement « la dépravation de l’âme ». Ils se trompaient les uns et les autres car ils exaspéraient dans les excès contraires.

Pour les Épicuriens, le plaisir sensible, l’utilisation des commodités de

la vie, la satisfaction complète de toutes les passions, même les plus

brutales, doit être la suprême aspiration de l’homme. L’Épicurien Horace,

revendique que le seul vrai plaisir est de plonger dans le vin.

À l’opposé de ces derniers, les Stoïciens déclarèrent que le plaisir est

une dépravation, c’est le pire des maux auxquels l’homme peut

s’abandonner.

1782 Parmi les philosophes, Aristote, Socrate et Platon enseignèrent qu’il ne faut pas craindre le plaisir, mais plutôt l’excès du plaisir. La doctrine catholique concorde avec eux.

La tempérance dans le monde et dans la Bible 1783 Cette vertu dans le monde est presqu’inconnue, raison pour laquelle le Christ dit aux Apôtres : « Le monde se réjouira, vous serez dans la tristesse, mais votre tristesse se changera en joie » (Jn 16,20).

Le monde fait l’éloge, respecte aussi cette vertu de la tempérance

seulement en ce qu’elle aide à conserver la santé ; mais au-delà de cela, il

n’en tient pas tellement compte.

Dans le catéchisme de Mussolini, une vraie parodie1 de notre Sainte

Foi, on voit la réponse à la demande sur le but pour lequel l’homme est

venu sur terre : « Pour le plaisir ! ».

Voilà où on en arrive, quand on ne compte plus sur Dieu. Le plaisir

devient la règle de la pensée, la règle de l’agir et il parvient à dégrader plus

que les anciens ont fait et il nous rend semblables aux animaux.

Les Saintes Écritures insistent sur la pratique de cette vertu quand elles parlent de mortification, de reniement, d’abstinence, de continence, de sobriété.

Sens large du terme 1784 La tempérance peut être considéré, d’abord, dans un sens large (latiori significatione). Ici on entend l’utilisation modérée et profitable de toutes les créatures qui doivent être considérées par nous comme un moyen pour

1 Nous traduisons “parodie” dans le sens d’une imitation caricaturale et méprisante.

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atteindre notre but dernier, dont nous devons nous servir « avec modération » (sicut in quantum).

Après avoir parlé du but de l’homme, St Ignace dit, comme corollaire,

que nous nous pouvons bien servir des créatures, mais seulement jusqu’où

elles peuvent nous aider à poursuivre notre but ; et nous devons les rejeter

énergiquement quand elles constituent un obstacle pour cette fin ultime.

2. LA TEMPÉRANCE DANS LE TOUCHER ET DANS LE GOÛT1785 Nous, cependant, nous considérons la tempérance en ordre spécialementà l’utilisation des plaisirs, au toucher et au goût, à la consommation desaliments et des boissons.

Tempérance et le toucher 1786 Peu de mots suffisent en ce qui concerne le toucher et je me limite à vous dire que vous devez prendre garde de ce qui peut susciter en vous la sensualité. Rappelez-vous que vous avez été appelé à faire progression de la vertu angélique. Vous avez été appelés à vivre dans le corps comme si vous n’aviez pas de corps. Vous devez considérer le corps comme le considéraient les Saints : un ennemi toujours prêt aux assauts et aux offenses, ennemi si terrible qu’il nous accompagne et qu’il s’identifie à nous.

Prenez garde de tout ce qui peut éveiller en vous la terrible passion.

Oh ! Nous n’avons pas besoin de la pousser, cette bête, pour qu’elle saute

contre nous et qu’elle nous tourmente !

Il nous sera profitable si, après une tentation, nous aurons la conscience

tranquille de ne pas y avoir consenti. Nous devons vivre sur la terre comme

si nous n’y étions pas, comme si nous étions sans corps, comme des vrais

anges.

Vous êtes destinés à être apôtres, vous devrez toujours emmener auprès

de vous cet habit candide, puisque, sans cela, vous ne pourrez pas vous

approcher de l’autel du Seigneur.

Vous devez considérer votre corps comme l’ennemi capital et être

toujours éveillés pour résister à ses assauts. C’est bien le plus proche de

nos ennemis, voire celui qui est déjà en nous.

Et, en même temps, vous devez le considérer comme une chose sacrée : « Vous êtes le temple de Dieu, la demeure de Dieu, l’édifice de Dieu » (cf. 1Co 3,16). Traitez-le avec ces considérations dont vous traiteriez les vases sacrées qui servent au Sacrifice. Ainsi, donc, la modestie qui maintient ordonnés les

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mouvements internes et externes vous accompagnera toujours, aussi bien quand vous êtes seuls que quand vous êtes accompagnés, le jour et la nuit. Et ce respect que vous devez à vous-mêmes, employez-le aussi avec les autres.

Considérez-vous comme quelque chose de grand et de sacré. Rien n’est

plus précieux que notre corps. St Paul dit : « Vous êtes le temple de Dieu,

la demeure de Dieu, l’édifice de Dieu » (cf. 1Co 3,16).

S’il mérite beaucoup de blâmes celui qui profane le temple matériel,

d’autant plus il en est pour celui qui profane le temple vivant de Dieu.

Votre corps a été sanctifié des eaux baptismales, oint par le saint chrême,

nourri par la chair immaculée du Christ et tous vous espérez d’être

convoqués au grand sacerdoce. Rien, donc, n’est plus sacré que votre

corps.

Prenez garde, chers jeunes, de tout ce qui peut affaiblir la tempérance

dans l’utilisation du toucher.

La modestie de Jésus Christ vous accompagnera toujours, dit St Paul,

que vous soyez tout seuls ou que vous soyez accompagnés. Dieu voit

toujours, lui qui trouve des taches dans les cieux. À lui, vous devrez rendre

compte de tout acte, petit soit-il. Il voit dans le secret de votre chambre,

dans l’obscurité de la nuit, dans la solitude.

Tempérance et le goût 1787 Vous devez, ensuite, exercer la tempérance sur le goût, dans la manière de manger et de boire.

Concernant le goût de manger et de boire : prenez garde de l’avidité.

Ne mangez pas avec la préoccupation de manger, de goûter, mais

uniquement pour soutenir votre corps, en mangeant pour vivre, et non pas

en vivant pour manger.

En faisant ainsi, vous renverseriez l’ordre établi par Dieu. Vous vous

défigurerez, avec ceux qui s’abandonnent au plaisir de la nourriture et de

la boisson. Et alors, vous ne serez capables d’aucun travail profitable.

Vous verrez s’éteindre en vous tout élan ardent et tout acte généreux.

1788 Nos ancêtres, en transgressant l’alliance divine, ont commis d’un seul coup beaucoup de fautes, mais, avant tout, ils ont péché de gourmandise. « La femme vit que le fruit de l’arbre était agréable à la vue et désirable pour acquérir l’intelligence ; elle prit de son fruit et en mangea ; elle en donna aussi à son mari qui était avec elle, et il en mangea » (Gn 3,6). C’est avant tout par le goût que Satan tenta notre Seigneur Jésus Christ dans le désert.

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L’intempérance dans la nourriture ouvre la porte à tous les vices,

spécialement au plus animalesque et nous rend semblables aux animaux

sauvages.

Tempérance dans la nourriture et la boisson 1789 Vous devez, depuis les années de votre Séminaire, vous habituer à la sobriété dans la nourriture et la boisson. L’avidité dans la consommation des repas éteint tout noble idéal, rend incapable d’un travail profitable et à l’acquisition de la vertu et ouvre la brèche aux passions les plus sombres, à l’incontinence qui rend triste l’homme et le dégrade à la condition des sauvages. Le manque de maîtrise dans la nourriture et dans la boisson entraine de la turpitude, mais de manière particulière l’intempérance dans la boisson alcoolisée pour les raisons suivantes : - Elle fait perdre plus facilement l’usage de la raison ;- Elle se convertit plus facilement en une habitude et, donc, elle est

difficilement corrigible ;- Les conséquences de l’intempérance dans la boisson sont plus funestes,

parce que plus scandaleuses et nuisibles à la santé ;- Parce que « le vin porte à l’intempérance » (cf. Ep 5,18).

Prenez donc garde de l’abus de nourriture et de boisson. L’abus de la

boisson est le plus défigurant, parce qu’il enlève l’usage de la raison et,

une fois que le vice s’installe, on ne parvient plus à s’en libérer. On ne sait

plus se corriger.

Je ne dis pas cela de manière absolue, parce qu’on peut tout quand il y

a le concours de la grâce de Dieu, mais, certainement, parmi les vices,

celui de la boisson est celui qui grandit avec l’âge et qui nous accompagne

jusqu’au tombeau.

3. DEUX SÉMINARISTES EN PERSPECTIVE1790 Considérez maintenant deux Séminaristes : le premier est tempérant etl’autre est emporté démesurément par la nourriture et la boisson.Le premier ne pense pas à ce qu’il devra manger, il ne pense pas à ce qu’ilmange tandis qu’il se trouve à table. Il ne pense pas, il ne se souviens plus de cequ’il a mangé, après le repas.Par contre, le deuxième, il se rend au repas même avant l’heure, avec la penséeet le désir. Pendant le repas, il est une seule chose avec le repas (totus in illis) ;il est plongé dans la satisfaction du besoin, il mange avec hâte et avidité. Après

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le repas, il parle de la nourriture qu’il vient de prendre, si cela l’a satisfait ou bien il s’en plaint si elle n’était pas de son goût.

Comme il est beau de voir un jeune tempérant, qui ne se donne aucune

préoccupation pour manger, mais il ne se nourrit que pour être, par la suite,

mieux disposé au service du Seigneur !

Confrontez-le avec un intempérant, un avide. Quelle différence !

Le tempérant ne pense pas à ce qu’il mangera. Pendant qu’il se nourrit,

il le fait presque automatiquement, et, après, il ne se rappelle pas ce qu’il

a mangé.

L’autre, par contre, se rend, par la pensée, longtemps avant le début du

repas, il commence ainsi à goûter la joie de la table, ainsi que la cloche qui

appelle à table, est pour lui la plus attendue ! À table, il est tout plongé

dans ce travail, tout concentré dans cette action. Il se plaint si le menu

n’est pas de son goût et, d’ailleurs, il le trouvera souvent mal préparé ou

de qualité inférieure.

1791 Dites-moi, lequel des deux vous plaît davantage ? Nous pouvons supposer que ce dernier, une fois devenu Prêtre, sera un festoyeur, un prêtre pour qui le budget ne satisfera jamais à ses besoins. Il sera un de ceux qui manqueront toujours de moyens pour le culte ou pour les bonnes œuvres. Peut-être mourra-t-il avec des dettes et de honte, étant donné qu’il bénéficiait d’une allocation plus que suffisante.

Qu’est-ce qu’on peut attendre de l’un ou de l’autre ?

L’un sera tout ardeur pour les choses de Dieu, généreux et il s’efforcera

de s’entrainer toujours vers l’acquisition de la vertu.

À propos de l’autre, par contre, nous pouvons penser qu’il n’ira jamais

trop loin dans la vertu. Il ne volera que comme la chauve-souris, ou le

hibou, et non pas comme l’aigle. Même s’il ne s’abandonnera pas aux

excès, surtout en celui de la boisson, il deviendra aboulique, sans énergie,

sans action et il deviendra l’objet de l’abomination.

Celui qui est atteint par ce vice, il ne demeurera pas longtemps caché.

On n’aura pas trop du mal à reconnaître celui qui est esclave de Bacchus

(le dieu grec du vin).

1792 « Ne vous faites donc pas tant de souci ; ne dites pas : “Qu’allons-nous manger ?” ou bien : “Qu’allons-nous boire ?” » (Mt 6,31). Faisons quelques exemples. Un jour, je fus invité par un Curé à une fête du village. J’y ai rencontré quelqu’un qui était encore clerc et qui m’avait surpris. Une fois devenu curé, il mourut avec beaucoup de dettes, malgré la générosité des paroissiens. Il en sera de

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même pour le Séminariste qui ne se maîtrise pas dans la nourriture et dans la boisson, et cela, même s’il ne se donnera pas en spectacle en montrant son état d’ivresse.

Formez-vous, chers jeunes, à maintenir, en toute chose, votre regard

tendu vers le ciel. Prenez garde contre le corps qui cherche à vous entrainer

vers la terre.

Même dans l’état ecclésiastique, il y a malheureusement cette passion.

On trouve souvent des prêtres qui consomment tous leurs avoirs pour

la nourriture. Où sont partis tous les biens et les rentes, pour qu’on se

retrouve à prier dans une église sale et désordonnée ? La table a bouffé

toute l’économie.

Si vous vous formez, à temps, à la tempérance, même par esprit de

pauvreté, vous n’abuserez de rien et vous aurez toujours de l’argent pour

beaucoup de bonnes œuvres.

4. LE TABAGISME1793 Je voudrais que vous preniez garde d’une habitude qui n’est pas interditepar les Sacrés Canons, mais qu’il serait souhaitable de ne pas assumer pendantque vous êtes jeunes : c’est l’habitude de renifler ou de fumer.À moins qu’on vous l’ait recommandé pour des raisons de santé, abstenez-vousen. Vous en gagnerez dans la santé et surtout dans l’économie. Ce sera unesomme de 150-200 lires chaque année que vous pouvez économiser etemployer pour des choses plus utiles, soit dans le culte, soit dans les œuvres decharité.

Bon gré mal gré, ici vous vous conformez à la vie commune : mais

vous serez maîtres de vous-mêmes si vous savez vous contenter du

nécessaire : si 5 ou 10 lires sont suffisantes pour votre nourriture, ne

dépensez pas 10 ou 15.

Vous vivrez cet esprit de tempérance et de pauvreté même dans

l’habillement, dans l’équipement de votre chambre et dans la recherche

des provisions.

Je profite de cette occasion pour vous dire quelque chose au sujet de la

consommation de tabac que ce soit en fumant ou en reniflant.

Les Sacrés Canons ne disent rien pour le désapprouver. Mais que c’est

beau si, par esprit de pauvreté, vous savez faire le sacrifice de ce plaisir

du tabac ! Combien d’argent vous pouvez économiser pour l’utiliser dans

des œuvres de culte ou de charité !

Personnellement, je ne vois pas la nécessité de fumer. Bien sûr,

l’habitude se crée dans la nature. Mais, si vous n’avez pas encore cette

habitude, ne cherchez pas à la contracter, à moins qu’il vous soit demandé

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par le bien des âmes. Même St Paul, en ce cas, disait : « Avec les Juifs,

j’ai été comme un Juif, avec les Gentils j’ai été gentil, pour gagner tous au

Christ » (cf. 1Co 9,20).

Mais, au-delà de ce cas, abstenez-vous, puisque, par ailleurs, il est

même déconseillé du point de vue de la santé. Vous savez combien de

maladies engendre la consommation du tabac, comme par exemple le

cancer.

Offrez volontiers ce sacrifice au Seigneur. Il se peut que le médecin

vous conseille de consommer du tabac : en ce cas, vous êtes dispensés.

5. LA MORTIFICATIONEnfin, ne ratons pas l’occasion pour exercer quelques actes de

mortification et de pénitence.

St Léon s’était proposé de ne jamais se lever de table sans poser

quelques actes de mortification.

Pourquoi ne pas agir ainsi, vous aussi ? Vous pouvez trouver beaucoup

de manières, sans être observés et en repoussant les particularités, comme

si c’était de la peste, parce qu’elles sont source de vanité et d’orgueil.

Je ne veux pas ainsi dire que vous ne pouvez pas prendre, parfois,

quelques plaisirs licites. Même Notre Seigneur Jésus Christ alla aux noces

de Cana, multiplia du pain et du poisson pour rassasier les foules et pour

nous montrer qu’il n’est pas péché de se réjouir de quelques plaisirs. « Tu

te réjouiras à cette fête » (Dt 16,4), on lit dans l’Ancien Testament.

L’Église elle-même n’impose jamais le jeûne le dimanche, afin que,

les jours de fête, nous puissions nous réjouir dans l’esprit et également

dans le corps. Tout cela ne s’écarte pas de la loi de Dieu.

1794 Aimez donc la tempérance et inspirez-vous des exemples des Saints et du Christ, qui participait aux repas, œuvra des miracles pour édifier les foules, mais souvent il répétait : si vous ne vous mortifiez pas, vous vous perdrez vous tous. La mortification est, selon l’Église : la compression des vices, l’élévation de l’âme, l’épanouissement des vertus et la récompense1.

Le Seigneur a déjà préparé une couronne pour ceux qui combattent, qui

gagnent et qui savent mortifier leur corps.

St Paul dit que même dans les cirques les joueurs oignent le corps et

jeûnent pour obtenir une couronne passagère ; à plus forte raison nous

1 L’expression latine employée par Conforti, pour parler de la mortification, est la

suivante : « vitia comprimit, mentem elevat, virtutem largitur et praemia ». Elle est

attribuée à Saint Grégoire le Grand.

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aussi, nous devons nous entrainer, alors que nous poursuivons une

couronne qui ne flétrit pas, une récompense éternelle.

Faites un peu d’examen de conscience et regardez s’il n’y a rien à

reformer et à renouveler en vous, puisqu’il ne suffit pas de croire, mais

nous devons travailler et conformer notre conduite à ce que nous croyons.

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Ghezzi P. Mario

Figure parmi les plus typiques des premiers Xavériens,

lié d’une sainte confiance envers les supérieurs,

apprécié par son esprit d’écoute discrète,

de conseil approprié et de gouvernement.

Né le 14.08.1902 à Sesto San Giovanni (Milan), entré à Parme le 14.10.1915, ordonné prêtre le 24.02.1927, envoyé en Chine le 07.10.1930, il y rendit un fructueux ministère apostolique grâce à ses talents de gouvernement, de conseil et de discrétion. Il souffrit trois ans de tortures au camp de concentration. Rentré en Italie en 1946, il fut Consulteur Général et maître de novices (324 devinrent Xavériens). Il meurt à Parme le 06.03.1967.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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15. PrièreParme, ISME, 15 juin 19211

INTRODUCTION Les Saintes Écritures nous invitent avec insistance à vivre le

commandement du respect envers les parents. Dieu est l’excellence et

donc à Lui on doit avant tout et de manière suréminente cette piété. Nous

tous nous devons vénérer Dieu, notre Père, parce qu’il est notre principe

premier et notre fin ultime.

Le premier acte qui explique cette piété est la prière. Tous sont tenus à

cultiver de toutes leurs forces l’esprit de prière, surtout vous qui aspirez

au Presbytérat et qui vous préparez à être les intermédiaires entre Dieu et

le prochain.

La prière et le prêtre Cette caractéristique émerge dans toutes les prières du prêtre : l’Office

divin n’est pas une prière privée, mais « pour toute l’Église » ; en cette

prière, le prêtre sent très vivant le sentiment de la fraternité, dans le

sacrifice divin, il prie au profit de « toute l’Église », de tout le peuple

chrétien.

Le prêtre doit être un homme d’oraison.

Saint Paul, en parlant de la prière, dit que « la piété est utile à toute

chose » (1Tim 4,8). À travers elle, l’homme s’élève à un degré surnaturel.

Je ne vous dirai aujourd’hui rien de nouveau concernant la prière. Mais

il y a des vérités qui ne sont jamais assez répétées et que, bien qu’on y

revienne souvent, la répétition sert toujours.

1. L’IMPORTANCE DE LA PRIÈRE

Dans l’Évangile Cette science est naturelle en nous et il faut la rendre actuelle parce que

nous devons être toujours animés d’une nouvelle ardeur.

1 De cette conférence du 15.06.1921, les notes manuscrites de St Conforti n’ont pas été

retrouvées. Suit uniquement le texte des annotations du novice Alessandro Chiarel.

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Il sera utile à notre pauvre cœur d’écouter et de rappeler la grande

considération que Notre Seigneur Jésus Christ avait sur la prière, lui qui

est notre Maître, le seul et le plus sûr, en toute circonstance.

La prière est l’invitation la plus pressante dans l’Évangile : on insiste

sur « la nécessité de prier toujours et sans se lasser » (Lc 18,1).

Nous y apprenons la manière la plus belle de prier, avec la prière du

« Notre Père » qui est considérée justement comme la profondeur de

l’infini et la synthèse de tous les enseignements de l’Évangile. Renan a

voulu établir une comparaison entre la prière que Platon adressa à Jupiter

avec le Notre Père. Il en conclut qu’entre les deux, il y a une distance si

grande comme entre le ciel et la terre, comme le divin et l’humain.

Dans la vie de Jésus La vie de Jésus Christ fut une prière continuelle, une hymne éternelle

de louange au Père divin. C’est ainsi que doit être notre prière : elle

animera toutes nos actions avec une intention droite et elle transformera

le travail en prière. En ce sens, on doit interpréter « la nécessité de prier

toujours et sans se lasser » (Lc 18,1). Que vous étudiez, que vous jouez,

que vous travaillez, si vous êtes guidés par l’intention droite, tout se

convertira en prière continuelle. Jésus Christ a toujours prié pendant sa

vie : il a prié quand il était enfant, au temple, il a prié au désert. Dans son

apostolat, il n’agissait pas sans avoir d’abord levé les yeux au ciel pour

prier et, par la suite, il rendait grâce au Père céleste. Il a prié au cénacle,

avant de commencer la Passion, puis dans le jardin du Gethsémani à trois

reprises. Sur la croix, son dernier soupir fut une prière : « en tes mains,

Seigneur, je remets mon esprit » (Lc 23,46).

Chez tous les peuples La prière a joui d’une grande considération chez tous les peuples. Tous

cherchent à prier Dieu de manière plus ou moins parfaite. Nous pourrions

rencontrer quelqu’un qui se déclare athée, mais nous ne rencontrerons

jamais un peuple athée. Plutarque disait : « Vous pouvez trouver un peuple

sans roi et sans monnaie, mais non pas sans religion ou sans Dieu ». Les

érudits ainsi que les hommes plus défavorisés, tous ont une religion,

polythéiste ou monothéiste, soit avec Mahomet soit avec Buddha. On dit

qu’il y a quelque peuple sauvage sans Dieu, mais il faut vérifier si c’est

vrai. Même les Indigènes des Amériques ont un culte pour la cause

suprême.

La nature elle-même nous fait pressentir ce besoin et nous oblige à le

satisfaire. Même ceux qui se déclarent athées, devant un danger

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quelconque, cherchent à implorer l’aide de Dieu. L’homme, selon un

ancien philosophe, il est à la fois un animal rationnel et un animal

religieux.

Chez les Saints Nous devons nous persuader de la nécessité et de l’excellence de la

prière en observant l’exemple des Saints : passez-les en revue et vous

verrez que les prêtres ainsi que les laïcs, tous étaient parfaits dans la prière.

La prière était toujours le secret efficace de leur chemin vers la sainteté.

Dans les écrits des Apôtres, à tout bout de champ, nous trouverons une

exhortation à la prière, si bien que même inconsciemment, ils glissent ce

conseil. Lisez, par exemple, le chapitre 11ème de l’Épitre aux Hébreux :

vous verrez comment on y décrit les effets merveilleux de la prière.

La prière doit être à la base de toute chose. Par elle, notre vie d’ici-bas

devient une conversation avec le ciel. Les saints, qui savaient apprécier la

valeur de la prière, étaient souvent en extase, emportés dans un état dans

lequel ils savouraient les joies du ciel. St Benoît, ainsi que tous les saints

moines contemplatifs, en mourant, montèrent au ciel pour continuer de

manière plus parfaite la vie commencée sur terre.

Nous devons considérer la prière comme une grande valeur pour

l’estime que les Saints en firent, eux qui doivent être nos guides dans la

voie de la perfection chrétienne.

2. LA NATURE DE LA PRIÈRE

Qu’est-ce qu’est la prière ? Le Catéchisme nous offre la meilleure définition de la prière :

« L’oraison est une élévation de l’esprit à Dieu ». Pour quelques instants,

nous menons une vie céleste, nous nous mettons en communication avec

Dieu. Qu’y a-t-il de plus grand que Dieu ? Nous considérerons un

événement inoubliable le fait de rencontrer une célébrité de ce monde !

Mais quelle distance entre eux et Dieu ? Devant Dieu, fût-ce un roi ou

même un pape, qu’est-il sinon que poussière ? À tout moment, nous

pouvons élever notre âme jusqu’à Dieu.

La prière commune, ensuite, est plus accueillie par Dieu, parce qu’elle

nous lie par le lien de la charité fraternelle. C’est un acte divin si bien

qu’elle nous met, plus que les anges, au même rang de Dieu : elle nous

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unit à lui dans une conversation familière. On n’a pas peur de s’adresser à

son père. Or, avant d’être le Seigneur, Dieu est Père et, avec lui, comme à

un père, on ne doit pas avoir peur de s’approcher pour lui manifester nos

besoins.

Les avantages Pour énumérer les avantages de la prière, il faudrait faire un long

discours.

La prière est lumière dans le doute. Elle est force dans la tentation. Elle

est la clef qui ouvre le cœur de Dieu. Le Seigneur l’a dit clairement,

plusieurs fois, dans l’Évangile : « Demandez, et l’on vous donnera ;

cherchez, et vous trouverez ; frappez, et l’on vous ouvrira (Mt 7,7). La

prière a une efficace souveraine. Si vous considérez bien la cause pour

laquelle maintes fois nous n’obtenons pas, c’est parce que notre prière

n’est pas faite avec foi et avec les dispositions recommandées. La prière

est lumière, force, protection, bouclier, bref, l’arme la plus puissante

contre les ennemis de l’esprit.

3. QUE DEVEZ-VOUS DEMANDER DANS LA PRIÈRE ?À mon avis, trois sont les intentions que vous ne devez jamais cesser

de demander.

D’abord la grâce de connaître votre vocation et d’y persévérer. C’est

la chose la plus importante, parce que du choix que vous avez fait dépend

toute votre vie. Si nous avons bien choisi, nous serons heureux même en

ce monde. Autrement nous serons comme des os disloqués. Essayez de

jouer avec un poignet foulé : tout mouvement que vous ferez sera comme

une flèche et une douleur qui vous atteint. Ce qui arrive dans l’ordre

physique, se passe également dans l’ordre moral. Cherchez à être sereins

concernant votre vocation, si votre voix de la conscience vous le confirme,

ainsi que votre Père Spirituel. Priez le Seigneur qu’il vous fortifie.

Ensuite, demandez à Notre Seigneur qu’il vous accorde les vertus

théologales où se fonde tout le Royaume de Dieu, toute la perfection

chrétienne : une foi vivante, une ferme espérance « pour que le monde

croie en toi » (Jn 17,21), comme demandait souvent St Augustin. Quand

Notre Seigneur est apparu à St Jean de la Croix, il demanda au religieux :

« qu’est-ce que tu me demandes en récompense de toutes les peines

endurées pour ma gloire ? ». St Jean lui répondit : « Je ne veux ni

consolations, ni la prospérité de la Congrégation, mais que je puisse

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souffrir et être méprisé pour votre amour ! (Domine, pati et contemni pro

te) »

Enfin, demandez le don de la persévérance : c’est la grande grâce qui

couronne toute l’existence. Maintenant nous pouvons avoir la paix du

cœur et être contents. Mais vous aurez des difficultés, des tentations et des

hésitations. Alors, ne confions pas en nos propres forces car, certainement,

nous allons tous tomber. Mais répétons : « Je peux tout en celui qui me

donne la force » (Ph 4,13). Prions et le Seigneur, le Dieu de la force,

viendra à notre aide. Nombreux sont ceux qui commencent bien et

nombreux sont également ceux qui ne persévèrent pas. Je connais des

camarades à moi qui m’édifiaient beaucoup. Ils ont commencé à se

refroidir, à boîter, ils parvinrent même à apostasier et ils abandonnèrent

leur état de vie. Priez le Seigneur qu’il vous conserve purs. « Nous ne

pouvons être purs qu’avec l’aide du Seigneur », dit la sagesse de Salomon.

Qu’il en soit de même pour vous.

Perfectionnez en vous l’esprit de prière. Examinez-vous bien pour

savoir comment vous avez fait vos pratiques de piété. Les grâces viendront

en proportion à notre confiance. Le Seigneur ne demande qu’un peu

d’humilité et, de sa part, il nous donne beaucoup plus que ce que nous

osons demander car il voit tous nos besoins, même ceux dont nous n’avons

pas la conscience.

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Ambrico P. Vincenzo

Du groupe, il a vécu le plus longtemps,

grand promoteur de la charité du Christ

dans la vie fraternelle en communauté et dans l’Église locale.

Il sut fonder son apostolat

sur un zèle capable d’affronter toute difficulté,

avec une foi active et une charité constante.

Né le 02.09.1902 à Grassano (Matera), entré à Parme le 27.08.1916, ordonné prêtre le 24.02.1927, envoyé en Chine le 11.03.1928 par Mgr Conforti qui lui dit : « La charité du Christ supporte tout, elle fait confiance en tout, elle espère tout, elle endure tout parce qu’elle est forte comme la mort. Elle embrasse le temps et l’éternité » (cf. 1Co 13,17). Il vécut cela surtout au camp de concentration (1942-1944). En Chine (1928-1946) et puis au Mexique (1952-1999), il se dédia à la formation intellectuelle et chrétienne de milliers de jeunes en accompagnant nombreux religieux dans la sequela Christi. Il meurt à Mazatlán le 26.02.1999.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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16. ConfessionParme, ISME, 8 juillet 1921

INTRODUCTION Vous connaissez le célèbre adage « Ab assuetis non fit passio » (des

choses habituelles ne naît pas la passion, c’est-à-dire, on ne fait pas

attention aux choses habituelles). Et cela peut arriver aussi aux personnes

consacrées qui font profession de piété. Ne vous étonnez donc pas, si

aujourd’hui je vous invite à méditer sur une piété souveraine que vous

pratiquez chaque semaine, ou plus souvent, selon les nécessités

particulières : la Confession. Je ne doute absolument pas sur votre piété,

mais, l’adage cité ci-haut nous dit que les choses ordinaires répétées

souvent ne suscitent plus d’émotion. Je sais que même les personnes

ferventes ont besoin que, de temps en temps, quelqu’un leur rappelle la

grandeur et les effets admirables de ce sacrement. Avant tout, il faut avoir

un grand concept de ce sacrement de la Confession.

1. LES EFFETS DE LA CONFESSION1. La grâce sanctifiante et sacramentelle1795 La Confession accorde la grâce habituelle. Ce sacrement nous fait passerde l’état de pécheurs à l’état de personnes justifiées, et, si nous sommes dansla grâce, elle confirme, établit et approfondit la grâce habituelle. Elle donneensuite la grâce sacramentelle qui est lumière, force et souplesse. C’est la raisonpour laquelle les Saints aimaient se confesser fréquemment.

En nous référant à la Doctrine du Concile de Trente, nous voyons que

la Pénitence est appelée « tribunal du pardon », « bain salutaire qui se fait

dans le précieux sang de Notre Seigneur Jésus Christ, par lequel sont

guéries toutes les plaies de notre âme ». Notre Seigneur ne s’est pas limité

à nous adopter comme ses fils en nous lavant dans les eaux baptismales ;

ou bien à nous confirmer comme ses soldats avec l’onction du saint

chrême et de nous avoir admis à sa Sainte Table, en nous donnant toute sa

personne comme notre nourriture. Tout en connaissant notre fragilité, il a

voulu instituer le sacrement de la Pénitence, par lequel il oublie toutes nos

offenses, à condition que nous le recevions avec les bonnes dispositions.

Qu’il a été bon le Seigneur envers nous ! Souvenons-nous de tout cela et

réfléchissons sur les effets merveilleux que ce sacrement divin nous apporte.

À l’instar de tout autre sacrement, la confession confère la grâce

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sanctifiante et la grâce sacramentelle qui donne une force nouvelle, une

certaine souplesse et ardeur dans la pratique du bien. Pour quelle raison

nous sentons-nous plus entrainés et plus fervents après avoir fait la

confession ? C’est en vertu de la grâce sacramentelle.

2. La connaissance de soi1796 Connaître soi-même est la chose la plus difficile et la plus nécessaire pourdevenir meilleur. Nous nous examinons, ici, tels que nous sommes devant Dieudans les pensées, dans les affections, dans les paroles et dans les œuvres.

Un autre grand bienfait que ce sacrement confère : il nous aide à nous

connaître nous-mêmes. Qu’est-ce qui peut nous aider davantage dans cette

connaissance, plus qu’un examen de conscience, par lequel nous

investiguons toute notre intériorité ? Même les philosophes anciens

inculquaient toujours la valeur et l’importance du « connais-toi toi-

même ». Dans l’examen nous évoquons toutes nos fautes, notre caractère.

Nous mettons, comme dit St Bernard, nous-mêmes face à nous-mêmes.

3. L’humiliation de soiCette connaissance ne peut être que le fruit d’une vraie humilité : et si l’humilitéest le fondement de la perfection chrétienne, comment ne pas reconnaître dansla confession un moyen très efficace de perfection chrétienne ?

La confession suscite en nous un sentiment d’humilité : il n’est pas

possible de revoir toutes nos misères sans nous sentir humiliés et

confondus par notre nullité et par la grande misère que nous sommes, à

cause de nos péchés. Le Miserere, si beau et émouvant, met sur nos lèvres

le rappel de notre misère : « ma faute est toujours devant moi » (Ps 50,5).

Cette humiliation est salutaire, parce qu’elle laisse entendre et pose dans le

cœur l’envie de réparer notre passé par une vie sainte. Cette humilité est très

bienfaisante, parce qu’elle est le fondement de toute la perfection chrétienne.

4. Le réconfort1797 Enfin, une autre utilité : les conseils et les réconforts de la part duConfesseur. La consolation qui vient de la pensée que la faute a été remise.

Dans la confession nous pouvons toujours trouver la direction, le

réconfort. Il suffit de voir dans le prêtre confesseur, Jésus Christ en

personne : il est le maître qui nous indique le mal à fuir et le bien à

pratiquer ; il est le médecin qui nous indique les remèdes les plus

opportuns pour ne pas rechuter dans le mal ; il est le père qui

amoureusement nous accueille ; il est le guide qui nous trace le droit

chemin du bien. Auprès du confesseur, nous trouvons toujours lumière,

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conseil et réconfort. La confession nous offre la paix du cœur, si nécessaire

pour progresser dans la vie vertueuse. Nous ne pourrons jamais avancer

dans les doutes et les angoisses. Après une confession bien faite, le ciel

nous semble encore plus beau, les personnes qui nous entourent nous

semblent encore plus chères. Nous tous nous sommes contents de la joie

qui faisait chanter le psalmiste : « Grande est la paix de qui aime ta loi »

(Ps 118,165). Tout cela devrait nous pousser à chercher la confession avec

une grande ferveur et un esprit de foi. Efforçons-nous d’éviter certains

défauts qui sont le fruit de l’adage : « Ab assuetis non fit passio » (on ne

fait plus attention aux choses habituelles). Que cela ne vous arrive jamais.

2. DÉFAUTS DANS LA CONFESSIONQuels sont les défauts ? Je me limite à en citer les plus fréquents.

1. Manque de pureté d’intention1798 Celui qui se confesse pour apparaître, commet un péché. Celui qui se confessepar habitude ou parce que tous le font, manifeste une intention imparfaite.

Je ne parle pas ici de ceux qui s’approchent de la confession pour des

raisons humaines, car nous savons que la moralité de l’acte dépend de

l’intention de celui qui le commet. L’intention n’est pas droite quand je

me confesse par habitude, ou parce que le confesseur vient en

communauté, ou parce que les autres se confessent. Il faut s’approcher de

la confession avec la conscience d’en avoir effectivement besoin, pour

purifier l’âme, pour plaire au Seigneur et pour se procurer l’énergie

nécessaire pour faire le bien. Toute autre raison doit être exclue.

2. Manque de recueillement1799 Ne pas considérer la grandeur de l’acte du sacrement que l’on reçoit.

Il arrive souvent aux consacrés qui s’approchent régulièrement du

sacrement de la confession, de négliger le recueillement préalable à la

confession. Voyez, par exemple, quelqu’un qui ne se confesse plus depuis

plusieurs années : il édifie par sa foi et par ses sentiments, tandis qu’il se

confesse ! Par contre, les consacrés peuvent se confesser sans trop

réfléchir, sans recueillement, peut-être parce que la confession est devenue

une chose habituelle. Pour éviter ce défaut, souvenez-vous de ce que la foi

enseigne. Quand nous allons chez le confesseur, c’est auprès de Jésus lui-

même que nous nous rendons. C’est notre âme qui va se plonger dans le

précieux sang du divin Rédempteur. Pensez à la grande joie du ciel pour un

pécheur qui se convertit, plutôt qu’à la situation des 99 justes qui n’en ont pas

besoin. Pensez à la joie des anges qui nous voient humiliés et repentis à cause

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de nos manquements. Ces pensées devraient avoir un grand effet sur notre

âme et nous pousser à chercher la confession comme si c’était la dernière fois.

3. Superficialité dans l’examen de conscience1800 Superficialité dans l’examen : il n’est pas difficile de nous rappeler nosfautes quand nous nous confessons souvent car tout est clair devant nos yeux.

Les consacrés peuvent tomber dans le défaut de la superficialité car ils

sont habitués aux pratiques de piété. Ils jettent un coup d’œil rapide sur

les actes les plus importants et c’est tout. Si, par contre, ils faisaient un

profond examen de conscience, s’ils cherchaient à dévoiler l’intériorité,

combien de pensées de vanité trouveraient-ils ? Combien de paroles

déplacées, combien d’actions faites sans perfection ou avec une intention

moins droite ! Il est vrai que nous ne sommes pas obligés de confesser les

péchés véniels, mais laissons cette liberté aux autres et, de notre part,

cherchons plutôt à tendre vers la perfection. En faisant l’examen, il faut

une plus grande attention et demandons-nous : après beaucoup de

confessions, pourquoi sommes-nous toujours les mêmes ? Pourquoi

tombons-nous toujours dans les mêmes défauts ? « Connais toi-même ! »

4. Superficialité dans le repentir1801 Superficialité dans la douleur : le repentir est indispensable.

Un autre défaut est le manque de sincérité. Je ne dis pas de laisser de

côté les péchés graves, parce qu’alors nous précipitons en bas, au lieu de

monter. Mais il faut éviter de justifier certaines fautes ou de passer sous

silence certaines autres qui nous laissent dans le doute. Attention à ne pas

avaler des scrupules. Il est vrai que l’Église affirme que le pénitent peut

être tranquille, tout en ne confessant pas les péchés dont il n’est pas sûr,

car il n’est pas obligé de l’avouer. Mais, certainement, il vaut mieux tout

accuser avec sincérité, aussi bien les doutes que les certitudes. Souvenons-

nous que dans la confession nous parlons à Dieu, face auquel tout est

présenté clairement et, pour lui, même les vertus et les justices ne sont

qu’un chiffon sale, comme il est écrit dans les Saintes Écritures. Il faut

confesser même les petites choses, sans laisser de côté les circonstances.

Cela servira au directeur à acquérir une plus grande connaissance de nous-

mêmes et à nous prodiguer des directives plus opportunes.

5. Légèreté dans la bonne résolution1802 La contrition a deux aspects, un concerne le passé, l’autre l’avenir.

Un autre défaut est la superficialité de la bonne résolution. Le

catéchisme enseigne qu’en formulant une bonne résolution, il faut prévoir

également la fuite des occasions qui peuvent être cause de péché, aussi

bien les causes graves qu’il faut éviter immédiatement, mais aussi celles

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qui peuvent conduire au péché véniel. La bonne résolution est comme la

deuxième partie du profond regret, parce que la première est la

componction qu’on ressent pour les fautes du passé et le profond regret

des péchés, tandis que la bonne résolution, qui vient naturellement de

l’aveu, est la manifestation de la bonne volonté de ne plus tomber dans le

péché que nous venons de détester. Si, par exemple, je sais que dans la

conversation d’un tel groupe on a l’habitude de murmurer et de manquer

ainsi de charité, je tâcherai d’éviter ces occasions. Si je sais qu’un tel livre

suscite des sentiments qui ne sont pas tout à fait saints, je promets d’en

faire sacrifice au Seigneur. Si l’amitié avec un tel confrère ou une telle

personne suscite en moi trop de sensibilité, je promets de l’éviter. Chers

jeunes, examinez-vous et vous verrez, à la lumière de la foi et selon la doctrine

catholique, si, réellement, vous n’avez rien à remédier. Si vous savez toujours

éviter ces défauts, vous expérimenterez toujours l’efficacité de la confession.

Épilogue Le sacrement de la pénitence est le moyen le plus efficace de

sanctification. Je vous l’affirme et j’y insiste en paraphrasant St Alphonse :

« approchez-vous de la confession comme si c’était la dernière de votre vie ».

Quelle sorte de confession allez-vous faire si votre Ange gardien vous disait :

« C’est la dernière que tu fais. Après quoi, tu te présenteras devant le tribunal

de Dieu où tu n’auras plus besoin de confession ». Quel recueillement, alors !

Nous chercherons par tous les moyens à assumer toutes les dispositions

requises ! Et pourtant, il y aura une confession qui sera notre dernière

confession, mais nous ne savons pas laquelle ni quand. En particulier, je vous

recommande de vous procurer une sincère componction. C’est la chose la

plus importante. Sans le profond regret, la confession est nulle, voire elle

devient un sacrilège. Je vous dis ce que je répète continuellement aux

adolescents, quand je leur donne la catéchèse : suscitez en vous un profond

regret ! Vous n’avez qu’à considérer la gravité du péché, ce qui a valu le

sacrifice du Christ. Il suffit d’évoquer un instant ces considérations sans pour

autant y faire une longue méditation. Si, par contre, vous ne pensez pas avoir

assez de regret pour les fautes que vous avez commises depuis la dernière

confession, cherchez alors une faute grave que vous avez avouée dans le passé

et sur celle-là vous concentrez votre regret. Vous assurerez, ainsi, l’effet d’une

bonne confession. Imitez l’exemple des Saints et ayez pour ce sacrement toute

l’estime qu’il mérite. St Charles Borromée, chaque jour, après avoir fait une

heure de méditation, avant de célébrer le sacrifice divin, en ne se croyant

jamais assez digne, il se confessait chez son vicaire.

Imitez les saints et vous expérimenterez, comme eux, les effets

admirables de la confession.

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Garbero P. Pietro

Ouvert d’esprit et chaleureux dans les relations,

il fut compréhensif et compétent dans ses charges de Vicaire Général

en Chine et dans la Direction Générale.

Né le 12.01.1902 à Mombaldone (Asti), entré à Parme le 29.11.1916, ordonné prêtre le 24.02.1927, envoyé en Chine le 14.04.1927, il fut aussi le Vicaire Général de Cheng Chow. S’il ne vit pas les affres du camp de concentration, il sut documenter fidèlement, par des livres, le bien des confrères pendant les persécutions en Chine. Appelé en Italie en 1946, il sera Substitut du Supérieur Général pendant vingt ans avec un sens d’humanité et de cordialité très caractéristiques. Au terme de sa vie, il fut au Brésil (1967-1970) et il mourut à Parme le 19.07.1977.

1er NOVICIAT RÉGULIER

- personnages -

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17. Tentations contre la vie religieuseParme, ISME, 22 août 1921

1. TENTATIONS ET NOVICIATLa présence des tentations1803 L’homme, fût-il élevé au plus haut degré de perfection, n’est jamaisentièrement à l’abris des tentations. Mais, dans la vie, il y a des périodes danslesquelles les tentations et les épreuves se font sentir de manière plus violente.

Il y a une chose dont on n’est jamais exemptés, quel que soit le degré

de perfection qu’on aura atteint : la tentation. Et le démon cherche à la

susciter avec une plus grande fréquence pendant le temps du noviciat,

surtout dans le temps qui précède la profession des vœux, parce que ces

derniers sont prononcés justement pour mener une guerre acharnée contre

les trois malheureuses concupiscences, qui provoquent toute sorte de mal.

Par la profession religieuse, nous proclamons leur mort, leur

ensevelissement. Et voilà que le démon ne peut pas supporter cette grande

défaite. Il ne peut pas supporter que s’accomplisse un pas si grand et qui

est tellement déterminant dans la vie de la perfection.

Je vous parlerai de cette période pour vous mettre en garde contre le démon

et pour découvrir ce piège qu’il prépare pour vous dévier d’un pas si décisif.

Noviciat : temps de tentation 1804 Le temps du noviciat est très souvent une de ces périodes de tentation. Et pourquoi ? Parce que c’est un temps de lutte. Il s’agit d’abattre les trois concupiscences qui sont à l’origine de chaque vice et mauvaise passion. Les vœux devraient être la mort et l’ensevelissement de ces trois concupiscences. Et voilà que spécialement à l’approche de la profession religieuse, surgissent les doutes, les tempêtes, les soucis.

2. CINQ TENTATIONSa) Suis-je vraiment appelé ?1805 Un premier souci ou doute soit-il, pourrait être le suivant : « Suis-jevraiment appelé à la vie religieuse et apostolique ? ». Oui, si vos intentions sontdroites et s’il n’y a pas d’autres buts cachés. Oui, si vous avez prié pour avoirlumière et force, si vous vous êtes conseillés auprès du Confesseur.

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Le démon peut vous mettre en tête : « Est-ce vraiment la volonté de Dieu

que je sois dans l’état de vie religieuse ? » Considérez-vous comme des êtres

appelés. Vos intentions de plaire à Dieu sont droites. Vous avez prié et vous

avez demandé sa lumière. Si, en priant, vous avez senti le cœur s’élargir, si le

Directeur Spirituel vous a encouragés, après lui avoir donné l’opportunité de

vous connaître, allez de l’avant avec la consciente assurance de votre vocation.

Par ailleurs, qu’est-ce qu’est la vocation à l’état religieux ? La

meilleure de toutes les définitions est celle de St François de Sales : « La

vie religieuse est une volonté résolue, accompagnée d’un élan naturel,

parce que nature et grâce se donnent la main et vont toujours ensemble,

parce que les deux viennent de Dieu ». Tous peuvent avoir la vocation et

la demander au Seigneur. « Si tu veux… », a dit Notre Seigneur Jésus. Si

vous êtes persuadés de la rectitude d’intention, si vous avez prié, allez de

l’avant, et repoussez cette pensée, comme si c’était une tentation.

b) Comment être persévérants ?1806 Un deuxième doute : « Est-ce que je persévèrerai jusqu’au bout dans la vie quej’entreprends, ou bien ne serai-je pas moi aussi parmi ceux qui abandonnent ? ». Sinous devons compter uniquement sur nos propres forces, nous arions raison dedouter : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire » (Jn 15,5). Mais nous devons nousconfier à la grâce de Dieu. « Je peux tout en celui qui me donne la force » (Ph 4,13).Si beaucoup ont persévéré, nous aussi nous persévérerons.

Une autre objection ou tentation que le démon peut vous présenter : « Est-

ce que je serai fidèle jusqu’au bout ? Ne serai-je pas parmi ceux qui ayant mis

la main à la charrue se tournent en arrière et, par la suite, demandent le brevet

de sécularisation que le pape Léon XIII appelait le passeport pour l’enfer ? »

C’est sûr : si nous devions nous baser sur nos propres forces, nous

aurions à craindre et à désespérer, parce que Notre Seigneur lui-même a

dit : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire » (Jn 15,5). Nous connaissons

bien combien nous sommes inconstants : aujourd’hui nous prenons des

bonnes résolutions, demain nous tombons. Mais la grâce du Seigneur vient

à notre aide car, comme dans l’existence de David, elle suffit pour nous

faire marcher à une grande vitesse dans la voie de la perfection et à nous

rendre, d’une certaine manière, tout-puissants, comme disait Saint Paul de

lui-même : « Je peux tout en celui qui me donne la force » (Ph 4,13). Et le

Seigneur répondait à Paul : « Ma grâce te suffit » (2Co 12,9). Il ne lui

épargna de la tentation. Il a voulu, par contre, qu’il soit constant dans le

combat. Le Seigneur lui-même nous en donne les moyens et nous dit :

« Vous pourrez persévérer, comme tant d’autres l’ont fait au milieu de

leurs difficultés ».

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c) Comment faire face aux difficultés ?1807 Un troisième doute : « Mais comment nous rendre supérieurs à tant dedangers, à tant de difficultés ? Comment faire face à la solitude, à l’abandon,aux mauvais exemples, au manque de soutien spirituel ? » Alors je réponds : leSeigneur ne permet jamais que nous soyons tentés au-delà de nos forces. LeSeigneur donne à tous la grâce nécessaire. « Tu marcheras sur la vipère et lescorpion, tu écraseras le lion et le Dragon » (Ps 90,13). « L’amour vainc tout »(omnia vincit amor) et si nous gardons la ferveur de la charité, nous seronssupérieurs à toute épreuve.

Le démon pourrait exagérer les difficultés. Nous pourrons alors nous

demander : comment résister au milieu des gens corrompus, sans aucun

réconfort ?

Ne laissez jamais qu’on vous gagne. Ne vous mettez pas en danger sauf

si les nécessités vous le demandent. Alors le Seigneur sera, d’une certaine

façon, obligé de vous donner des grâces plus abondantes pour pouvoir les

dépasser. Dans la vie des Saints, combien des difficultés ! Voilà qu’au

milieu de toutes les tribulations et les préoccupations, ils étaient si remplis

de consolations jusqu’à dire : « Je déborde de joie au milieu de toutes mes

tribulations » (2Co 7,4). Vous pourrez donc être convaincus de la certitude

de St Paul : « L’amour vainc tout » (charitas omnia vincit, cf. 1Co 13,8).

Les moyens ne vous manqueront pas : vous aurez toujours le réconfort

de la prière, de la méditation et du Sacrifice Divin. Chaque jour, vous

pourrez avoir près de vous Jésus, dans le contact le plus intime avec Lui.

Vous avez lu les lettres du père Caio Rastelli : « Je ne crains aucune

difficulté, écrivait-il, rien ne m’effraie. Le pain des Anges est mon

réconfort et il me suffit. Il suffit que mon esprit se dilate, peu importe mon

corps ». Si vous êtes des hommes d’oraison, les difficultés ne vous

effraieront en aucun moment. Vous pourrez dire avec le Psalmiste : « Tu

écraseras le lion et le Dragon » (Ps 90,13). « Qu’une armée se déploie

devant moi, mon cœur est sans crainte » (Ps 26,3).

Voilà ce que pouvait dire le psalmiste de l’Ancienne Alliance, en

observant qu’il ne pouvait pas avoir la ferveur qui peut animer les fidèles

de la Nouvelle Alliance. Combien plus, nous qui avons été renouvelés

dans la loi, par l’exemple de la charité du Christ et par ses promesses !

d) Comment laisser sa famille ?1808 D’autres pourraient avoir cette difficulté : « Comment laisser un père, unemère, une famille, alors qu’un jour, ils auront besoin de moi ? » Quand leSeigneur appelle, nous devons être prêts à tout sacrifier : « Celui qui aime sonpère ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi » (Mt 10,37). « Décharge

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ton fardeau sur le Seigneur : il prendra soin de toi » (Ps 54,23). Dieu prendra soin de vos bienaimés. L’expérience nous apprend que les familles de ceux qui ont fait sacrifice de leurs bienaimés aux Missions, ont été prospères, même matériellement. Ste Jeanne de Chantal quitta son père et son fils unique pour se consacrer à Dieu.

L’astuce du tentateur nous suggère le doute : « Comment peux-tu

abandonner ton père et ta mère, une famille qui peut-être aura besoin de

toi ? N’est-ce pas piétiner les lois de la nature ? Pourquoi, pour suivre les

conseils évangéliques, veux-tu négliger les préceptes ? ».

Le démon connaît bien la Sainte Écriture. Mais nous ne pouvons mieux

lui répondre que par les paroles de l’Évangile : « Celui qui aime son père

plus que moi, il n’est pas digne de moi » (Mt 10,37).

Dieu est le maître de chacun de nous et il peut bien demander ce

sacrifice, de même qu’il a pu demander à Abraham le sacrifice de son fils

unique. N’ayons pas de soucis pour nos chers parents. La providence y

pensera. J’ai constaté que les familles qui ont donné des enfants pour

l’apostolat, ont vécu toujours dans la prospérité même matérielle : le

Seigneur ne peut pas laisser sans récompense celui qui, de bon cœur, fait

sacrifice de ses bienaimés pour le Seigneur. La réponse nous vient de

l’Évangile : soyons-en donc rassurés.

Écoutez bien : l’état de vie le meilleur est toujours celui pour lequel le

Seigneur nous appelle, la consécration dans le laïcat ou dans la prêtrise ici

en Europe. Si quelqu’un est appelé à la vie apostolique, cet état est le

meilleur pour lui : c’est ce qui lui convient le mieux et où il trouvera la

perfection car c’est ce que le Seigneur veut de lui. L’état de vie religieuse

est de loin plus parfait de l’état du clergé séculier, parce que tout ce qu’on

fait par vœu est doublement méritoire.

e) Et si ma santé ne tient pas ?1809 D’autres encore, pourraient douter de leur santé faible. À cela, jeréponds : si les Supérieurs estiment que la santé soit suffisante pour affronterla vie apostolique, allez-y avec courage. Le bienheureux Jean-Gabriel Perboyre(1802-1840) était faible, et pourtant, il a pu résister aux malheurs de toute sorteet, ensuite, il a couronné par le martyre son apostolat en Chine. Par ailleurs,dans les Missions, « il y a de nombreuses demeures » (cf. Jn 14,2) et lesSupérieurs sauront nous confier la tâche qui nous convient. Les Missions neprésentent plus les mêmes difficultés que celles du temps de St François Xavier.

Il peut y avoir une autre objection : le missionnaire part abîmer sa santé

et il raccourcit ainsi ses jours ici-bas ! Qu’il est inutile pour une personne

peu vigoureuse d’affronter les vicissitudes de la vie missionnaire ! Le

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maître de la vie de chacun est Dieu seul et il peut nous la demander quand

il veut. Par ailleurs, il se peut que quelqu’un, en mission, se conserve sain

et robuste, tandis que, peut-être en restant chez lui, il serait déjà mort de

maladie. Concernant la santé, il faut se soumettre à l’avis des Supérieurs.

Pour être missionnaires, il ne faut pas grand-chose. Un certain niveau de

santé est suffisant. Il suffit que quelqu’un ne souffre pas de graves

infirmités, qu’il ne soit pas estropié, qu’il n’ait pas des maladies

infectieuses au dernier stade car, en ce moment-là, nous devrions dire « Ne

tente pas le Seigneur ton Dieu » (cf. Lc 4,12).

« Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père » (Jn 14,2), a

dit Notre Seigneur. Et les Supérieurs, qui sont pères, sauront destiner

chacun selon ce qu’ils croiront plus opportun, en tenant compte des

qualités physiques et morales. Aujourd’hui il n’y a même plus autant de

difficultés que par le passé, comme à l’époque de François Xavier ou de

Guillaume Massaïa (1809-1889). En plus, en Chine, on peut mener une

vie relativement aisée avec les mêmes conforts dont nous bénéficions en

Europe.

Ne tenez pas compte de cette objection. Imitez Jean-Gabriel Perboyre :

il avait une constitution physique très fragile et, pourtant, le Seigneur lui

a donné un apostolat glorieux, couronné par le martyre. Il l’a appelé et il

a su lui donner les moyens pour accomplir sa mission. Le Seigneur se sert

des choses misérables pour confondre les grands de ce monde et pour

réaliser ses merveilles. « Ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que

Dieu a choisi, pour couvrir de confusion ce qui est fort » (1Co 1,27).

3. LA MEILLEURE ATTITUDE : VOLONTÉ FERME ET CONSTANTE1810 Et, pour conclure, St François de Sales écrit que la meilleure preuve de lasincérité des vocations est la volonté ferme et constante de persévérer dansl’exercice de vie qui est propre de l’état qu’on a embrassé ou qu’on souhaiteembrasser. Toutefois cela n’empêche que notre esprit traverse, par moments, deszones de turbulences dues au physique, aux tentations ou à d’autres causes externes.Mais nous ne devons pas discerner notre vocation à partir de ces secousses.

Souvenez-vous de ces conseils, allez de l’avant avec la certitude

morale d’avoir la vocation, pour recevoir, par la suite, la récompense de

votre bonne collaboration.

Je prie Dieu pour qu’il vous confirme dans les saintes intentions. Qu’il

vous accorde la grâce de vous donner à lui avec un bon élan, maintenant

par la profession des vœux et en offrant joyeusement votre vie comme

victimes sur l’autel, afin que Dieu l’utilise pour sa plus grande gloire.

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Turci P. Romano

Doué de talent musical mis au service de l’animation missionnaire,

il fut missionnaire et médecin en Chine et en Italie,

en unissant aux soins corporels la purification de l’âme

Né le 05.10.1902 à Castiglione (Ravenne), entré à Parme le 14.11.1916, ordonné prêtre le 24.02.1927, il se donna à l’animation et promotion, dans les villages, de l’initiative « Pain pour les missionnaires », pour soutenir les besoins des communautés. Envoyé en Chine le 07.11.1934, il se dédia aux soins des malades et à l’organisation des écoles. En 1939, il fut appelé en Italie pour les études de médecine et depuis 1948, il vit dans la clinique xavérienne de Naples-Posillipo, jusqu’au terme de sa vie. Il meurt dans cette clinique le 03.06.1972.

1er NOVICIAT RÉGULIER

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18. NoviciatParme, ISME, 15 août 19261

Sous les auspices de la Reine des Apôtres 1811 Je suis content, chers jeunes, de vous avoir introduits dans notre Institut en ce jour de la solennité de l’Assomption de la Très Sainte Vierge Marie. Je suis content parce que vous commencez ainsi votre carrière sous les auspices de la Vierge Marie, la plus auguste des reines, la plus tendre, la plus douce et la plus aimée, parmi toutes les mères. Je pense qu’elle est en train de vous suivre du Ciel avec un regard de particulière bienveillance et bonté, parce que, entre tous les titres dont elle est nommée dans la Sainte Liturgie, elle aime être appelée la Reine des Apôtres.

Le port de l’habit religieux 1812 Considérez l’acte solennel que vous venez d’accomplir en portant l’habit religieux. Cet habit doit être pour vous un ami, un ange gardien, une voix. Cet habit doit vous parler par sa forme et par sa couleur. Il doit vous parler de modestie, de pureté, de perfection et de toutes les vertus propres d’un ecclésiastique, et surtout d’un ecclésiastique qui fait profession des Conseils Évangéliques.

1813 Veillez à ce que cet habit ne soit pas pour vous, une voix de reproche. Il le serait si votre vie n’est pas digne de votre vocation. Mais, j’ai confiance que cela ne vous arrivera jamais. Au contraire, j’espère que cet habit sera pour vous, une voix de louange et d’encouragement.

Noviciat : période de soins intensifs pour l’esprit 1814 Pensez à la grande grâce que le Seigneur vous accorde en vous faisant porter un habit pour entrer au noviciat, et, par la suite, en vous permettant de faire la profession des Conseils Évangéliques. Le noviciat est le temps d’un soin intensif pour l’esprit. En ce temps, fixez votre regard sur Jésus Christ dans sa vie

1 Allocution prononcée par Mgr Conforti à l’occasion de l’entrée au noviciat de Pietro

Danieli, Francesco Del Fabbro, Giovanni Stefani, Franco Teodori, Giuseppe Toscano,

Liberato Visentini. Le texte a été sténographié par les profès temporaires Gaetano La

Face et Natale Vaccari.

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privée. Qu’a-t-il fait ? Selon notre entendement, il s’est préparé à l’Apostolat. C’est ainsi que vous, de même, vous devez vous préparer à l’apostolat, en cette année, avec un soin intensif de votre esprit. Vous y parviendrez si vous fixerez votre regard sur Jésus Christ.

La vie cachée de Jésus à Nazareth 1815 La vie cachée de Notre Seigneur est un grand mystère. Nous nous posons la question sur la raison qui l’a poussé à travailler seulement trois ans dans l’apostolat, alors qu’il a passé trente ans dans la vie cachée. Ne pouvait-il pas consacrer plus de temps à l’apostolat et tourner le monde entier pour faire plus de disciples ? N’aurait-il pas engrossé les rangs de ses croyants jusqu’à convertir tout le monde ? Oh ! Les pensées de Dieu sont différentes des nôtres !

1816 Jésus Christ a voulu poser la fondation de l’édifice qu’il était en train de bâtir et qu’il devait durer pour toujours. Quel est ce fondement ? C’est l’humilité : la vertu la plus difficile à pratiquer, parce qu’elle s’oppose à la plus grande de nos passions, qui est l’orgueil. Il a fallu tout l’exemple de l’Homme Dieu qui pour trente ans a vécu caché, pour convaincre les hommes de la nécessité de cette vertu.

L’humilité, fondement de l’édifice 1817 Ainsi, vous devez construire un grand bâtiment : votre perfection. Et le fondement de votre perfection doit être l’humilité. Pour cela, vous devez détruire vous-mêmes, il faut vous persuader de votre nullité. Dieu seul est tout et nous ne sommes rien. À Dieu seul appartiennent l’honneur et la gloire. Nous ne pouvons rien de nous-mêmes car c’est Dieu qui nous assiste par sa Providence. Et quand vous serez persuadés de cela, le Seigneur réalisera en vous son œuvre. Vous serez des instruments dignes pour les desseins que Dieu aura tracés sur vous. Tandis qu’il résiste aux orgueilleux, aux humbles il accorde sa grâce : « Dieu s’oppose aux orgueilleux, aux humbles il accorde sa grâce » (Jc 4,6).

Confiance en Dieu 1818 Comment les saints ont-ils pu réaliser des grandes merveilles ? Ils se sont méfiés d’eux-mêmes et ils n’ont eu confiance qu’en Dieu. Et Dieu a fait, avec eux, des merveilles.

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1819 C’est ce que vous devez faire en cette année de noviciat. Mettez-vous tout de suite à l’œuvre et avec un bon élan. Dites au Seigneur : « Apprends-moi à faire ta volonté, car tu es mon Dieu » (Ps 142,10). « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute » (1Sam 3,9). Alors Dieu parlera à votre esprit et à votre cœur.

Persévérance et constance 1820 Mettez-vous sous la protection de St François Xavier. Priez-le pour qu’il vous aide à passer l’année de noviciat de manière qu’au bout vous puissiez faire la profession des Conseils Évangéliques. Priez-le pour qu’il vous accorde la persévérance dans votre vocation et la persévérance finale afin d’être un jour tous rassemblés à jouir de la vision bienheureuse de Dieu. Soyez persévérants et constants. Il ne suffit pas de bien commencer. Il faut persévérer jusqu’au bout. Et moi, indigne, j’implore cette persévérance pour vous par l’intercession de la Vierge Marie, St François Xavier et par vos Saints protecteurs.

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Emaldi P. Alfeo

Homme généreux et de grande force de volonté,

il sut attirer au Christ de nombreux disciples

par son esprit de serviabilité,

attentif à ne pas causer du tort à personne.

Né le 15.03.1902 à Lugo di Romagna (Ravenne), entré à Parme le 18.08.1919, ordonné prêtre le 28.02.1926, envoyé en Chine le 25.03.1926, il y rendit service pendant 26 ans de manière ininterrompue. Incarcéré à cause du Christ, il s’est coupé une partie de la langue : il a préféré courir le risque de rester muet pour toujours, plutôt que trahir le secret du sacrement de la confession. Il quitte la Chine, en 1951, pour continuer l’animation missionnaire avec la sagesse des proverbes chinois en Italie (1951-1962) et en Espagne (1962-1974). Il meurt à Tavernerio (Como) le 14.08.1976.

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TABLE DES MATIÈRES

PRÉSENTATION .............................................................................................................. 3 INTRODUCTION.............................................................................................................. 5

1. Contexte socio-politique des années 1920 ............................................ 5 2. Un nouvel essor pour l’Institut ............................................................... 7 3. Le premier noviciat régulier : ses visages et ses curiosités .................. 12 4. Les conférences aux novices ................................................................. 23 5. Pour terminer ....................................................................................... 26

0. La voie de la perfection .......................................................................................... 29 1. Conseils évangéliques ............................................................................................ 31 2. Pauvreté .................................................................................................................. 33 3. Pauvreté (suite) ....................................................................................................... 39 4. Chasteté................................................................................................................... 455. Obéissance .............................................................................................................. 53 6. Constitutions ........................................................................................................... 61 7. Charité envers le prochain ..................................................................................... 69 8. Union habituelle avec Dieu .................................................................................... 75 9. Aridité et scrupules ................................................................................................. 83 10. Sanctification des actions ordinaires ................................................................... 91 11. Prudence ............................................................................................................... 99 12. Force .................................................................................................................... 107 13. Sincérité et vérité................................................................................................ 115 14. Tempérance ........................................................................................................ 121 15. Prière ................................................................................................................... 131 16. Confession ........................................................................................................... 137 17. Tentations contre la vie religieuse .................................................................... 143 18. Noviciat ................................................................................................................ 149

Éd. Conforti, Kinshasa 2020

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Tonetto P. Giovanni

Les 4 ans de tourbillon dans les camps de concentration

n’ont pas diminué en lui l’enthousiasme

de missionnaire zélé en Chine et au Brésil,

enraciné dans la piété, amusant dans les entretiens fraternels,

joyeux de faire le bien

Né le 16.09.1901 à Salgareda (Trévise), entré à Parme le 10.11.1920, ordonné prêtre le 24.02.1927, envoyé en Chine le 14.03.1927, il y rendit service pendant 20 ans, apprécié par son infatigable esprit actif, enthousiaste de sa vocation et joyeux dans les conversations. Il connut plusieurs tribulations, dont le cachot et le camp de concentration. Après six ans de recteur à Vicenza, en 1953, il part au Brésil où il fut Supérieur Religieux et Curé. Il meurt à Parme le 05.02.1973.

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Éditions Conforti Kinshasa 2020

Imprimerie 4Graph Srl via Ugo la Malfa, 19 – Spigno Saturnia 04020 Latina

Achevé d’imprimer le 24 mars 2020

Dépôt légal : mars 2020 N° d’impression : 75368/2020

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Guido Maria Conforti est né en 1865 à Casalora de Ravadese (Parme-Italie), ordonné prêtre en 1888, il fonde l’Institut des Missionnaires Xavériens le 03.12.1895. Ordonné évêque de Ravenne en 1902, le même jour, il fait la profession perpétuelle. Il devient évêque de Parme en 1908, diocèse qu’il dessert jusqu’à sa mort, survenue à Parme le 05.11.1931. Il a été canonisé par le pape Benoît XVI le 23.10.2011.

Faustin Turco est né à Talmassons (Udine-Italie) en 1971. Devenu Missionnaire Xavérien en 1991, il a été ordonné prêtre à Parme (Italie) en 1998. Depuis 1999, il rend service en R. D. Congo où il est, actuellement, maître des novices à Kinshasa. Dans cet ouvrage, il a voulu introduire et traduire en français la richesse de la théologie de la vie religieuse et missionnaire exprimée par St Guido Maria Conforti (1865-1931) dans ses conférences aux novices de l’année 1920-1921.

Photo de couverture. Parme, Institut Missions Étrangères, 17.09.1921 : les 14 néo-profès du premier noviciat régulier. Au centre Mgr Conforti, à sa droite le p. Giovanni Bonardi et à sa gauche le p. Uccelli Pietro. Source : Archivesnumériques Xavériennes.

Les autres images du livre ont été gentiment concédées par le Centre Documentation Xavériens Rome (CDSR) et le Centre Études Confortiennes Xavériennes de Parme (CSCS, Parme-Italie).