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Rastafarisme : gloire à Bob ! p.7 Les saintes librairies p.6 Les victimes du Bataclan, les « Aigles de la mort » p.3 www.10dumat.iscpalyon.com Actualité, analyse et dérision, tout sur les religions à Lyon PROMOTION 2015 / 2016 - ISCPA - J3 - JEUDI 28 JANVIER 2016 N° 8 ISLAM DE FONDS @le10duMat

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Le numéro 8 du 10 du mat est tout frais. Le quotidien des étudiants en spécialisation presse écrite. N'oubliez pas le blog 10dumatin.iscpalyon.com

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Page 1: 10 du mat num 8 28012016

Rastafarisme : gloire à Bob ! p.7

Les saintes librairies p.6

Les victimes du Bataclan, les « Aigles de la mort » p.3

www.10dumat.iscpalyon.com

Actualité, analyse et dérision, tout sur les religions à LyonPR

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EDITOAxel PoulainRédacteur en chef

La République a trouvé, en quelques jours, son « nouvel ennemi ». Mais au lieu de se concentrer sur le fond du pro-

blème, on s’attarde encore sur ce qui fait le buzz… Idris Sihamedi, président de l’ONG Baraka City, était ce dimanche, tout comme Najat Vallaud-Belkacem, invité sur le plateau du « Supplément » de Canal Plus. La ministre de l’Education a alors été massivement cri-tiquée sur les réseaux sociaux pour son manque de répartie face à celui qui peine à condamner les actes de Daesh. C’est finale-ment quelques heures plus tard que celle-ci a condamné « des propos qui mettent en cause les principes fondamentaux de notre République ». Le temps de latence de Najat Vallaud-Belkacem a été vivrement attaqué, tout comme le moment de malaise sur et hors plateau. Mais à quelles fins, si ce n’est mettre en lumière un personnage nuisible qui ne s’assume pas ? Il serait peut-être temps de reconsidérer le choix des interve-nants. Là encore, on reprochera aux journa-listes leur manque d’objectivité et leur travail de pré-sélection. Rappelons l’interview de Bachar al-Assad en juin 2015 sur France 2, qui avait fait débat lorsqu’il accusait la France d’être la cause de l’expansion du terrorisme. Nous pouvons supposer que le gouverne-ment trouvera un nouveau méchant au cours de l’année.

Le monde des religions

Fermée pour salafisme, la mosquée de l’Arbresle rouvre ses portes

Michel Delpuech, préfet du Rhône, qui s’est rendu sur place, a décidé hier la réouverture de la mosquée de l’Arbresle, fermée depuis novembre 2015 dans

le cadre de l’Etat d’urgence. Fermée depuis le 26 novembre dernier par arrêté préfectoral dans le cadre de l’Etat d’urgence, la mosquée de l’Arbresle, qui était suspectée de dérives salafistes, est de nouveau autorisée à accueillir ses fidèles. L’autorisation prévoit donc la reprise de l’activité religieuse « tout en respectant les règles de la République », selon la préfecture. Depuis plusieurs mois, la mosquée était fréquentée par un grand nombre de salafistes pouvant être en lien avec des individus en Syrie, ce qui constituait un important risque de troubles à l’ordre public et à la sécurité. Néanmoins, depuis, des progrès pour faciliter sa réouverture ont été faits. Une nouvelle association musulmane a été créée, l’association culturelle de l’Arbresle a entièrement renouvelé son bureau et ses membres se sont engagés à promouvoir un islam de paix, selon les règles de la République. La mosquée peut donc reprendre son activité dans « un climat apaisé », et ses membres devront adhérer au conseil du culte musulman, selon Michel Delpuech.

Cachez ces statues que Rohani ne saurait voir

Dans son édition d’hier, le 10 du mat’ évoquait la rencontre entre Hassan Rohani, président ira-

nien, et le Pape François au Vatican. Durant cette visite en terre italienne, Rohani s’est rendu au musée du Capi-tole à Rome, en compagnie de Matteo Renzi, président du Conseil italien. A cette occasion, toutes les sculptures dé-vêtues des guerriers et des divinités ont été encoffrées dans de grandes boîtes blanches afin de respecter « la culture et la sensibilité iranienne » selon les au-torités.

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Le film « Salafistes » interdit aux mineurs

La ministre de la Culture, Fleur Pel-lerin, a décidé hier d’interdire le documentaire « Salafistes » aux

moins de 18 ans, dont la sortie en salle était prévue ce mercredi. Les réalisa-teurs François Margolin et Lemine Ould M.Salem avaient, depuis 2012, rencon-tré des théoriciens du terrorisme isla-miste au Mali, en Tunisie ou encore en Irak. Il y a une semaine déjà, la Commis-sion de clarification des films avait jugé le documentaire trop violent et pas as-sez distant par rapport aux propos te-nus par les personnes interviewées.

Le silence est d’or face la mauvaise foi

Directrice de la publicationIsabelle DumasDirectrice de la rédactionMarie-Anne MullerRédacteur en chefAxel PoulainRédacteursDavid Hernandez, Lilian Gaubert, Laura Turc, Florentin Perrier, Maxime Feuillet, Leo Roynette, Léa Masse-guin, Charline Bakowski, Hugo Borrel, Charlène Ravella, Pierre-Antoine Barut, Arnaud Bastion, Johanne-Eva Desvages, Paul Dalas, Stéphane Mo-nier, Morgan Couturier.

Pour réagir et approfondir la lecture

[email protected]

Tribune sur le Bataclan, le père Hervé Benoît aurait fait retraite

Actualité

L a tribune avait fait grand bruit dans la presse locale, nationale mais aussi sur les réseaux sociaux. D’après les

dernières informations du Progrès, le prêtre Benoît n’est plus à Lyon. Le cardinal Philippe Barbarin avait annoncé, le 27 novembre dans un communiqué, avoir relevé le père Hervé Benoît « de ses différentes charges pastorales dans le diocèse de Lyon ». « Je demande au père Benoît de se retirer immé-diatement dans une abbaye pour prendre un temps de prière et de réflexion », écrit-il dans le communiqué. Recommandation que le père Hervé Benoît semble avoir suivie car il ferait une retraite d’un mois dans un monas-tère du Vaucluse. Une information que l’on a voulu vérifier auprès du chef de cabinet du cardinal Barbarin, Pierre Durieux : « Le père Benoît n’a pas été sanctionné, mais invité à se retirer un mois dans un monastère, et où il est et ce qu’il fait ne regarde personne. On ne communiquera pas plus sur ce sujet. » Du côté du diocèse de Bourges, auquel le père Benoît est également rattaché, personne n’était présent pour répondre à nos ques-tions. Une autre information a été évoquée par Le Progrès. Selon le quotidien, le prêtre ferait tout pour obtenir la levée des sanc-tions prises à son encontre par le diocèse de

Lyon, même si Pierre Durieux souligne que son retrait n’est pas une sanction. Avant de partir en retraite, il aurait cherché à lancer une mobilisation contre le cardinal Barbarin.

Une tribune qui divise l’Église catholique

Si le cardinal Barbarin s’est dit « consterné » par le texte qu’il juge « blessant », la Confé-rence catholique des baptisés francophones, mouvement de catholiques réformateurs, a réagi dans une lettre ouverte au cardinal : « Comme vous, nous avons été horrifiés par les propos qu’a tenus le père Hervé Benoît. Cette assimilation froide et cynique des ter-roristes aux victimes, soit disant porteurs ensemble de la même culture de mort, est inacceptable. » Ils lui ont demandé de « prendre les mesures qui s’imposent », mais aussi « des excuses publiques » pour « le dommage causé aux victimes, à leurs fa-milles et à l’ensemble des catholiques ». Si la Conférence catholique des baptisés franco-phones soutient le cardinal dans sa décision, les sites qualifiés « de catholique intégriste » l’attaquent. A l’image de Nouvelle France, où un papier, intitulé « La lâcheté de l’épiscopat catholique français », s’attaque à la réaction

Le 20 novembre dernier, le prêtre Hervé Benoît, l’un des chapelains de la basilique de Fourvière, avait publié une tribune, comparant les victimes au Bataclan à de « pauvres enfants de la génération bobo ». Des propos qui font toujours débat.

14%D’après le quotidien britannique The Independant, pour 14% des Fran-çais, la religion est « très importante ». Menée dans 40 pays, cette étude positionne la France à la 38ème place du classement. A titre de compa-

raison, l’Ethiopie, première, culmine à 98% pendant que la Chine, bonne dernière, n’atteint que 3%.

Le père Hervé Benoît, qui officie à la basilique de Fourvière, s’est retiré en retraite un mois.

© Claire Tholozan

Laura Turc

du cardinal, « consterné », par la tribune du père Benoît : « Monseigneur Barbarin et tous les consternés de l’Église, souve-nez-vous que lors de votre comparution devant Notre Seigneur, il vous sera de-mandé « Qu’as-tu fait de mon Eglise ? » ». Une critique de sa « politique religieuse », mais le cardinal, de son côté, n’hésite pas non plus à critiquer celle des intégristes, comme il l’exprime dans son communi-qué : « Dans le contexte qui est le nôtre, il n’est pas acceptable que des chrétiens, à plus forte raison des prêtres, ne s’ap-pliquent pas toujours, et le plus possible, à maintenir entre les hommes la paix et la concorde fondée sur la justice. » De fortes divergences dans l’Église catholique, où chaque camp n’hésite pas à taper sur les doigts de l’autre.

Voici un extrait de la tribune du père Hervé Benoît, publiée sur La riposte catholique, le 20 novembre 2015. « […] Regardez les photos des spectateurs [du Bataclan, Ndlr] quelques instants avant le drame. Ces pauvres enfants de la génération bobo, en transe extatique, « jeunes, festifs, ouverts, cosmopolites... comme dit le ‘‘quotidien de référence’’, mais ce sont des morts-vivants. Leurs assassins, ces zombies-haschishin, sont leurs frères siamois. […] Même déracinement, même amnésie, même infantilisme, même inculture... »

« Les Aigles (déplumés) de la mort aiment le diable ! »

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Au 209, avenue Félix Faure, dans le septième arrondissement lyonnais, on retrouve l’enseigne

de la première banque islamique de France, Chaabi Banque. Son direc-teur, Housni Salah Eddine, est anxieux à l’idée de recevoir un journaliste : « C’est la première fois qu’on reçoit quelqu’un comme ça. Ma hiérarchie a été très claire, je n’ai pas le droit de recevoir de journalistes. Vous com-prenez, on a déjà eu des problèmes en parlant à la presse. À Marseille, un journaliste a demandé une interview et a finalement tourné des images à notre insu avec son téléphone por-table, ce qui nous a porté préjudice ». Cette vidéo, toujours présente sur le site Youtube, a en réalité été tournée et diffusée sur la chaîne Al-RizqTV, dans laquelle le vlogueur Mathieu Grohs dispense des conseils pour al-lier « business et charia ». Dans cette vidéo, le jeune homme reproche à la banque Chaabi d’entretenir des pra-tiques non-conformes aux règles de la finance islamique. Pourtant, sur ses brochures publicitaires, la banque Chaabi affirme être « enfin une banque de détail française, vous pro-posant de gérer votre compte selon les principes de la finance islamique ». Mais qu’est ce que la finance isla-mique ?

Des produits charia-compatible

Housni Salah Eddine explique : « C’est très simple. La finance islamique c’est la banque et la finance faites pour les gens qui restent attachés aux coutumes et aux traditions de notre religion (l’islam, ndlr) ». Tous les pro-duits financiers proposés par l’en-seigne islamique ont été validés par un comité de conformité à la charia, l’ensemble des règles tirées du Coran qui orientent la vie des musulmans. « Rien à voir avec le terrorisme » plaisante nerveusement le directeur de l’agence avant de poursuivre : « Nous avons en réalité trois cas-quettes, trois activités que nous arri-vons à conjuguer. Depuis 2008 nous sommes un bureau de représenta-tion de la finance islamique au Maroc pour la banque populaire marocaine (Chaabi signifie populaire en arabe, ndlr), nous proposions des services et des produits concernant des comptes en dirham basés au Maroc. En 2011, la banque populaire marocaine s’est lancée dans la finance islamique en France avec sa filiale, la banque Chaabi. Cependant nous proposons également des produits convention-nels avec lesquels vous paierez des

agios » ironise le directeur. Cette activité est récente en France et ces offres purement islamiques sont limi-tées. Le produit principal est le prêt Mourabaha. Il s’agit d’un contrat de vente au prix de revient majoré d’une marge bénéficiaire connue et conve-nue entre l’acheteur et le vendeur. En clair, la banque islamique achète le bien comptant auprès du fournisseur, et le revend à un prix majoré à l’ache-teur. « On achète et on revend au client, c’est limpide et transparent. C’est sain », assure Housni.

Finance saine, sacrées commissions

Sous le regard de Mohammed VI, dont le portrait est affiché face au bureau, le directeur de l’agence lyonnaise af-firme que la finance islamique vient changer la donne internationale. « Au-jourd’hui, il y a beaucoup trop de spé-culations. Les traders s’amusent avec l’économie. On a bien vu ce qu’il s’est produit avec la crise des subprimes et personne n’a retenu la leçon. Nous, nous insistons vraiment sur le mot éthique. Notre religion nous interdit de spéculer, quand on fait des opérations, tous les acteurs prennent leur part de

En appliquant les règles de la charia, la finance islamique s’est fait une place dans le monde de la finance. En France, son monopole revient à la banque Chaabi depuis 2011. Sous couvert de la religion, la banque fait pourtant payer le prix fort à ses clients. Reportage.

Le dossier

Paul Dalas

COMPTE CORAN

Méconnues et peu utilisées par les Français, les banques islamiques arborent pourtant un modèle économique viable à long terme.

Jean-Louis Castigon, professeur d’économie et diplô-mé d’un DEA en sciences économiques (Finance et banque) nous éclaire : « Il n’y a aucune raison que les banques islamique ne soient pas viables à long terme. Elles utilisent le même modèle économique qu’une banque traditionnelle. Elles respectent juste des principes différents, basés sur la religion ». La seule difficulté se trouve dans la prospection et dans l’attraction de nouveaux clients, « on remarque que ces banques sont vraiment méconnues. Il n’y a au-cune publicité à la télévision, ce qui représente pour-tant le meilleur moyen d’attirer de nouveaux clients Pour les banques islamiques, la prospection marche uniquement avec le bouche-à-oreille. C’est un véri-table frein au développement économique ».

D’autres entraves insoupçonnées découragent les Français à adhérer aux banques islamiques. Elles sont liées au contexte contemporain. Jean-Louis Castigon explique : « Le terme «islamique» a une connota-tion négative en France depuis les attentats de jan-vier et de novembre. Pour un public averti, islamique ne veut pas dire terroriste. Mais l’amalgame se fait rapidement ». Pourtant, à plus grande échelle, les ressources existent. Selon le site du gouvernement, la finance islamique est en pleine expansion dans le monde en 2013, représentant 1800 milliards de dol-lars d’actifs bancaires. Un chiffre éloquent qui dé-montre toute la puissance financière de la bourse à échelle mondiale et qui s’explique par sa grande pré-sence en Asie et au Moyen-Orient, principalement dans les pays où la religion officielle est l’islam.

Dieu est un mauvais VRP

responsabilité. Pas comme les traders », s’attarde-t-il. La finance islamique re-proche les taux d’intérêts qu’exercent les banques, et pourtant. Pour les clients souscrivant à la banque version halal, la commission peut s’élever entre 5 et 20% du prix du bien, que le client s’engage à rembourser pendant 10 ans. Si, à l’instar de Housni Salah Eddine, les banquiers islamistes ne comptent pas « faire de l’argent avec de l’argent », la finance islamique est bel et bien une activité lucrative. En 2010, après la crise écono-mique, l’administration fiscale a dopé l’implantation d’agences de finance is-lamique en abaissant l’imposition des actes notariés concernant l’économie divine à 1% contre 6% pour les struc-tures conventionnelles. En 2008, la mi-nistre de l’économie Christine Lagarde avait fait pression au gouvernement pour son implantation en France afin de séduire les capitaux du Golfe. En France, la banque Chaabi n’a pas vraiment de concurrence. Des structures comme 570 Entreprises adaptées de sous-trai-tance industrielle (EASI) ont tenté de faire de l’ombre au leader musulman du secteur. Aujourd’hui cette société de courtage et de microcrédits collabore avec la banque Chaabi en jouant le rôle de rapporteur d’affaires. « C’est juste du business » conclut Housni Salah Eddine.

La banque islamique existe sur le territoire français depuis 2011. Le public en a peu entendu parler, et ce, malgré la viabilité de son modèle économique. La faute à un produit marketing peu visible et difficilement vendable dans l’Hexagone. Jean-Louis Castigon explique pourquoi.

Stephane Monier

▲ Housni Salah Eddine, directeur

lyonnais de la banque Chaabi.

L’une des 17 agences françaises.

© P.Dalas

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Culture

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QUAND DIEU S’INVITE EN LIBRAIRIEDavid Hernandez

Il était une foi...

On pense rapidement à la Jamaïque, terre du cannabis et de la mode rasta. Et bien détrompez-vous, il n’en est rien. Certes, le

mouvement rastafari a connu son essor dans ce pays des Caraïbes mais pour trouver trace des ins-pirations de ce mouvement, il faut se tourner vers l’Afrique. Et plus précisément vers l’Ethiopie et le couronnement de Tafari Mekonnen sous le nom d’Hailé Selassié. Il est le dernier empereur d’Ethio-pie et serait, selon Leornard Howell, fondateur du rastafarisme et très porté sur la question des noirs, le « Messie » du mouvement. Il descendrait des rois Salomon et David. Une référence biblique non né-gligeable chez les rastas qui s’imprègnent en partie de la King James Bible des anglicans.

Une doctrine floue mais qui rappelle les juifs

Pourtant, il n’existe pas de livre spirituel à propre-ment dit, ni de doctrine rasta. Le mouvement ras-tafari s’accorde à dire qu’il reconnaît la Bible avec les Dix commandements et les Evangiles, ainsi que le Kébra-Nagast (généalogie des rois d’Ethiopie), le Sankédar et le Fêta Nagast. Ce sont trois livres du christianisme éthiopien. La terre sainte des rastas est l’Éthiopie, pays d’où ils auraient été déracinés par les esclavagistes européens et américains. L’es-clavagisme, un thème fort de la culture rasta, no-tamment dans les chansons. Dans Babylon system, Bob Marley, converti au rastafarisme en 1966, au moment de la visite de Selassié en Jamaïque, dé-nonce le déracinement des Ethiopiens et l’escla-vage. Un parallèle qui rappelle la situation des juifs en Egypte avant le retour en Terre promise avec Moïse. La situation des noirs aux Etats-Unis per-met au mouvement rasta de croître, notamment

À Lyon, une poignée de librairies se partagent le mar-ché de la littérature religieuse. Destinés à un public chrétien pour la plupart, ces établissements pro-posent tous types de produits autour du thème de la foi. Reportage dans ces boutiques insolites.

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Les grelots de la porte d’entrée s’agitent. Mylène vient de franchir le seuil de la porte de l’enseigne située quai Tilsitt et tombe nez à nez avec un album de rap et des liasses de

billets de banque. Non, la jeune étudiante ne tourne pas dans le clip bling-bling du dernier rappeur à la mode mais entre dans une librairie religieuse chrétienne. L’album en vitrine est celui de Jaascaï, une icône de la scène hip-hop protestante et les billets sont des faux, sur lesquels il est mentionné « Stop à l’arnaque, Jésus est la seule vraie valeur ». À l’intérieur de la boutique, Jo-siane Beckner et une autre bénévole conseillent les clients, venus faire des cadeaux pour leurs proches. « Ici, on vend de tout. Des calendriers, des livres de coloriages pour enfants, des Evangiles, d’autres types d’ouvrages religieux, des disques », confient-elles. La clientèle est elle aussi diverse et variée. Josiane poursuit : « On accueille principalement des étudiants, notamment en théo-logie, puisque la fac est située à quelques rues d’ici mais aussi des personnes qui viennent faire des cadeaux pour des baptêmes ou des communions. Parfois, on a aussi des clients musulmans qui viennent pour découvrir nos textes sacrés ».

Presque toutes en Presqu’île

La librairie chrétienne CLC du quai Tilsitt s’adresse principalement aux protestants et nombreux sont les clients à être redirigés par les deux bénévoles vers d’autres enseignes spécialisées. « Protes-tantisme et catholicisme ne sont pas synonymes. Souvent

les gens lisent librairie chrétienne depuis l’extérieur et pensent trouver ce qu’ils cherchent ici, mais ce n’est pas forcément le cas. Donc on les réoriente vers les autres librairies du quartier », concluent-elles. Ces brebis égarées n’ont pas à marcher des ki-lomètres pour trouver d’autres établissements du même genre. La petite dizaine de librairies religieuses chrétiennes sont toutes situées dans le même périmètre entre la place Bellecour et la place Carnot. Toutes, sauf une. La Maison de la Bible, fondée en 1947, siégeait rue Garibaldi avant son transfert, avenue Thiers, au cœur du quartier cosmopolite des Charpennes. « C’est un choix que nous avons fait. Nous n’avions pas envie de nous installer à côté des autres librairies religieuses. Ici, nous avons beaucoup moins de concurrence », explique Monsieur Perez, l’un des gé-rants de la boutique. Dans cette librairie, c’est la Bible, l’ouvrage le plus demandé dans ce type d’enseignes, qui trône à l’entrée du magasin. Chez Decitre, La Procure et à la librairie Saint-Paul, c’est le livre du Pape François qui occupe une bonne place sur les étagères, mais aussi sa version dessinée « Les messages du Pape François expliqués aux enfants » et, plus étonnement, « Terreur dans l’Hexagone, genèse du djihad français » le dernier ouvrage de Gilles Kepel. Clothilde, vendeuse à La Procure, explique que les clients ont été marqués par les attentats de novembre : « On res-sentait un climat de peur. Il y avait également plus de demande et plus de monde qui s’intéressait à notre rayon islam ». Un rayon qui est présent dans la plupart des librairies religieuses de la ville, contrairement aux albums de rap ou liasses de billets.

grâce aux chanteurs qui n’hésitent pas, à travers leurs chansons, à inculquer les notions du rastafa-risme. Ce mouvement commence à être reconnu en Jamaïque malgré l’interdiction de l’usage du can-nabis. Une situation farfelue pour Luc, dreadlocks sur le crâne et fan de Marley : « C’est quand même fou de se dire aujourd’hui que le cannabis, emblème rasta par excellence, était interdit en Jamaïque. »

Le rasta n’est plus ce qu’il était

Pourtant, nous ne sommes pas à un paradoxe près. 1981 marque une année difficile pour le mouve-ment puisqu’il perd son ambassadeur le plus cé-lèbre, Bob Marley, ainsi que l’un de ses fondateurs Leonard Howell. L’organisation, Les Douze Tribus d’Israël, essaie bien de ramener les rastas sur leur « Terre Promise » en Ethiopie, rien n’y fait. Pour Thi-baut-Marc Caplain, fondateur de Rasta de France, « le rasta d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec ce-lui des années 1960 ». Ils se considèrent comme les « petits fils blacks des hippies » et n’ont aucune vocation religieuse. Une position partagée par Luc qui se considère « comme rasta à travers la musique mais par exemple je n’irai pas jusqu’à ne plus manger de viande comme le mouvement rastafarisme le préconise ». Si au début du mouve-ment, un rasta se devait, dès le réveil, de « lire un chapitre de la Bible pour éloigner le plus possible les démons », ce temps est loin car « le rasta n’a plus aucun lien avec un pseudo Dieu », nous as-sène Caplain. Dire d’un rasta qu’il est rastafari au-jourd’hui peut-être donc vu comme une offense comme nous le confie Thibaut-Marc Caplain : « Attention à ne pas confondre rastafari et ras-ta que je suis. » Le mouvement en France au-rait donc pris une direction autre que l’originel.

Maxime Feuillet

À l’intérieur de la librairie « La Procure», Lyon 2ème © M. Feuillet

LES AUTRES LIBRAIRIES RELIGIEUSES À LYONEn plus de la dizaine de librairies religieuses chrétiennes de la Presqu’île, la ville de Lyon compte trois établisse-

ments de ce type dédiés à la religion musulmane (Sana, Dar Al Muslim, centre Tahwid), tous situés dans le 3ème ar-rondissement, non-loin de la Part-Dieu. À Villeurbanne, la librairie hébraïque Aleph propose des articles et ouvrages

religieux sur le judaïsme.

Le mouvement « rasta » est, pour la plupart des mortels, associé à l’image de Bob Mar-ley et de la musique reggae. Pourtant ce mouvement tire son nom et commence dans un pays qu’on ne soupçonnerait même pas.

LE RASTAFARISME

DE L’ETHIOPIE À LA JAMAÏQUE

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Le quiz de la rédac

QUESTION 1 QUESTION 2

QUESTION 3 QUESTION 4

REPONSE 3 : B- Plus que triplé. Ils étaient une trentaine dans les années 1980, ils sont aujourd’hui plus de 120. En 2010, environ 1500 demandes d’exorcisme ont été enregistrées à Paris. Mais une partie d’entre elles n’a pas abouti car les personnes étaient atteintes de troubles mentaux et non possédées. Le Vatican a désormais imposé au moins un exorciste par diocèse et défini en 1999 une charte recensant les différents symptômes d’une possession démoniaque.

REPONSE 4 : A. Plus de 13 000 barbes auraient été rasées en un an, d’après les déclarations de la police du Tadjikistan. 160 magasins de vêtements traditionnels musulmans ont également été fermés pour lutter contre le radicalisme. En août dernier, le pays a interdit le port de la burqa, du hijab et du niqab. Avant cela, plus de 1 700 femmes auraient été « convaincues » de ne plus porter le voile intégral, a indiqué le chef de la police de Khatlon (une province du sud-ouest).

REPONSE 2 : A. 5 à 7 ans. Beaucoup débutent par une licence en philosophie dont le cursus dure trois ans. Les futurs prêtres reçoivent ensuite une formation théologique de quatre à cinq ans. « Au bout de cinq ans ils sont ordonnés Diacre », in-dique Jean-François Chiron, enseignant à la faculté catholique de Lyon. « Ils ont ensuite une année de préparation » durant laquelle ils découvrent la vie de prêtrise et accomplissent des « missions ».

REPONSE 1 A- La Thaïlande. D’après le sondage Win/Gallup International, 94% des Thaïlandais interrogés se sont déclarés croyants et seule-ment 1% athée. « Suivent l’Arménie, la Géorgie et le Maroc. En dernière position, on retrouve la Chine, avec 7% de croyants et 61% d’athées convaincus », indique l’étude. Pour obtenir ce résultat, 64.000 personnes ont été interrogées dans 65 pays différents.

ntio

Quel est le pays le plus religieux au monde ?

Combien dure la formation complète d’un prêtre ?

Depuis 1980, le nombre de prêtres exorcistes en France a :

Au Tadjikistan, comment le gouvernement lutte-t-il contre le

radicalisme ? A- Doublé

B-Plus que tripléC- Diminué de moitié

A- On interdit les barbes et la burqaB- On mène des perquisitions dans les mosquées

C- On envoie 2.000 Tadjiks combattre les djihadistes en Syrie

A- La ThaïlandeB- Le Maroc

C- L’Inde

A- 5 à 7 ansB- 4 à 5 ans

C- 3 ans